Par Hassan Alaoui
Innovant et surprenant de nouveau la communauté mondiale et, notamment arabo-islamique, le Roi Mohammed VI a lancé une exceptionnelle opération de secours et de sauvetage en faveur du peuple palestinien en acheminant une aide en tous produits nécessaires par voie terrestre alors que d’autres pays ont choisi le procédé de largage par voie aérienne qui, nous semble-t-il, ne peut pas ne pas nous choquer quelque part avec des images et des scènes humiliantes. Mohammed VI a choisi la voie terrestre, directe et si l’on peut dire plus humaine et ciblée. Cette vision participe du sentiment solidaire et respectueux de la dignité, exprime une solidarité agissante, à toute épreuve du Roi du Maroc et de son peuple à l’égard du peuple palestinien, sans triomphalisme ni trompettes. C’est un tournant qui s’inscrit dans la longue tradition du Maroc à travers l’histoire des trois Rois, Mohammed V, Hassan II et Mohammed VI…
S’il est une date qu’il faut à tout prix retenir et rappeler c’est bel et bien la vive protestation que le Sultan Moulay Youssef a élevé en 1918 pour dénoncer la fameuse Déclaration Balfour, secrétaire d’Etat de Grande Bretagne exprimée le 2 novembre dont voici le contenu contestable : « Le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif ». Le Roi d’Angleterre en l’occurrence était George V qui, bien entendu, donna l’ordre à son ministre sans prendre la mesure de son erreur historique ni se préoccuper des conséquences lointaines d’une telle décision. Il s’inscrivait dans le sillage du sionisme naissant qui se répandait à partir de l’Europe de l’est, avec notamment son promoteur principal, un certain Théodor Herzl, originaire de Budapest ( Hongrie), auteur notamment d’un livre culte, intitulé « L’Etat des Juifs » et « Essai sur le sionisme » publié en 1897.
Lorsque les Nations unies et avec elles une grande partie des Etats qui y avaient adhéré décident alors de créer l’Etat d’Israël avec l’option proclamée solennellement d’établissement en parallèle d’un Etat palestinien, le Maroc décide de mettre en garde l’organisation mondiale sur ce qui semblait constituer les prémisses d’une injustice en vers le peuple palestinien. Le Roi Mohammed V dénonça officiellement le 29 novembre 1947 la résolution inique du partage arbitraire. Il est alors suivi par le peuple marocain dans toutes ses composantes, la question palestinienne devenant ainsi pour ce dernier une question nationale, marocaine pour ainsi dire.
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Sur cette lancée, en effet, feu Hassan II s’inscrira dans une vision de soutien permanent, une action sans relâche, diplomatique notamment, avec une dynamique nouvelle. Les Forces Armées Royales (FAR) seront donc mobilisées et envoyées au Golan et dans le Sinaï pour participer à ce qu’on a appelé alors la 3ème guerre arabo-israélienne, déployant leur vaillance, leur savoir-faire et surtout leur solidarité. La cause palestinienne devenant une cause nationale et populaire, les Rois du Maroc – de Mohammed V à Mohammed VI, en passant par Hassan II – n’ont jamais reculé devant ce défi, appelé « libération de la Palestine ». Le Roi Hassan II avait réuni à Rabat la toute première conférence islamique après l’incendie de la mosquée al-Aqsa , le 9ème Sommet africain qui exprima sa pleine solidarité à la Palestine dans ses résolutions. En 1974, le 7ème Sommet des Etats de la Ligue arabe de Rabat fut quasiment consacré à la question palestinienne avec cette particularité que le Roi Hassan II réussit la prouesse de réconcilier le Roi Hussein des Jordanie et Yasser Arafat, alors brouillés à mort suite aux événements de « Septembre noir » survenus précisément en septembre 1970 en Jordanie, plaçant face à face des activistes palestiniens et les autorités jordaniennes, mettant le Royaume hachémite à feu et à sang. Du Sommet arabe de Rabat de 1974 résulta en effet la Charte arabe de Rabat qui reconnut alors l’OLP ( Organisation de Libération de la Palestine) comme représentant unique du peuple palestinien et Yasser Arafat son seul leader.
La Charte de Rabat recommanda une série de mesures dont la mouture est demeurée jusqu’à nos jours le socle de toute résolution du conflit palestinien : il s’agit d’évacuation de tous les territoires occupés par Israël en juin 1967 et après, notamment al-Qods ( Jérusalem, de la reconnaissance d’un Etat palestinien indépendant, englobant bien sûr Gaza et la Cisjordanie, du rejet de toute paix séparée…L’engagement de feu Hassan II s’est illustré également avec la création du Comité al-Qods qui est à la défense de la cause palestinienne ce que le socle organique est à un édifice…A l’unanimité des Etats de la Ligue arabe , la présidence de ce Comité a été confiée au Roi du Maroc.
Dans ce sillage, est venue se placer la continuité, politique, organique, institutionnelle, historique que le Roi Mohammed VI assume en tant que Président du Comité al-Qods. Et s’il fallait en dire un mot, il est allé encore plus loin que son défunt père, il s’investit dans la problématique autant sinon plus que n’importe quel autre dirigeant arabe. Le Maroc a construit l’aéroport de Gaza, qu’Israël a détruit, bâti l’hôpital de la même ville devenu une ruine, offert des hôpitaux de campagne et pris en charge toute une série d’infrastructures. On le doit à l’engagement concret du Roi Mohammed VI dont l’attachement au peuple de Palestine n’a d’égale que sa fidélité exprimée vaille que vaille, quelles que soient les circonstances, à tout moment à l’égard du peuple palestinien. Ce que ce dernier ne manque pas de reconnaître d’ailleurs.