Le président tunisien porte la responsabilité de la rencontre ratée de la TICAD
Par Pr. Charles Saint-Prot*
La huitième édition de la TICAD ( Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique) entre le Japon et le continent africain a commencé le samedi 27 août et s’est terminé le 28, à Tunis sans le Maroc.
Malheureusement, la conférence a été marquée par l’absence du Premier ministre japonais, Fumio Kishida ; or, si l’un des personnalités principales d’un tel événement est absent, cela en fait un sommet moins prestigieux. Le Maroc a également été absent, ce qui réduit considérablement la portée de la conférence du fait de la politique visionnaire du Roi Mohammed VI pour l’Afrique et que le Royaume est un poids lourd de la coopération entre Africains. Au total, cette réunion sera donc en deçà des attentes.
Le président sénégalais Macky Sall, qui assure la présidence de l’Union africaine, a regretté, samedi 27 aout, l’absence de la représentation du Maroc lors de la séance d’ouverture de la huitième session de la conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique, organisée par la Tunisie. Macky Sall a affirmé que « Le Sénégal regrette que ce rendez-vous de la TICAD soit marqué par l’absence du Maroc, un éminent membre de l’Union africaine, faute de consensus sur une question de représentation ».
Le Maroc contre la présence des séparatistes
L’absence du Maroc est justifiée par le fait que le président tunisien a reçu le chef des séparatistes du Polisario et a imposé sa présence au Sommet, contre l’avis du Japon et en violation du processus de préparation et des règles établies. Plusieurs pays africains ont désapprouvé le dérapage du président tunisien et le président de la Guinée Bissau et président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), Umaro Sissoco Embalo, a même quitté la TICAD en signe de protestation contre la présence des séparatistes pro-algériens.
Le ministère des Affaires étrangères marocain a publié un communiqué très clair. Il rappelle, d’une part, que la TICAD ne constitue pas une réunion de l’Union Africaine, mais un cadre de partenariat entre le Japon et les pays africains avec lesquels Tokyo entretient des relations diplomatiques. En conséquence, les règles de l’Union africaine et son cadre de travail ne s’appliquent pas.
Le communiqué précise, d’autre part, qu’il a été convenu, dès le départ et avec l’accord de la Tunisie, que seuls pourront prendre part à cette rencontre, les pays ayant reçu une invitation cosignée par le Premier ministre japonais et le Président tunisien. Une note officielle diffusée par le Japon, le 19 août 2022, souligne explicitement que cette invitation cosignée est «l’unique et authentique invitation sans laquelle aucune délégation ne sera autorisée à participer à la Ticad 8», en précisant que «cette invitation n’est pas destinée à l’entité mentionnée dans la note verbale du 10 août 2022», c’est-à-dire l’entité séparatiste.
Enfin, concernant l’accueil réservé par le chef de l’État tunisien au chef de la milice séparatiste, le communiqué note que la référence de la Tunisie à «l’accueil des invités de la Tunisie sur un pied d’égalité» suscite la plus grande surprise, sachant que ni le gouvernement tunisien ni le peuple tunisien ne reconnaissent l’entité fantoche du Polisario.
Bien entendu, conclut la déclaration du ministère des Affaires étrangères marocain, la décision du Maroc ne remet pas en cause l’attachement du Royaume du Maroc aux intérêts de l’Afrique et à son action au sein de l’Union africaine, ni ne remet en cause l’engagement du Royaume au sein de la TICAD.
Quelle mouche a piqué Saied ?
Le Maroc a donc rappelé son ambassadeur à Tunis et fait savoir que « L’accueil réservé par le chef de l’État tunisien au chef de la milice séparatiste est un acte grave et inédit qui heurte profondément les sentiments du peuple marocain et de ses forces vives». Cela vient confirmer l’hostilité du dirigeant tunisien au Maroc. Jamais depuis Bourguiba, la Tunisie ne s’était départie de sa neutralité et l’on peut se demander quelle mouche a piqué le président tunisien au point de saboter un important sommet.
Coïncidence, (mais en est-ce vraiment une ?) Macron était à Alger pour faire encore acte de repentance quand Saied recevait le chef des mercenaire séparatistes d’Alger. A vrai dire, le régime algérien est muré dans un état d’esprit anti-marocain effréné et se sentant plus fort, grâce à Macron, il en profite pour avancer ses pions. On sait que la petite Tunisie coincée entre l’encombrant voisin algérien et la mer, n’a pas les moyens d’être courageuse, mais cela ne suffit pas à expliquer ce qu’il faut bien considérer comme une lâcheté.
*Directeur général de l’Observatoire d’Etudes géopolitiques