Sahel : Influence et déstabilisation d’une région
Par Bachir Abdallah
La région sahélienne traverse une période d’instabilité croissante qui met en exergue les problèmes socio-économiques auxquels sont confrontées les populations du Nord. Cette situation a des répercussions importantes, notamment dans les secteurs de la pharmacie et de l’armement. En effet, les habitants du Nord, qui ont traditionnellement recours au trafic de médicaments et d’armes pour subvenir à leurs besoins, se retrouvent désormais menacés dans leurs moyens de subsistance.
Le commerce de ces produits s’effectue principalement de village en village par le biais de camions, empruntant des pistes souvent difficiles d’accès. Cependant, les récents conflits et l’instabilité politique ont entravé la capacité de ces populations à vivre et à travailler comme elles en avaient l’habitude.
Il est indéniable que vivre du trafic n’est pas une situation idéale. Cependant, lorsque ces populations se retrouvent dépourvues de nourriture et sans perspective d’amélioration de leurs conditions de vie, elles sont poussées à se tourner vers des activités illégales pour survivre. Cette situation est souvent exacerbée par des tensions ethniques et politiques, en particulier entre les populations du Nord et du Sud.
Cette dynamique se manifeste clairement au Mali, où Iyad al-Ghali, issu de la communauté touarègue, est devenu un leader djihadiste. Toutefois, il est important de noter qu’il est également le chef des Touaregs du Nord, qui aspirent à l’indépendance ou à une plus grande autonomie. De manière similaire, Amadou Koufa, qui représente la communauté peule et musulmane, s’est tourné vers le terrorisme après que ses activités de trafic aient été entravées.
Aujourd’hui, les efforts déployés pour résoudre ces problèmes ont été limités et souvent inadéquats. Le manque de promotion de l’autonomie des populations du Nord a engendré un mécontentement généralisé et renforcé les tensions ethniques. Les conséquences sont évidentes : des élections contestées, des renversements de pouvoir et une instabilité persistante.
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Cette situation n’a pas manqué d’avoir un impact sur l’image de la France, perçue comme exerçant une influence déstabilisatrice dans la région. La méconnaissance des réalités socio-économiques et des dynamiques ethniques a nui à la crédibilité de la France en tant qu’acteur régional.
France et Tchad : une relation controversée et ses conséquences
La décision de la France de soutenir immédiatement la candidature du fils du défunt Président tchadien Idriss Déby, a été perçue comme un déni de justice. En effet, l’opposition tchadienne accuse le régime de Déby d’avoir systématiquement éliminé ses opposants pour se maintenir au pouvoir. La nomination du fils Déby, imposée par la France qui fut le seul pays étranger à envoyer son Président Macron aux funérailles, a été perçue par de nombreux Africains comme une ingérence française dans les affaires internes du Tchad.
Cependant, le fils Déby a surpris tout le monde en entamant des discussions avec les principaux leaders de l’opposition, dans l’espoir de trouver une solution consensuelle pour reconstruire le pays. Cette tentative de dialogue est louable, mais la situation reste tendue et volatile. Récemment, le maréchal Haftar est intervenu en Libye pour soutenir le fils Déby en attaquant les opposants basés dans le sud du pays, près de la frontière tchadienne. Cette intervention vise à éviter toute perturbation au Tchad, qui pourrait se propager à d’autres pays de la région.
C’est dans ce contexte que des experts ont soutenu que la France n’a pas brillé dans sa gestion de la crise libyenne, ayant contribué à déstabiliser plusieurs pays de la région, du Mali au Soudan. Par conséquent, la France a perdu en crédibilité dans la région.
Révision de la position de la France et nouvelles stratégies pour l’Afrique
Face à cette redistribution des cartes en Afrique, la France devrait repenser sa position et sa stratégie. Elle devrait tirer parti de la francophonie, non seulement pour les échanges verbaux, mais aussi pour les échanges économiques afin de créer des partenariats économiques mutuellement bénéfiques en investissant dans les industries locales afin de favoriser le développement industriel des pays africains et non se contenter d’exploiter les ressources naturelles de ces pays, mais plutôt de créer de la richesse et des opportunités sur place.
Face à une situation très complexe qui appelle le changement de paradigme, il est évident que le concept de «France-Afrique» tel qu’il existait auparavant est révolu, tout comme la vision universelle imposée par les puissances étrangères.