A Paris et Marrakech, deux musées célèbrent Yves Saint Laurent
Deux musées consacrés à Yves Saint Laurent ouvrent leurs portes en octobre, l’un à Paris, l’autre à Marrakech, offrant une immersion dans l’intimité de la maison de couture et le processus créatif du couturier français de légende.
« J’ai passé toute ma vie à aider Yves Saint Laurent à construire son oeuvre, et je veux qu’elle dure », disait Pierre Bergé, ancien compagnon de Saint Laurent et cofondateur de la griffe, qui avait porté ce projet avant de mourir, début septembre, à l’âge de 86 ans.
Le musée parisien, qui ouvrira mardi au public, est situé dans l’hôtel particulier du XIXe siècle où Saint Laurent, décédé en 2008, a révolutionné les codes de la mode pendant trois décennies, jusqu’à la fermeture de la maison de couture en 2002.
Un plus vaste musée, également financé par la Fondation Yves Saint Laurent, sera inauguré le 19 octobre à Marrakech, à proximité de la villa Majorelle, propriété du couple Saint Laurent-Bergé.
A Paris, le musée se veut intime. Dans l’atelier à l’étage, restitué quasiment à l’identique, on s’attend presque à voir surgir Saint Laurent: ses lunettes sont posées sur son bureau, sa blouse blanche sur le dossier de la chaise, la gamelle de son chien Moujik au pied de la table.
Dans cet écrin uniquement consacré à la haute couture, les pièces emblématiques du couturier qui a « donné le pouvoir aux femmes » sont en bonne place: le smoking, la saharienne, le jumpsuit, le trench coat, devenues des classiques de la garde-robe féminine.
Chanel « a libéré les femmes. Ce qui m’a permis, des années plus tard, de leur donner le pouvoir et, d’une certaine manière, de libérer la mode », confiait le couturier.
Plusieurs salles abordent les sources d’inspiration de Saint Laurent. Dans la partie « voyages imaginaires », une robe africaine de 1967 se dresse comme un totem, ses seins coniques rappelant ceux des corsets, ultérieurs, de Jean Paul Gaultier.
Une cape couverte de broderies de bougainvilliers évoque le jardin Majorelle à Marrakech, à côté d’un ensemble de la fameuse collection des ballets russes de 1976.
L’oeuvre de Saint Laurent se nourrit de l’histoire de la mode, avec ses robes de vestales de l’Antiquité, ses longues robes de velours médiévales, jusqu’aux silhouettes des années 1940.
Elle dialogue aussi avec l’art, s’inspirant de tableaux de Picasso, Matisse ou Van Gogh, mais surtout avec la fameuse robe Mondrian, créée en 1965, qui donne corps au tableau.
Alors que la mode est de plus en plus présente dans les musées avec des expositions à succès, Yves Saint Laurent avait été le premier couturier à se voir consacrer une rétrospective de son vivant, au Met de New York en 1983.
« Pierre Bergé disait +la mode n’est pas un art, mais il faut un artiste pour la créer+ », rappelle Aurélie Samuel, directrice des collections de la Fondation Pierre Bergé-Yves Saint Laurent qui comptent 35.000 objets, dont plus de 7.000 créations de haute couture. « Je crois que c’est l’histoire qui nous dira si la mode est un art, et quelle mode est un art ».
L’homme d’affaires et mécène est le grand absent de l’inauguration du musée, jeudi, par la ministre française de la Culture Françoise Nyssen.
« Nous sommes profondément tristes qu’il ne soit pas là. Mais il aurait voulu qu’on continue », a déclaré à l’AFP le mari de Pierre Bergé, Madison Cox, désormais président de la fondation.
« Il a suivi tout le projet et il m’a dit environ une semaine avant sa mort qu’il allait mourir totalement apaisé. Je pense qu’il était sincère. Il avait tout mis en place ».