Abdellatif Jouahri : L’aide sociale devrait être l’exception, non la norme

Lors de la présentation de son rapport annuel sur la situation économique et sociale au Roi à l’occasion de la fête du Trône, Abdellatif Jouahri, gouverneur de Bank Al-Maghrib, a mis en lumière des enjeux majeurs concernant l’aide sociale, l’emploi et les réformes nécessaires pour l’avenir du Maroc.

Dans son exposé, Jouahri a souligné que l’accès à l’aide sociale de l’État devrait être une exception, plutôt qu’une norme. Il a précisé que le nombre élevé de bénéficiaires représente davantage un défi qu’un succès, mettant en évidence la nécessité d’une révision des politiques sociales actuelles.

Le gouverneur a évoqué une ambition claire : offrir une éducation de qualité à chaque enfant, garantir un emploi décent pour tous les actifs, assurer des services de santé accessibles à tous les citoyens et établir un État protecteur afin d’éviter l’exclusion de tout citoyen. Il a insisté sur le fait que toutes les politiques publiques, notamment les politiques sociales, doivent s’aligner sur cette vision.

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Jouahri a également abordé les répercussions des récentes décisions issues du dialogue social, qui a dominé les débats publics ces derniers mois et pour lequel un effort financier considérable a été engagé. Il a souligné que le dialogue social doit inclure non seulement l’amélioration des conditions de travail, mais aussi la justice sociale et la réduction des disparités pour véritablement contribuer à la construction d’un État social efficace. Le gouverneur a rappelé l’importance de finaliser la réforme des systèmes de retraite, dont l’ajustement est repoussé chaque année malgré les risques croissants pour leur équilibre.

Sur le plan de l’emploi, Jouahri a noté une perte de 157 000 emplois l’année dernière en raison de la crise économique. Le volume d’emploi reste inférieur de 3,5 points de pourcentage par rapport aux niveaux prépandémiques. Le secteur agricole, particulièrement touché par des conditions climatiques défavorables et le stress hydrique, a perdu 202 000 emplois, réduisant sa part dans l’emploi total à 27,8 %, contre 37,8 % en 2008 et 42,3 % en 2000.

Les autres secteurs n’ont pas créé suffisamment d’emplois pour compenser ces pertes. Le secteur des services a généré seulement 15 000 emplois, l’industrie, y compris l’artisanat, en a ajouté 7 000, et le secteur du bâtiment et des travaux publics a créé 19 000 emplois après une quasi-stagnation en 2022. Le manque d’opportunités d’emploi a conduit une partie de la population active à quitter le marché du travail, entraînant une nouvelle baisse du taux d’activité, désormais à 43 %.

Parallèlement, le taux de chômage a augmenté pour atteindre 13 %, son niveau le plus élevé depuis 2001. En zones urbaines, le taux de chômage s’élève à 16,8 %, et parmi les jeunes de 15 à 24 ans, il atteint 48,3 %. De plus, plus d’un quart de cette tranche d’âge ne travaille ni ne poursuit d’études ou de formation. Le gouverneur a également exprimé des inquiétudes quant au risque que les compétences acquises au Maroc soient attirées par les pays développés.

Le rapport de Bank Al-Maghrib souligne ainsi des défis importants pour le Royaume, nécessitant une action concertée pour améliorer les politiques sociales, renforcer les réformes économiques et créer davantage d’opportunités d’emploi. Le gouverneur Jouahri appelle à une approche holistique pour relever ces défis et garantir un avenir plus inclusif et prospère pour tous les citoyens marocains.

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