Auto entreprenariat : Lancé en 2015, le projet peine à convaincre
En 2015, un projet national dédié aux auto-entrepreneurs a été lancé afin de dynamiser l’économie et de créer des opportunités d’emploi pour les citoyens. Neuf ans plus tard, plusieurs acteurs concernés parlent d’un « échec ». Pourtant, lors de son lancement, le projet avait suscité l’enthousiasme de nombreux auto-entrepreneurs, qui y voyaient une lumière au bout du tunnel pour se conformer à la législation. Aujourd’hui, les chiffres sont éloquents : entre 2021 et 2022, les déclarations ont diminué de 34 %.
L’introduction du statut d’auto-entrepreneur au Maroc en 2015, sous la loi n° 114-13, visait à encourager l’entrepreneuriat et à réduire le chômage grâce à des démarches simplifiées et une fiscalité allégée. Cependant, on a observé une baisse significative de 34 % des inscriptions entre 2021 et 2022, passant de 86 023 à 56 699 auto-entrepreneurs. Cette diminution pourrait entraîner des conséquences telles que la réduction de l’innovation, la création d’emplois et un affaiblissement de l’économie nationale, provoquant une perte de confiance et d’incertitude parmi les entrepreneurs potentiels.
Au Maroc, le contexte économique national, caractérisé par une économie de « rente » selon plusieurs acteurs économiques, ne semble pas favoriser l’émergence de petites et moyennes entreprises, ce qui pourrait expliquer en partie cette tendance. De plus, des obstacles tels que la nécessité d’augmenter le chiffre d’affaires et d’élargir le champ d’application pour intégrer davantage d’individus dans le statut d’auto-entrepreneur ont été identifiés. Ces lacunes ont rendu difficile la réussite du projet.
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Cependant, la loi de finances de 2024 a introduit une imposition de 30 % sur le revenu pour les services dépassant 80 000 dhs avec un même client sur un an, ce qui a été perçu comme une sanction collective affectant principalement les auto-entrepreneurs légitimes plutôt que les fraudeurs, se plaignent plusieurs acteurs concernés par la mesure. L’ajout de l’assurance maladie obligatoire (AMO) en 2022 a également imposé de nouvelles charges financières, variant entre 300 et 3 600 dirhams par trimestre selon le chiffre d’affaires, alourdissant le fardeau financier initial. Ainsi, les auto-entrepreneurs se sentent abandonnés et ont à plusieurs reprises interpellé le gouvernement pour des solutions adaptées.
Le projet d’auto-entrepreneurs visait également à résoudre la problématique du chômage au Maroc. Malgré cette initiative et d’autres, le marché du travail au Maroc reste très volatile, avec un taux de chômage élevé, une main-d’œuvre peu qualifiée et une prédominance du secteur informel, ce qui ne semble pas propice à la réussite des auto-entrepreneurs. La formation dans des secteurs peu demandés et la recherche par les grandes entreprises de profils spécialisés dans la technologie et le digital compliquent l’adéquation entre la formation et les besoins du marché. Les domaines de l’information, du digital, des nouvelles technologies et de la robotisation, bien que prometteurs, font face à un environnement concurrentiel difficile.
Une autre difficulté qui a impacté le secteur est la culture entrepreneuriale au Maroc, encore naissante, et la bureaucratie qui représente un frein supplémentaire, rendant les procédures de création et de gestion d’entreprise complexes et décourageantes. Ces facteurs contribuent à la sous-valorisation du statut d’auto-entrepreneur dans l’économie marocaine. Cela représente pour les pouvoirs publics un vaste chantier pour un secteur qui avait, lors de son lancement, suscité beaucoup d’espoirs.