Protection des enfants sur les réseaux sociaux : le CESE plaide pour des mesures plus strictes

Avec la montée de l’utilisation des réseaux sociaux, les enfants se trouvent exposés à des risques numériques, comme le cyberharcèlement, la diffusion de contenus inappropriés et l’exploitation en ligne. Face à cette problématique croissante, le Conseil économique, social et environnemental appelle à une révision des politiques publiques, un renforcement du cadre juridique et une coopération plus forte entre acteurs privés et publics pour protéger les jeunes utilisateurs.

Avec l’essor de l’accès à Internet au Maroc, les enfants sont de plus en plus exposés aux dangers en ligne. Selon une étude menée par l’Agence nationale de régulation des télécommunications, le taux d’accès des ménages à Internet est passé de 25 % en 2010 à 92,8 % en 2023. Cette évolution rapide de la connectivité numérique a permis une plus grande accessibilité à des ressources éducatives et à des moyens de communication, mais elle a aussi entraîné une exposition accrue aux risques du cyberespace, notamment pour les jeunes générations.

La société marocaine, comme beaucoup d’autres à travers le monde, fait face à des enjeux de sécurité numérique, particulièrement en ce qui concerne l’utilisation des réseaux sociaux par les enfants. Une étude menée par Kaspersky en 2022 a révélé que 87 % des parents interrogés ont un enfant ayant accès à un téléphone avec une connexion Internet, et parmi eux, 66 % possèdent un smartphone personnel. Cependant, malgré cette forte pénétration des technologies numériques dans les foyers, 60 % des parents avouent ne pas avoir confiance en leurs enfants pour un usage responsable du numérique. De plus, 88 % des parents ont reconnu ne jamais avoir utilisé d’applications de contrôle parental, ce qui révèle un manque de sensibilisation aux dangers et aux outils disponibles pour protéger les jeunes en ligne.

Cette situation est préoccupante car les enfants sont particulièrement vulnérables aux dangers du cyberespace. Parmi les risques les plus fréquents figurent le cyberharcèlement, l’exploitation sexuelle en ligne et le vol de données personnelles. Selon une étude de Childnet International, 22 % des enfants âgés de 11 à 16 ans ont été victimes de cyberintimidation sur les plateformes de réseaux sociaux. Cette forme de violence numérique peut avoir des conséquences dramatiques sur la santé mentale et émotionnelle des jeunes, voire conduire à des situations tragiques de dépression ou de suicide. En outre, une étude réalisée en 2021 par le Centre marocain de recherches polytechniques et d’innovation (CMRPI) a révélé que 31 % des enfants et jeunes interrogés ont été confrontés à des comportements à risque en ligne, notamment la réception de messages de haine et de contenus inappropriés.

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Le CESE insiste sur l’urgence de renforcer la protection des enfants dans le monde numérique

Face à ces risques de plus en plus présents, le CESE a organisé une rencontre, le 30 janvier 2025, pour présenter ses recommandations visant à mieux protéger les enfants sur les réseaux sociaux. Lors de cette rencontre, Ahmed Reda Chami, président du CESE, a souligné que, tout en offrant des opportunités considérables pour l’apprentissage, la créativité et les échanges sociaux, le monde numérique représente également un environnement dangereux pour les jeunes s’il est mal maîtrisé. Il a averti que l’utilisation excessive ou inappropriée des technologies pouvait nuire à la santé mentale et physique des enfants. À ce titre, il a plaidé pour une intégration renforcée de la protection des enfants sur Internet dans les politiques publiques, en particulier dans le cadre de la politique publique intégrée de protection de l’enfance (PIPE).

Jawad Chaïb, membre du CESE, a également insisté sur la nécessité d’une coopération renforcée entre les acteurs publics et privés pour garantir la sécurité des enfants en ligne. Selon lui, la responsabilité principale incombe aux parents et éducateurs, mais l’État doit jouer un rôle central en établissant un cadre juridique et des politiques de protection adaptés aux nouvelles réalités du numérique. Il a ajouté que l’implication de tous les acteurs concernés, y compris les entreprises technologiques et les opérateurs de télécommunications, est essentielle pour une approche cohérente et efficace de la sécurité numérique des enfants.

L’avis du CESE souligne plusieurs lacunes dans le cadre juridique actuel. Bien que le Maroc dispose déjà d’un cadre législatif spécifique et ait ratifié la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, les mécanismes existants sont jugés insuffisants pour répondre aux défis posés par les nouvelles technologies numériques. En particulier, la réglementation des plateformes sociales et la responsabilité des entreprises technologiques doivent être renforcées. Le Conseil recommande donc d’adapter le cadre juridique national aux normes internationales, notamment en clarifiant les responsabilités des entreprises technologiques et des opérateurs de télécommunications vis-à-vis de la protection des mineurs.

Parmi les recommandations clés du CESE, on retrouve la définition d’un âge de maturité numérique permettant un accès sécurisé aux réseaux sociaux, ainsi que l’imposition de restrictions aux plateformes pour empêcher l’inscription des mineurs sans le consentement parental. Le CESE propose également d’utiliser l’intelligence artificielle pour détecter de manière proactive les contenus inappropriés et garantir une surveillance personnalisée des enfants en ligne. L’intelligence artificielle pourrait ainsi analyser les comportements en ligne et avertir les parents en cas de risques imminents.

Le Conseil appelle également à l’intégration de l’éducation numérique dès le plus jeune âge dans les programmes scolaires, afin de développer l’esprit critique des enfants et de les sensibiliser aux dangers des réseaux sociaux. Cette éducation devrait comprendre la gestion de la vie privée en ligne, la reconnaissance des contenus inappropriés, et la compréhension des implications des comportements numériques.

Enfin, le CESE recommande de renforcer les campagnes de sensibilisation destinées aux parents, ainsi que de promouvoir l’adoption de mécanismes de contrôle parental plus stricts, pour aider les parents à protéger leurs enfants tout en leur permettant de bénéficier des bienfaits du numérique de manière sûre et responsable.

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