Tunisie : la société civile dénonce l’ »instrumentalisation » de la justice à des fins politiques
Un collectif d’organisations de la société civile en Tunisie a mis en garde contre toute « instrumentalisation de la justice à des fins politiques », appelant à préserver l’indépendance du pouvoir judiciaire dans le pays.
Dans une déclaration conjointe publiée à l’issue d’un colloque international sur « l’indépendance de la magistrature », tenu récemment à Tunis, ces organisations ont plaidé pour le retour des juges révoqués par décret présidentiel en juin 2022 à leurs postes, conformément aux décisions rendues par le Tribunal administratif.
Elles ont également appelé à mettre fin à ce qu’elles qualifient d’ingérence du pouvoir exécutif dans les affaires de la magistrature et au respect du droit à un procès équitable devant des tribunaux indépendants, selon le texte de la déclaration.
Un an après s’être arrogé les pleins pouvoirs le 25 juillet 2021, le président Saïed a publié un décret présidentiel, en juin 2022, révoquant 57 juges de leurs fonctions, sur fond d’accusations présumées de corruption et d’entrave à plusieurs enquêtes.
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Ce décret a été rejeté vivement par les formations politiques et les centrales syndicales au niveau local ainsi que par plusieurs organisations de défense des droits de l’Homme dont « Amnesty International ».
Après examen de données factuelles et juridiques, le tribunal administratif de Tunis avait suspendu, en aout 2022, l’exécution de la décision du président Kaïs Saïed de révoquer un certain nombre de juges.
Début février, la Tunisie a connu une série d’arrestations d’hommes politiques, de figures de l’opposition, d’activistes de la société civile, de responsables de médias et de syndicalistes, suscitant une vague d’indignation de plusieurs ONG de défense des droits de l’Homme.
Ces arrestations, dénoncées au niveau local et international, ont visé des figures politiques de premier plan du FSN et sa principale composante, le parti islamiste Ennahdha, dont le chef de file Rached Ghannouchi a été condamné, récemment, à un an de prison, en vertu de la loi antiterroriste.
Pour Amnesty International, « la condamnation du dirigeant du plus grand parti du pays en raison de déclarations faites il y a un an et relevant du droit à la liberté d’expression est un autre signe des motivations politiques derrière ces poursuites », notant que cette condamnation illustre la politique très inquiétante de répression « de plus en plus sévère » des droits humains et de l’opposition.
La condamnation du chef du mouvement « Ennahda » relève d’une campagne de plus en plus agressive contre le plus grand parti du pays, qui s’inscrit dans le contexte de la répression des personnes dissidentes ou perçues comme critiques au pouvoir, déplore l’ONG.
Avec MAP