Pollution pharmaceutique, une menace mondiale pour la santé et l’environnement
Les résidus des médicaments fabriqués et consommés par l’Homme constituent une menace mondiale pour la santé et l’environnement, selon une récente étude multi-institutionnelle visant à évaluer l’étendue de la pollution pharmaceutique des rivières à l’échelle planétaire.
Les auteurs ont identifié des concentrations potentiellement toxiques dans plus d’un quart des 258 rivières du monde échantillonnées, dévoilant que les sites les plus contaminés se trouvaient dans des pays à revenu faible ou intermédiaire, dans des régions où les infrastructures de gestion des déchets sont faibles et où la production pharmaceutique est importante. « Nous savons depuis plus de vingt ans que les produits pharmaceutiques finissent dans l’environnement aquatique où ils peuvent affecter la biologie des organismes vivants« , a indiqué dans un communiqué John Wilkinson, chercheur à l’Université de York et codirecteur de l’étude, publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS). « Mais l’un des plus grands problèmes auxquels nous avons été confrontés dans la lutte contre ce problème est que nous n’avons pas été très représentatifs dans la surveillance de ces contaminants, la quasi-totalité des données étant concentrée sur quelques zones sélectionnées en Amérique du Nord, en Europe occidentale et en Chine« , a-t-il ajouté.
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Pour cette étude, un consortium de plus de 120 collaborateurs issus des milieux universitaires, gouvernementaux et industriels du monde entier a collaboré dans le cadre du projet de surveillance mondiale des produits pharmaceutiques dirigé par l’Université de York. L’équipe de recherche a obtenu des échantillons de 1.052 sites le long de 258 rivières du monde dans 104 pays, ce qui représente l’impact environnemental de 471,4 millions de personnes, selon l’étude. Parmi les rivières figurait un grand nombre des voies navigables les plus remarquables du monde, comme l’Amazone, le Mississippi, la Tamise et le Mékong. Les rivières qui traversent les villes les plus peuplées de la planète ont également été incluses, de même que celles situées dans des zones d’instabilité politique, précisent les auteurs. Les scientifiques ont non seulement trouvé de fortes corrélations entre le statut socio-économique inférieur d’un pays et des niveaux plus élevés de pollution pharmaceutique, mais ils ont également relevé des concentrations plus importantes dans les régions où l’âge médian de la population est plus élevé.
Les activités liées aux concentrations les plus élevées comprenaient le déversement d’ordures le long des berges, l’insuffisance des infrastructures d’assainissement, la production pharmaceutique et le déversement de fosses septiques dans les rivières. Par ailleurs, les médicaments les plus fréquemment identifiés, la carbamazépine, un antiépileptique, la metformine, un antidiabétique, et la caféine, ont été détectés dans plus de la moitié des sites sélectionnés, selon l’étude. Les auteurs ont en effet constaté que les niveaux d’au moins un produit pharmaceutique dépassent les concentrations considérées comme sûres pour les organismes aquatiques dans 25,7 % des lieux d’échantillonnage.
Parmi ces produits pharmaceutiques figurent le propranolol, un bêta-bloquant, la loratadine, un antihistaminique, et le sulfaméthoxazole et la ciprofloxacine, des médicaments antimicrobiens. Selon les chercheurs, les autres produits pharmaceutiques présentant des concentrations élevées dans les cours d’eau de par le monde sont le paracétamol, l’antihistaminique fexofénadine, l’anti-convulsivant gabapentin et le médicament antimicrobien métronidazole. En raison de la généralisation de ces concentrations pharmaceutiques potentiellement toxiques dans les cours d’eau du monde entier, les auteurs ont conclu que « la pollution pharmaceutique constitue une menace mondiale pour la santé humaine« .
(Avec MAP)