Marrakech face au défi de la santé mentale

Marrakech, la ville ocre, est confrontée à un problème majeur de santé publique : l’augmentation des maladies mentales. Depuis des années, des centaines de personnes souffrant de troubles psychiatriques errent dans les rues, sans soins ni accompagnement. Leur présence pose des problèmes d’ordre social, sécuritaire et touristique. Malgré les promesses des autorités, le projet Karama, censé accueillir et traiter ces personnes, n’a pas abouti.

Les habitants de Marrakech ne cachent pas leur exaspération face à la situation des malades mentaux dans leur ville. Ces derniers sont souvent victimes ou auteurs de nuisances, d’insultes, de harcèlement ou d’agressions. Ils sont également exposés à la mendicité, à la violence, à l’exploitation sexuelle et aux conditions climatiques extrêmes. Leur aspect négligé et misérable contraste avec le charme et le prestige de la ville, qui attire chaque année des millions de touristes.

Selon une étude du Conseil Economique Social et Environnemental, 48.9% de la population marocaine, âgée de 15 ans et plus, présentent ou ont déjà présenté des signes de troubles mentaux. À Marrakech, l’hôpital psychiatrique universitaire Ibn Nafis est l’un des rares centres de la région qui accueille des patients atteints de pathologies psychiatriques. Dans 80% des cas, la toxicomanie est la principale cause. Toutefois, sa capacité d’accueil ne dépasse pas les 45 lits, alors que le besoin est estimé à 1 lit pour 10.000 habitants.
Les autorités impuissantes face au problème

Face à ce problème, les autorités ont tenté plusieurs fois d’admettre les malades mentaux dans des structures adaptées, mais sans succès. L’hôpital Ibn Nafis souffre d’une pénurie de matériel et de personnel. Il est également accusé de négligence et d’insouciance dans la prestation des soins. De nombreux patients s’évadent ou sont remis à la rue sans aucune forme de surveillance ou de contrôle.

Une grande partie du groupe de malades mentaux errants vient de Bouya Omar, le sanctuaire controversé qui a été évacué par les autorités en 2015. Le projet Karama, lancé en même temps pour accueillir le groupe, a échoué. Les patients hébergés se sont retrouvés à la rue ou ont été arrêtés par les autorités et jetés ailleurs dans le pays, hors de la vue des touristes.

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Le projet Karama était censé être une solution innovante et humaine pour prendre en charge les malades mentaux. Il consistait à créer un centre d’accueil et de réinsertion sociale pour 700 personnes, avec des services médicaux, psychologiques, éducatifs et professionnels. Le projet avait bénéficié du soutien financier du Fonds arabe pour le développement économique et social (FADES) et du Fonds koweïtien pour le développement économique arabe (FKDEA). Cependant, le projet a été abandonné en raison du manque de suivi et de coordination entre les différents acteurs impliqués.

Un appel à l’action

La situation des malades mentaux à Marrakech interpelle la conscience collective et appelle à une action urgente et concertée. Il est nécessaire de renforcer les capacités des structures existantes, d’en créer de nouvelles dans les régions éloignées, de former davantage de personnel spécialisé et de sensibiliser la population sur les causes et les conséquences des troubles mentaux. Il est également indispensable de respecter les droits et la dignité des personnes atteintes de maladies psychiatriques et de leur offrir un accompagnement adapté à leurs besoins.

La santé mentale est un enjeu majeur pour le développement humain et social du Maroc. Elle nécessite une mobilisation de tous les acteurs concernés : les autorités, les professionnels de la santé, les associations, les médias, les familles et les citoyens. Ensemble, il est possible de faire de Marrakech une ville plus accueillante, plus sûre et plus attractive pour tous.

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