Code de la famille, jusqu’où mèneront les réformes ?
Les défenseurs des droits des femmes placent désormais leurs espoirs dans la nouvelle réforme du Code de la famille. Un travail colossal est focalisé sur la modernisation et l’adaptation du Code aux besoins et valeurs de la société marocaine contemporaine. Soumises dans le cadre du délai de six mois accordé, par le Roi Mohammed VI, les propositions de l’instance chargée de la révision du Code de la famille, présentées au chef du gouvernement Aziz Akhannouch, pourraient remodeler considérablement le paysage juridique et familial du Royaume.
Dans le cadre de sa stratégie participative, l’Instance a organisé pas moins d’une centaine de séances d’audition, incluant différents acteurs concernés, tels que les partis politiques, les syndicats, les associations et les établissements publics, ainsi que toute partie intéressée par l’examen, l’analyse et la discussion du Code de la famille.
La réforme de l’héritage, souvent controversée et source de vifs débats, en particulier de la part des frères hostiles à tout changement, pourrait annoncer une réforme approfondie des lois sur l’héritage. Elle accorderait au détenteur du patrimoine la liberté de choisir entre le testament et l’héritage traditionnel.
Pour contourner le tiers légal sans nécessiter le consentement des héritiers, il est proposé de lever les restrictions sur le testament et d’élargir son champ d’application pour inclure les petits-enfants, indépendamment de leur sexe.
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L’instance recommande également d’exclure la résidence conjugale du domaine de la succession et d’accorder le droit d’usufruit au conjoint survivant. Elle préconise d’étendre les droits des filles en l’absence de frères, où la fille pourrait hériter de la moitié de la succession si elle est fille unique, et des deux tiers si elle a des frères, le reste étant réparti selon les règles de la réversion après que les bénéficiaires aient reçu leur part.
Par ailleurs, l’instance recommande de supprimer la discrimination religieuse comme obstacle à l’héritage, d’élargir le cercle des héritiers pour inclure les parents par alliance en l’absence d’héritiers directs ou de testament, et de criminaliser la privation d’héritage, considérant celle-ci comme une circonstance aggravante en cas de discrimination basée sur le sexe, conformément à plusieurs législations comparatives.
En matière de divorce, l’instance recommande d’éliminer la distinction entre le divorce et la répudiation (talaq), en faveur d’un système de divorce judiciaire unique. Cette proposition vise à simplifier les procédures de divorce et à éliminer les méthodes obsolètes.
Concernant les responsabilités familiales, les recommandations visent à instaurer un partage plus équitable des charges, suggérant que les époux partagent conjointement la responsabilité de subvenir aux besoins de la famille, chacun selon ses moyens, dès la date du contrat et sans condition de logement. Elles proposent également que le conjoint aisé prenne en charge les dépenses familiales en cas de défaillance de l’autre conjoint, sans condition d’avoir des enfants.
Les propositions de l’instance incluent des réformes dans le domaine de la tutelle et des droits parentaux, notamment en reconnaissant la tutelle légale commune des parents, pendant et après le mariage. Elles suggèrent d’accorder à la mère les mêmes pouvoirs que le père en matière de surveillance de la gestion du tuteur légal et de saisine du tribunal en cas de besoin.
Pour le mariage, les recommandations visent à simplifier les procédures de certification, en supprimant la nécessité d’une autorisation judiciaire pour les procédures ordinaires et en permettant aux officiers de l’état civil de certifier le mariage en plus des Adouls. Elles cherchent également à protéger le droit de l’enfant à la filiation, indépendamment de la situation familiale des parents.
Les recommandations visent à moderniser le Code de la famille pour inclure également les étrangers en situation irrégulière, en réglementant la procédure du mariage mixte et du mariage des étrangers, et en garantissant le droit des parties de choisir la loi applicable. Elles recommandent aussi de supprimer la différence de religion parmi les obstacles temporaires au mariage mentionnés dans l’article 39.
Ces recommandations, qui promettent d’apporter plus de modernité et d’équité à la société marocaine, pourraient la mettre en phase avec les normes internationales en termes de droits humains, mais dans quelle mesure ?