Fraude sur les biens domaniaux : vers la tolérance zéro ?
Le Maroc se trouve confronté à un fléau insidieux et profondément enraciné : la fraude sur les terres domaniales. Ce phénomène, marqué par des pratiques de corruption, de faux documents et d’abus de pouvoir, menace la stabilité juridique et économique du pays. Cependant, face à cette situation, le gouvernement affiche une détermination sans faille pour combattre ce fléau, appliquant des sanctions exemplaires à l’encontre des fauteurs.
Récemment, la ville de Fès a été le théâtre d’un procès, révélant l’ampleur d’un réseau criminel dédié à l’escroquerie foncière. Un groupe de 38 suspects a été reconnu coupable de pratiques frauduleuses incluant la falsification de documents officiels, le détournement de biens domaniaux et l’utilisation abusive de leurs fonctions publiques. Parmi eux, des figures influentes : un avocat de Meknès, un juge de Sefrou et plusieurs fonctionnaires.
Le procès, très médiatisé, a abouti à des condamnations exemplaires. Le chef de ce réseau a écopé de dix ans de prison ferme, tandis que d’autres membres ont été condamnés à des peines allant de cinq à huit ans. Dix-sept autres individus, ayant bénéficié de la liberté provisoire durant l’instruction, ont été condamnés à un an de prison. Le tribunal a également imposé de lourdes amendes : 800 000 dirhams versés au ministère de l’Intérieur et plus de 59 000 dirhams au fisc.
Le réseau opérait selon des stratégies savamment orchestrées. Selon des rapports préliminaires de la DGSN (Direction Générale de la Sûreté Nationale), les membres du groupe utilisaient de faux actes de propriété, des diplômes falsifiés et des contrats factices pour s’approprier illégalement des terres domaniales ainsi que des biens appartenant à des particuliers. Ces activités illicites étaient étendues à plusieurs villes, notamment Imouzzer Kandar, Azrou et Beni Mellal.
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Des perquisitions effectuées dans des domiciles liés au réseau ont permis de saisir une quantité importante de preuves matérielles, allant des documents frauduleux à des sommes d’argent importantes. Il a été également révélé que des témoins étaient rémunérés pour fournir de fausses déclarations et que certains fonctionnaires facilitaient les procédures administratives en échange de pots-de-vin.
Cette affaire va au-delà de la simple fraude foncière. Elle met en évidence un problème systémique qui affecte la confiance des citoyens dans les institutions publiques et freine le développement économique. Le réseau démantelé ne s’est pas limité à l’appropriation de terres publiques et privées. Il a également escroqué des migrants en leur promettant des opportunités de travail ou des visas à l’étranger, contre le versement de sommes importantes. Ces pratiques frauduleuses ont non seulement dépossédé des particuliers de leurs biens, mais ont aussi aggravé la précarité de nombreux citoyens.
Une réponse gouvernementale ferme et déterminée
Face à cette situation, le gouvernement a réaffirmé son engagement à lutter contre la corruption et les abus. Des mesures strictes ont été mises en place pour renforcer le contrôle administratif et judiciaire sur les transactions foncières. Le ministre de l’Intérieur a également annoncé la création d’unités spécialisées dans la vérification des documents fonciers et la mise en place d’un système numérique national pour centraliser les informations relatives aux propriétés et transactions immobilières.
Ce procès symbolique est un signal fort adressé à tous ceux qui envisageraient de se livrer à de telles pratiques. Il témoigne de la volonté des autorités de rétablir la justice et de préserver le patrimoine foncier du pays contre les malversations.
Au-delà des sanctions, l’enjeu est également de provoquer un changement profond dans les mentalités. La lutte contre la fraude foncière n’est pas seulement une affaire de lois et de sanctions, mais aussi une question de responsabilité collective. Les citoyens, les entreprises et les institutions doivent collaborer pour renforcer la transparence et promouvoir une culture de l’intégrité.