Le Maroc face à un dilemme de production de la pastèque
La pastèque rouge est au cœur d’une polémique qui oppose les producteurs, les exportateurs et les défenseurs de l’environnement. La raison de cette problématique la forte consommation d’eau de la plante, qui selon les spécialistes, épuise les sols, alors que le Maroc connaît la pire sécheresse depuis quatre décennies. Désormais les parlementaires se sont emparés de la question.
La pastèque rouge est cultivée au Maroc dans le Souss Massa, à Marrakech, au Loukkos, au Saïs et au Doukkala. Selon le ministère de l’Équipement et de l’Eau, la pastèque est une culture disposant d’une grande valeur ajoutée et d’un rendement élevé pour le secteur agricole. Elle est riche en vitamines, en sels minéraux et en antioxydants.
Elle est également utilisée pour des fins médicinales, notamment pour le nettoyage des reins et des voies urinaires.
La pastèque rouge est aussi un produit d’exportation qui rapporte des devises au pays. Selon le groupe parlementaire du PJD (Parti Justice et Développement), ses exportations ont augmenté de 44 000 tonnes cette année et pose un problème. Le fruit est principalement destiné aux marchés européens, où il bénéficie d’une bonne réputation. Les défenseurs de l’environnement ironisent : le Maroc exporte de l’eau à travers la pastèque.
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La culture de la pastèque rouge présente un inconvénient majeur : elle consomme de grandes quantités d’eau durant deux ou trois mois de l’année. Or, le Maroc fait face à une crise hydrique sans précédent, avec une diminution du taux de pluie, une hausse annuelle de la température et une baisse du niveau des barrages. La situation risque de s’aggraver dans les années à venir, avec des conséquences néfastes sur l’agriculture, l’économie et la sécurité alimentaire.
Une interdiction contestée par les professionnels
Face à ce dilemme, le gouvernement a décidé d’interdire la culture de la pastèque rouge dans les zones souffrant de pénurie et de rareté d’eau. Il s’agit d’une mesure visant à préserver les ressources hydriques et à rationaliser leur utilisation. Le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a assuré que le but n’est pas d’arrêter totalement la production, mais de travailler selon une logique rationnelle et d’une façon permettant d’économiser l’eau. Il a annoncé que le gouvernement lancera un contrat de la nappe phréatique afin de déterminer les quantités d’eau à consommer et d’identifier le genre d’agriculture à développer dans ces zones sur la base d’une approche participative avec les élus et les différents acteurs.
Cette décision a été appuyée par le groupe parlementaire du PJD, qui a adressé une question écrite au ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural, des Eaux et Forêts, lui demandant de prendre les mesures nécessaires pour arrêter la culture des pastèques rouges. Il a également appelé à révéler les mesures qui seront prises pour limiter l’exportation de ce produit afin d’éviter le pire.
De même, l’Union nationale du travail au Maroc a exigé une révision des politiques agricoles, en particulier celles qui épuisent l’eau et sont destinées à l’exportation, comme la pastèque et l’avocat. Elle a souligné la nécessité de soutenir et d’encourager la recherche scientifique visant à rationaliser et à optimiser la gestion des ressources en eau.
Toutefois, cette interdiction n’est pas du goût des professionnels du secteur, qui craignent de perdre leurs revenus et leurs marchés. Ils estiment que la pastèque rouge est une culture adaptée au climat aride du Maroc et qu’elle ne consomme pas plus d’eau que d’autres cultures. Ils demandent au gouvernement de les accompagner dans la transition vers des pratiques plus respectueuses de l’environnement, comme l’irrigation au goutte-à-goutte, la sélection variétale ou la rotation des cultures.
La pastèque rouge est donc au centre d’un débat qui oppose les intérêts économiques et les impératifs écologiques. Le gouvernement devra trouver un équilibre entre les deux, en tenant compte des besoins des agriculteurs, des consommateurs et de la nature.