Compensation : le nouveau gouvernement osera-t-il lever les subventions ?
Des hausses, encore des hausses… En ces temps d’augmentations des prix du pétrole et des produits alimentaires, les Marocains sont en état de choc. Que fait le gouvernement pour les protéger ? Et quelle est la place de la caisse de compensation dans le maintien du pouvoir d’achat des citoyens ?
Pas de diminutions prévues, par contre le nouveau Projet de Loi de finances 2022 prévoit une augmentation du budget alloué à la caisse de compensation pour pallier les augmentations croissantes de certains produits, en attendant la réforme progressive de compensation, qui préoccupe les Marocains.
En ces moments de crise, la situation est devenue très dure pour les citoyens, qui ont été déçus par des hausses inexplicables de certains produits, notamment ceux de première nécessité, alors qu’ils attendaient que le nouveau gouvernement leur donne un nouvel espoir pendant cette crise sanitaire, économique et sociale, provoquée par la Covid-19.
En effet, l’Etat assume sa responsabilité dans cette affaire. Avant les dernières élections, il a été prévu le lancement d’une réforme de la caisse de compensation à travers la libéralisation progressive de certains produits à partir de l’année prochaine. Une réforme qui a déclenché une grande polémique. Mais, cette prévision a été annulée par le nouveau Projet de Loi de finances 2022, qui a prévu d’augmenter l’enveloppe destinée à subventionner les charges de compensation. Que prévoit le PLF 2022 pour pallier ces augmentations ?
Ces hausses qui déstabilisent les Marocains : une ruée vers l’abysse
Des augmentations abusives de certains produits alimentaires ont été constatées, ces deniers temps. Elles ont été pratiquées depuis la fin du mois d’août 2021. Une période où toute la population, dont le gouvernement étaient préoccupés par les élections. Ces augmentations ont touché presque tous les biens de consommations, notamment les produits alimentaires de première nécessité, comme la farine et dérivées, le beurre, le riz, l’huile,…
Il convient de noter que les produits soutenus par la caisse de compensation ont été aussi touchés, à savoir la farine et le sucre. Rappelons que la consommation nationale de céréales varie entre 180 à 200 millions de quintaux par saison, alors que la production nationale oscille au mieux entre 50 à 103 quintaux et les importations entre 60 à 90 millions de quintaux. C’est ce qui fait que la subvention de compensation du blé tendre et de la farine devrait couvrir le manque. En 2020, cette charge s’est située à 1.289 MDH.
En ce qui concerne le sucre, les Marocains consomment à peu près entre 900 mille tonnes et 1,14 million de tonnes, contre une production locale de 380 mille tonnes à 500 mille tonnes et des importations de 500 à 650 mille tonnes. La subvention à la consommation du sucre coûte à la caisse entre 3 MMDH à 3,5 MMDH par an.
Le gaz butane, une matière qui coûte cher à l’Etat
Un autre produit qui pèse sur les dépenses publiques est le gaz. Cette matière coûte à l’Etat une somme annuelle qui varie entre 9 et 11 MMDH, soit 2,4% de ses dépenses publiques. Il constitue le poids des subventions du GPL le plus élevé dans les dépenses publiques à l’échelle mondiale, selon le dernier rapport sur la compensation. En fait, le prix réel d’une bouteille de gaz varie entre 92 et 111 dirhams, et l’État supporte pour chaque bouteille entre 52 et 71 DH, face à une consommation d’environ 222 millions de bonbonnes de gaz de 12 Kg.
Le gouvernement marocain osera-t-il suspendre les subventions ?
Une réforme progressive du système de compensation a été prévue avant les élections de 2021. Cette réforme a suscité une forte polémique au Maroc. Les citoyens craignaient l’application de cette prévision qui consiste notamment à suspendre la subvention de certains produits. Censée épauler les Marocains, la nouvelle ministre de l’Economie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui les a rassurés, au moins pour 2022, dans son dernier rapport sur la compensation, réalisé en marge de la publication du Projet de loi de finances 2022, qui indique que la subvention relative à la charge de la compensation est toujours maintenue, ainsi que la subvention des consommables via la caisse de compensation qui va augmenter.
C’est ce qu’a affirmé Otmane Mouden, docteur en finances publiques, qui a précisé que « cette dotation a été imposée par la situation actuelle de certaines couches sociales, et malgré l’existence d’un projet et une volonté de réformer cette caisse et d’abandonner l’ancienne méthode de subvention, il est peu probable que le gouvernement actuel suspende en 2022 cette aide, car cela pourrait entraîner une hausse des prix et provoquer des crises sociales et des protestations ». Rappelons que les « charges communes-fonctionnement » sont passées de 24 MMDH en 2021 à 27 MMDH en 2022, dans le nouveau PLF, soit une hausse de 13,13 %. Ce budget comprendra un montant de 16,020 MMDH qui sera attribué à la caisse de compensation pour subventionner le gaz butane, le sucre et la farine du blé tendre.
C’est seulement pour 2022, mais quid des années qui suivent ? Selon Mouden « il est possible que cette réforme soit reportée à 2023 jusqu’à ce que l’image devienne claire et que la situation se stabilise ». « Nous devons être convaincus de la nécessité de réformer ce système et les mécanismes d’accompagnement, notamment au niveau du nombre de personnes qui en bénéficient, ce qui devrait figurer dans les lois de finances des trois années à venir (2023/2025) », a-t-il ajouté.