Rabat entre les lignes, ou l’hymne à la capitale du Royaume: Une création de Rassane Fadili
La ville de Rabat est à l’honneur, en cette année 2021. Elle a été retenue Capitale Africaine de la Culture par le dernier Sommet des villes africaines – Africités en 2018.
Une distinction qui s’ajoute au titre de Rabat Ville Lumière, Capitale Marocaine de la Culture (2014) et à la reconnaissance internationale par son inscription au Patrimoine mondial de l’UNESCO (2012). La longue période de confinement et de réclusion qu’a traversée le monde, les gestes barrière et la distanciation ont suspendu les manifestations artistiques et culturelles, au Maroc comme ailleurs.
C’est ce moment de reprise qu’a choisi Rassane Fadili pour célébrer la capitale.
Après ses études d’architecture à Paris, Rassane décide, en novembre dernier et alors que la France se reconfine, de rejoindre la ville où il a grandi afin de réaliser un projet artistique, aujourd’hui abouti sous la forme d’une exposition.
Les œuvres exposées depuis le 1er juillet 2021 au siège du Parti du Progrès et du Socialisme à Rabat – une belle réalisation des architectes Rachid Andaloussi et Fikri Benabdallah – sont parrainées par l’association Rabat-Salé Mémoire. Elles expriment le lien ténu entre espace privé et espace public. Un lien dont les limites sont illustrées par la baie, la fenêtre, la porte, un ensemble ouvert sur la cité qui rappelle, par certains aspects, la longue période de confinement. Un regard porté sur un extérieur intangible dans sa beauté, à partir d’un intérieur dépouillé. Le double spectacle d’un regard intérieur sur un monde immobile. Par cette approche, la ville de Rabat se découvre – ou se redécouvre – depuis l’intimité intérieure, entre les lignes qui composent le paysage du dehors et du dedans.
→ Lire aussi : Alaa Halifi, un Marocain dans la “shortlist” du prix international Al-Rafidain First Book Award 2021
Le regard plonge vers un extérieur aux couleurs chaudes, entre aube et crépuscule, un choix de couleurs qui apaisent, rassurent et invitent à la rêverie. Les intérieurs sont dessinés à l’encre noire et s’habillent du style de la « ligne claire ». Une manière de rendre à chaque trait un caractère de précision, d’exactitude mais aussi de légèreté, presque de fragilité.
Ce contraste entre monochromie et polychromie invite au va-et-vient entre deux espaces à la fois distincts et homogènes, dans une élégante articulation. La représentation des monuments se « suffit à elle-même », par leur présence et leur ancrage dans la ville. Ils en sont les emblèmes forts de la culture que porte une capitale séculaire. Ici, la démarche empruntée par l’artiste est de donner aux intérieurs rbatis une ampleur égale à celle des lieux emblématiques sur lesquels ils s’ouvrent. Une manière de rehausser et de mettre en valeur tant le patrimoine public que privé. Ce sont, de manière tout aussi égale que différente, la Tour Hassan et la Kasbah des Oudayas, la gare de Rabat et la modernité de Hay Ryad, Jamaa Assounna et la Cathédrale Saint-Pierre, la vallée du Bouregreg qui accueille le Grand théâtre de Zaha Hadid et la future Tour Mohammed VI.
Par la représentation de lieux et d’espaces connus de tous, sont également traduits des espaces de l’intimité portés par les habitants de la Cité. Ce sont donc des lieux de vie liés à la mémoire de Rabat qui sont représentés selon des points de vue jamais révélés, ceux d’espaces intimes qui regardent la ville et l’invitent dans leur espace intérieur.
La série de vingt tableaux en compte seize faisant état du contraste entre intérieur et extérieur. Les trois derniers de la série s’ouvrent – comme une conclusion à la longue période d’enfermement – sur trois paysages exclusivement extérieurs. La dernière œuvre, intitulée Deux Rives, offre une vue panoramique embrassant, de Rabat à Salé, l’ensemble des grands projets, passés, présents, mais aussi futurs de la Capitale lumière. Cette exposition est l’occasion de nous replonger dans les différents lieux marquants de Rabat tout en nous questionnant sur notre quotidien, sur la richesse culturelle et patrimoniale que l’on peut toucher du bout des doigts mais qui échappe souvent à notre attention. Une manière de porter un regard renouvelé sur notre ville et son patrimoine. Cette exposition est dédiée entre autres aux jeunes du PPS qui célèbrent la Fête de la Jeunesse.
Exposition jusqu’au 23 juillet 2021 – de 10h00 à 19h00 sauf le dimanche