Shipping Act 2022 : Les effets directs sur le secteur maritime marocain
Les États-Unis ont octroyé à certaines compagnies un monopole sur des routes maritimes spécifiques, affectant les ports marocains, notamment Tanger Med. Cette décision a permis une réduction des coûts du transport mais soulève des questions concernant la capacité du port à gérer cette croissance. Dans ce sens, des projets d’expansion sont en cours.
Dans le cadre d’une nouvelle initiative stratégique, les États-Unis ont récemment accordé à certaines entreprises internationales un monopole sur des routes maritimes spécifiques, sous la condition que leurs navires fassent escale dans certains ports, y compris ceux du Maroc. Cette décision, qui a été largement discutée, a rapidement suscité des interrogations parmi les professionnels et les opérateurs du secteur maritime concernant ses répercussions pour le Royaume. Si cette initiative vise à répondre à des enjeux logistiques mondiaux, elle pourrait avoir des conséquences directes sur les ports marocains, en particulier sur la plateforme stratégique de Tanger Med.
Pour mieux comprendre cette situation, il convient de revenir à la période qui a suivi la pandémie de Covid-19, une période où le transport maritime a subi de nombreux bouleversements. Face à une forte hausse des tarifs maritimes, les États-Unis ont mis en place la Shipping Act 2022, une législation visant à encadrer plus strictement les pratiques des armateurs et à réguler le secteur.
Cette législation a pour but de garantir que les pratiques des transporteurs maritimes ne nuisent pas au commerce extérieur américain et d’empêcher les abus tarifaires. Les experts expliquent que « cette législation renforce les pouvoirs de la Federal Maritime Commission (FMC), qui peut désormais exiger des documents concernant des transactions effectuées en dehors des États-Unis ». Il s’agit donc d’une mesure qui cherche à établir une tarification plus juste et équitable à l’échelle mondiale, tout en permettant aux États-Unis de mieux contrôler leur commerce extérieur.
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Dans ce cadre, l’accord entre les membres de l’Alliance Hapag-Lloyd/Maersk a des implications directes pour le Maroc. Selon les médias, cette alliance de transport maritime est l’une des plus puissantes au monde, et son influence sur les lignes commerciales entre l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord est considérable. En ce sens, l’inclusion des ports marocains, comme Tanger Med, dans cet accord présente des avantages mais aussi des défis pour le Royaume. Le Maroc bénéficie de cette situation de plusieurs manières. Tout d’abord, grâce à l’accord, les coûts du transport maritime ont considérablement diminué. Par exemple, le prix d’un conteneur de 40 pieds entre la Chine et le Maroc est passé de 25 000 dollars en avril 2021 à seulement 4 000 dollars aujourd’hui. Cette baisse des tarifs est une aubaine pour les importateurs et exportateurs marocains, qui bénéficient désormais de conditions de transport plus compétitives.
De plus, la présence de la FMC, qui régule ces accords, offre au Maroc un filet de sécurité supplémentaire. En cas de blocage dans le transport des conteneurs marocains vers les États-Unis, ou inversement, la FMC peut intervenir pour résoudre les conflits et assurer une meilleure fluidité dans le transport des marchandises.
Tanger Med : Une expansion nécessaire pour soutenir la croissance du transport maritime
Cette mesure est particulièrement avantageuse pour les exportateurs marocains de produits périssables, tels que les agrumes et les primeurs, qui nécessitent un transport rapide et sécurisé. En réduisant les risques de perturbation, cet accord renforce la compétitivité des exportations marocaines tout en offrant aux importateurs un service plus fiable.
Cet accord bénéficie également aux infrastructures portuaires marocaines, notamment au port de Tanger Med, qui a connu une croissance impressionnante ces dernières années. En 2024, ce port a franchi un nouveau seuil, traitant plus de 10 millions de conteneurs, consolidant ainsi sa position comme une plateforme stratégique dans le bassin méditerranéen. Cette performance est d’autant plus notable que Tanger Med se classe désormais parmi les principaux ports d’Afrique et du monde en termes de volume de conteneurs traités. Cependant, cette forte demande soulève également des préoccupations concernant la capacité du port à répondre à cette croissance continue. Selon un expert, « il reste 800 mètres de quais à aménager d’ici 2025, ce qui permettrait d’atteindre une capacité de 12 millions d’équivalent vingt pieds (EVP) ». Toutefois, une saturation pourrait survenir dès 2027 si l’expansion n’est pas rapidement mise en place.
Les perspectives d’extension du port de Tanger Med sont donc déjà à l’étude. D’ici 2028, l’expert recommande une expansion rapide, notamment par la construction d’un dernier terminal dans le cadre du projet Tanger Med Saison 3. Deux sites sont envisagés pour cette expansion : à l’Est, près de Fnideq et Tétouan, et à l’Ouest, entre Malabata et Fardioua, où les conditions naturelles sont favorables. Cependant, cette expansion pourrait nécessiter des aménagements supplémentaires à Tanger Ville.
Selon l’expert, à plus long terme, il devient impératif de planifier l’avenir du secteur portuaire marocain. L’une des propositions les plus ambitieuses est d’élargir les fonctions de la TMSA (Administration portuaire) en la transformant en armateur, ce qui permettrait à la TMSA de s’impliquer directement dans la gestion des lignes maritimes à l’échelle internationale. Cette stratégie pourrait garantir non seulement l’expansion continue des ports marocains, mais aussi la diversification des activités portuaires à un niveau global. Par ailleurs, cette évolution offrirait une opportunité de renouveler les concessions du port, dont l’expiration est prévue pour 2035.