L’autonomie du Sahara, seule solution politique conforme à la pratique moderne de résolution des conflits
Le professeur Nguyen Manh Hung, de l’Institut des Etudes de l’Afrique et du Moyen-Orient de Hanoï, au Vietnam, a présenté, au siège des Nations Unies à New York, lors du séminaire organisé par la Mission Permanente du Royaume du Maroc, un éclairage instructif sur le différend autour du Sahara devant des diplomates et d’éminents experts et universitaires.
Il a affirmé, dans son exposé donné lundi, que s’intéresser à la question du Sahara marocain ne se limite pas à plonger dans le passé colonial de cette région. Les déterminants de ce conflit sont plus globaux, et impliquent une rétrospective et une étude comparée avec plusieurs régions du monde, notamment l’Asie du Sud-Est.
En apprenant les leçons tirées des études de cas de cette dernière, l’exposé du professeur Nguyen Manh Hung a montré que l’Initiative marocaine pour la négociation d’un Statut d’autonomie pour la région du Sahara est un gage de stabilité, de paix et de développement du Sahara.
Les expériences des pays de l’Asie du Sud-Est peuvent constituer le socle de l’analyse comparative du conflit du Sahara. En effet, les Philippines, la Thaïlande et l’Indonésie ont connu des conflits internes et durables causés par la diversité ethnique et l’héritage territorial de l’ère coloniale.
De facto, le statut d’autonomie porte désormais la responsabilité de la solution politique des conflits territoriaux. Le professeur Nguyen Manh Hung a affirmé que l’autonomie permet d’accoiser les ardeurs des séparatistes, en apportant « justice » et « ordre » et en préservant l’intégrité territoriale et la diversité culturelle dans le respect de la légalité internationale.
Les expériences asiatiques ont été teintées de réussite pour la Malaisie, qui a favorisé un consensus politique à même de répondre à ses intérêts nationaux multi-ethniques. L’Indonésie et les Philippines ont moins réussi à s’adresser à leurs mouvements sécessionnistes en raison de la nature complexe de leurs problèmes et de l’exclusion des négociations de certaines parties aux conflits, a regretté le professeur Nguyen Manh Hung.
Il s’agit d’une advertance que le Maroc a retenue de ces expériences, car il adopte désormais une approche totalement inclusive. En effet, comme les expériences ont montré que plus un arrangement autonome est inclusif, plus il est efficace, le Royaume initie les négociations avec toutes les parties impliquées, y compris l’Algérie, qu’il invite à officialiser sa position en tant que partie prenante du conflit.
Les exemples de l’Asie du Sud-Est témoignent de la faisabilité de la proposition marocaine, selon le professeur Nguyen Manh Hung. En effet, bien que convaincu de la légitimité de la lutte pour son intégrité territoriale, le Royaume a affiché en 2007 une position flexible afin de trouver une solution à ce conflit qui n’a que trop duré.
« L’Initiative marocaine pour la négociation d’un Statut d’autonomie pour la région du Sahara » marque la déclinaison institutionnelle du Royaume qui profite du polymorphisme des solutions aux conflits territoriaux. La position du polisario quant à elle, est restée figée : il propose un référendum d’autodétermination pour la région du Sahara comme unique solution de sortie. On assiste ainsi à un déficit de culture de négociation : aucune solution hors table n’est proposée dans un cadre où l’exercice du pouvoir est antonymique à la négociation.
De cette manière, la voie référendaire apparaît impossible dans le contexte débattu non seulement parce qu’il serait illusoire de prétendre pouvoir déterminer qui devrait être autorisé à voter, mais surtout en raison des conséquences traumatisantes de ce procédé sur les populations, souligne le professeur Nguyen Manh Hung. En effet, le référendum n’a pour but d’offrir que la balkanisation, les contestations ou la guerre civile au détriment du règlement pacifique, offert par l’Initiative de 2007, dans une région suffisamment fragilisée et menacée par la montée du terrorisme, la porosité des frontières et le changement climatique.
Conscient de la complexité de l’arrangement autonome du Sahara, l’initiative marocaine se présente comme une solution de compromis fondée sur le réalisme, et qui est, peut-être, la seule solution politique conforme à la pratique moderne de résolution des conflits, a affirmé M. Nguyen Manh Hung.
Elle repose sur deux principes : le principe de la solidarité et le principe de subsidiarité. Ces derniers vont conditionner les relations entre le pouvoir central et la région dite autonome. Cette initiative n’est pas isolée. En effet, la Constitution de 2011 a apporté le projet de “Régionalisation avancée” qui regroupe les principes d’autonomie administrative des gouvernements locaux (chapitre 9, articles 135-146).
A ce titre, preuve de bonne foi, le Maroc a lancé en 2015 le nouveau modèle de développement pour les provinces du Sud, avec un budget de 8 milliards de dollars afin d’accélérer le développement dans la région à moyen et long terme.
Bien que le plan d’autonomie de la région du Sahara soit toujours soumis à la négociation, ses points essentiels révèlent plusieurs avantages pour la région et affirment sa faisabilité.
M. Nguyen Manh Hung a énuméré quatre points centraux sur lesquels reposent la réussite d’un plan d’autonomie. Elles se traduisent comme suit pour l’Initiative marocaine :
Autonomie pour la paix : Unité de la Nation, Principe de solidarité, Répartition équilibrée des ressources entre les autorités locales et le gouvernement central, harmonie et convergence des intérêts.
Période de transition : Déclaration d’une amnistie générale, interdisant toute procédure judiciaire, arrestation, détention, emprisonnement ou intimidation de quelque nature que ce soit, en fonction des faits couverts par cette amnistie dans la région.
Partage de pouvoirs : Exclusivité des compétences sur les attributs découlant des prérogatives constitutionnelles et religieuses de Sa Majesté le Roi, en Sa qualité de Commandeur des croyants et garant de la liberté de culte et des libertés individuelles et collectives. Le projet de “régionalisation avancée” intégrerait les territoires du Sud dans un nouveau système décentralisé de gouvernance territoriale du Maroc.
Partage des richesses : La région autonome du Sahara aura des ressources financières nécessaires pour son développement dans tous les domaines, conformément au principe de la solidarité nationale.
Le professeur Nguyen Manh Hung a considéré l’Initiative de 2007, soutenue par la France et les Etats-Unis, comme seule solution actuelle au conflit. Il a estimé qu’un Sahara indépendant sera un Etat potentiellement faible et défaillant compte tenu du contexte sécuritaire fragile au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.
Il a insisté dans sa conclusion sur l’importance de la réconciliation ethnique dans la construction d’une nouvelle société cohésive. La déclaration d’amnistie du Royaume en est un parfait exemple.
Enfin, il a affirmé que le modèle de Régionalisation Avancée est un indicateur probant du renforcement de la démocratie au Maroc. L’élection en 2015 de deux authentiques sahraouis, dont un ancien responsable du “polisario”, à la présidence des deux régions du Sahara, illustre la participation régulière et active à la vie politique, économique et socioculturelle marocaine des sahraouis et leur totale inclusion.