Le monde peut dire merci aux lions de l’Atlas Duel sportif au sommet du monde entre des « potes »
Par Taoufiq Boudchiche, économiste et essayiste
On aura beaucoup dit et écrit sur l’exploit des Lions de l’Atlas. Il y a l’envie de ne pas en rajouter sauf que certains médias pour ne pas les nommer font réagir tout être humain doté de bon sens et d’un minimum d’intelligence. Ces médias qui profitent de cet événement mondial semblent en mal de « buzz » et d’audimat, s’en vont pour un autre tour pour redonner la parole aux prêcheurs de la division, de la haine, du mépris…
Au lieu de s’arrêter sur les exploits sportifs, voilà qu’ils désignent de leurs prouesses faussement intellectuelles, à longueur et largeur de verbiage creux et déjà entendu mille et une fois, l’immigré cet éternel accusé de tous les maux. Y sont commentés à charge les incidents émaillant dans certaines capitales européennes, une fois ciblant les liesses d’après match, une autre fois les débordements des foules en délire…. Et, comme explications, tout y passe. Les origines ethniques, la double nationalité, la double allégeance, l’islamisme, le séparatisme culturel, les politiques laxistes de l’immigration, …
Il est vrai que le football a acquis un statut particulier aussi bien dans ses dimensions sportives, financières, géopolitiques et géo culturelles. La communion des peuples du Sud avec les victoires inattendues de l’équipe marocaine sont perçues comme une revanche sur l’histoire coloniale, sur l’occidentalo-centrisme, sur l’impérialisme, sur la pauvreté … les cris de joie des supporters résonnent dans le tiers-monde en guise de rappel au droit à la fierté et à la dignité bafoué. Des cris du cœur dont les échos dépassent les limites du monde sportif. Ils font réfléchir entre autres sur les mutations mondiales en cours dans lesquelles la multipolarité n’en est qu’une des manifestations.
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Il est reproché par-ci et par là que le drapeau palestinien est hissé dans les stades bondés. Le Maroc est signataire des accords d’Abraham et aussi à travers son Roi et son Peuple, également un fervent supporter de la cause palestinienne. Ces accords aux yeux des marocains n’auront de sens que si au bout du chemin diplomatique entamé courageusement, ils conduisent à une diplomatie de la paix entre palestiniens et israéliens. Le doute est permis mais l’espoir doit l’être aussi après avoir fait bouger « le statut quo » des démagogues de la cause palestinienne bien assis dans leurs zones de confort et douillets canapés. Mais sans résultat en faveur de la paix et d’avancées pour le peuple palestinien, rien n’est irréversible.
Les cris du cœur émanant des peuples du Sud, c’est aussi pour dire stop « au deux poids deux mesures » du traitement international des conflits en cours. Il s’agit de cris du cœur qui méritent d’être entendus pour un monde meilleur. Des cris du cœur pour l’unité et la solidarité au sein du monde arabe. Également solidaire avec l’Afrique meurtrie par un destin douloureux préfabriqué en dehors du continent. L’intelligentsia des pays du Nord et les puissants de ce monde doivent écouter ces cris du cœur car s’y trouve concentrée l’âme actuelle de l’humanité. Son souffle est aujourd’hui footballistique.
Dans ce monde où les tragédies sont nombreuses en Ukraine, au Sahel, en Amérique du Sud, en Iran, en Afghanistan, Syrie, Irak… elles méritent autant l’empathie mondiale. Comme ces manifestants de la liberté en Iran qui encourent la peine de mort quand ils tombent entre les mains du système totalitaire des mollahs. Ce moment de joie footballistique semble comme un mirage miraculeux dans un monde tourmenté.
Pour revenir au match France-Maroc, les deux équipes formées en majorité de doubles nationaux, l’exploit est et sera d’abord sportif. Mais ils auront insufflé, tant de joie aux supporters, que des ponts entre les différents mondes sont érigés et des messages multiples à en tirer. Des mondes au Nord, au Sud, à l’Est, à l’Ouest, qui n’aspirent qu’à un avenir meilleur. Mbappé et Hakimi ne sont-ils pas d’abord des « potes » que leurs origines d’immigrés maghrébins et africains vivant en Europe rapprochent plus qu’elles ne les séparent. Cela n’empêchera pas une belle confrontation sportive. C’est cela la magie du football. Tant pis pour les prêcheurs de la division.
Le monde peut dire Merci aux lions de l’Atlas.