Baisse des taxes sur les produits de santé importés: aubaine pour le secteur ou menace pour l’offre nationale?
La loi de finances PLF 2023 prévoit des taux d’imposition réduits sur les médicaments et les biens médicaux importés. Une décision toujours en cours de finalisation qui vise à baisser les prix des médicaments et produits de santé. Toutefois, elle risque de faire prévaloir l’offre internationale au détriment de l’offre locale impactant ainsi le marché national des dispositifs médicaux en particulier.
Les débats sur la loi de finances de l’Etat PLF 2023 n’ont pas encore commencé au parlement, mais les détails sur les nouveautés commencent à être distillés. Le ministère des Finances n’a pas non plus publié le budget pour l’année à venir, donc seuls le Trésor et les membres du gouvernement connaissent les détails. Mais encore et encore, des détails sont divulgués au public, que ce soit comme une indiscrétion ou comme un ballon d’essai pour tester l’opinion publique. C’est également le cas actuellement avec le thème des « médicaments importés ».
Les médias rapportent que des pourparlers sont toujours en cours entre le ministère de la Santé et le ministère des Finances pour réduire les taxes et droits sur les médicaments importés, ainsi que les dispositifs médicaux. Concrètement, il est prévu d’importer des produits de santé, des dispositifs et matériels médicaux et paramédicaux, selon un communiqué du ministère de la Santé. Une décision qui devrait être annoncée dans le cadre du projet de loi de finances 2023, a indiqué le ministère de la Santé et de la Protection sociale dans un communiqué, ajoutant que cette décision entraînera une baisse des prix des médicaments importés, des produits de santé, des fournitures et matériels médicaux et paramédicaux, ce qui contribuera à les mettre à la disposition des citoyens à des prix raisonnables.
Il convient de rappeler, à cet égard, que le Ministre de l’Eau et de l’Équipements, Nizar Baraka, avait mis l’accent, au début du mois en cours, sur la nécessité de la suppression de la TVA sur les médicaments, soulignant qu’il s’agit bel et bien d’une baisse justifiée.
« Il n’y a aucune raison pour que les patients paient la TVA sur les médicaments. De plus, aucun pays arabe n’a de TVA sur les médicaments. », a-t-il déclaré au cours d’une interview à la radio MFM.
L’AMPDM aspire à réduire les taxes jusqu’à 7%
Le dispositif médical constitue un maillon incontournable de l’environnement de la santé au même titre que le médicament, d’où l’importance et l’intérêt accordés à ce secteur dont le chiffre d’affaire est estimé à quatre milliard de dirhams annuellement.
Ainsi, le développement et la promotion du secteur des dispositifs médicaux en particulier et celui de la santé en général deviennent l’objectif majeur de l’Association Marocaine des Professionnels des Dispositifs Médicaux (AMPDM).
Sollicité par Maroc Diplomatique, Yadini Anouar, président de l’AMPDM, indique, à cet égard, que l’association souhaiterait faire passer le taux de réduction des taxes sur l’importation de vingt à sept pour cent. Et ce, dans l’optique d’assurer l’approvisionnement continu au profit des professionnels de santé du secteur public et privé ainsi qu’une prise en charge sans interruption des patients.
Le taux d’imposition réduit contribuera , par ailleurs, à la solidité financière du Maroc. Mais pas que, il sera bénéfique également pour l’industrie pharmaceutique selon la Fédération marocaine de l’industrie et de l’innovation pharmaceutique (FMIIP).
» Les acquisitions de machines et investissements sont taxés à 20%, et les achats d’intrants sont taxés à 7%…la décision serait une solution beaucoup plus pertinente et idoine pour un meilleur impact sur le prix des médicaments. », a-t-il précisé.
Une offre nationale menacée
Certes, la réduction des taxes sur les médicaments et produits de santé importés permettra au Maroc de s’ouvrir davantage sur les marchés internationaux et de sécuriser le stock stratégique national de biens médicaux.
Signalant que cette mesure s’inscrit dans le cadre de la nouvelle vision du royaume qui oriente son marché « de revente » vers les produits neufs.
De multiples efforts ont été d’ailleurs déployés, dans ce sens, accompagnant ainsi le grand chantier de la généralisation de la protection sociale.
Toutefois, la réduction des taxes risque d’asséner un coup dur aux fabricants locaux dans le mesure où elle pourrait mettre en avant l’offre internationale au détriment du marché nationaux, d’où l’importance de la mise en place d’une série de mesures et actions stratégiques à même de favoriser l’offre marocaine et partant la préférence nationale. Soulignant que le royaume dispose de cinquante mille de gammes de produits médicaux commercialisés, selon l’AMPDM
Yadini précise, dans ce sens, que l’association se fixe comme objectif de protéger la préférence nationale à travers notamment la proposition d’une TVA spéciale, ajoutant qu’elle a approuvé un plan d’action qui vise à renforcer l’écosystème du secteur de la santé, d’accompagner la souveraineté nationale et d’encourager le marché nationale et ce au cours du mandat de la nouvelle assemblée générale.
Il convient tout de même de préciser que la valorisation du marché nationale passe d’abord par des produits de qualité. Ainsi, le royaume devrait miser sur deux composantes incontournables à savoir la qualité et le prix. Autrement dit, les acteurs du secteur devront trouver la formule idoine associant la bonne qualité au prix raisonnable.