( Vidéo) Mali-Algérie : la colère gronde à Bamako
À Bamako, la situation devient électrique. Devant l’ambassade d’Algérie, une foule dense scande des slogans enflammant les tensions diplomatiques entre les deux voisins. Les manifestants brandissent des pancartes aux messages explicites : « Algérie = Terroriste », « Halte à l’ingérence de l’Algérie dans la crise malienne », « L’Algérie complice des terroristes »….
Ce mouvement de protestation illustre un malaise profond qui ne cesse de croître entre le Mali et l’Algérie, deux nations liées par une géographie partagée mais divisées par des visions divergentes sur la gestion de la crise malienne.
Les manifestants à Bamako ne mâchent pas leurs mots : pour eux, l’Algérie serait complice des troubles qui déstabilisent le Mali. En refusant de requalifier les groupes armés de l’Azawad comme des organisations terroristes, Alger est accusée de jouer un double jeu. Cette perception nourrit un sentiment de défiance croissante envers son voisin du nord, autrefois perçu comme un médiateur impartial mais désormais vu comme un acteur biaisé.
La tension est telle que certains observateurs craignent une escalade diplomatique. « La relation entre le Mali et l’Algérie est à un point de rupture », confie un analyste politique basé à Bamako. « Alger doit comprendre que sa stratégie de soutien aux anciens signataires de l’accord d’Alger est perçue comme une provocation, surtout dans un contexte où Bamako cherche à reprendre le contrôle total de son territoire ». La colère de Bamako s’est intensifiée après les déclarations d’Ahmed Attaf, ministre algérien des Affaires étrangères, lors d’une conférence de presse tenue le 30 décembre 2024 à Alger. Cet événement, censé dresser un bilan de l’action diplomatique algérienne pour l’année écoulée, s’est transformé en un catalyseur de tensions.
« Il n’y a pas de solution militaire. Ce n’est pas une solution », a affirmé le diplomate algérien, s’exprimant sur la situation sécuritaire dans le nord du Mali, région frontalière avec l’Algérie. Cette prise de position, rapportée par Le Matin d’Algérie, a résonné comme une provocation à Bamako. Ahmed Attaf a en outre déclaré qu’Alger s’opposait catégoriquement à ce que « des mouvements politiques ayant participé à l’accord d’Alger soient qualifiés en une nuit comme étant des organisations terroristes ».
En clair, l’Algérie refuse de considérer comme « terroristes » les groupes armés maliens ayant signé l’Accord d’Alger en 2015, notamment le Front de libération de l’Azawad (FLA). Pour Ahmed Attaf, ces organisations doivent rester des partenaires incontournables dans toute tentative de résolution politique, une position qui irrite profondément les autorités maliennes.
L’Accord d’Alger, négocié sous l’égide de l’Algérie en 2015, avait pour objectif de ramener la paix dans le nord du Mali en offrant un cadre politique au conflit opposant l’État malien à la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA). Cependant, près de dix ans après sa signature, cet accord est de plus en plus contesté.
À Bamako, le discours officiel est clair : les groupes armés ayant signé cet accord n’ont pas respecté leurs engagements. Pire, selon certains responsables maliens, ces organisations entretiendraient des liens ambigus avec des réseaux terroristes actifs dans la région sahélienne. La position d’Alger, qui continue de soutenir un dialogue avec ces mouvements, est donc perçue comme une ingérence inacceptable par les autorités maliennes.