Le secteur du BTP reprend des couleurs, porté par de grands chantiers d’envergure

Après une longue période de léthargie, le secteur marocain du BTP affiche depuis 2023 une reprise vigoureuse, selon la dernière note sectorielle de BMCE Capital Global Research. Divers facteurs, tant structurels que conjoncturels, expliquent cet élan renouvelé, en particulier la co-organisation de la Coupe du monde 2030 et l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations 2025, qui stimulent de larges investissements dans les infrastructures sportives, logistiques et touristiques. Analyse.

BMCE Capital Global Research (BKGR) souligne que la période 2023-2028 devrait être marquée par la construction, la rénovation et la mise à niveau de neuf stades capables d’accueillir de 60 000 à 115 000 supporters, pour un montant global d’environ 20 milliards de dirhams. Dans la même dynamique, le pays prévoit la construction de nouvelles autoroutes, la rénovation de tronçons existants ainsi que l’agrandissement et la modernisation de plusieurs aéroports, afin d’absorber l’afflux massif de visiteurs attendu.

Rien qu’en 2025, le Maroc compte injecter 4,1 milliards de dirhams dans la modernisation du réseau autoroutier, à travers la construction des autoroutes Tit Mellil-Berrechid et Rabat-Casablanca Continentale, ainsi que l’aménagement des nœuds routiers de Sidi Maarouf et Aïn Harrouda. En parallèle, 600 millions de dirhams seront consacrés à la maintenance du réseau autoroutier national. À l’horizon 2030, les investissements devraient se multiplier, avec notamment la programmation de nouvelles autoroutes reliant les villes stratégiques telles que Fès et Marrakech, sans oublier la liaison Tanger-Tétouan.

Selon BKGR, la Société Nationale des Autoroutes du Maroc (ADM) envisage d’allouer pas moins de 7,7 milliards de dirhams sur la période 2025-2027, afin d’étendre le réseau autoroutier national à 3 000 km, contre 1 800 km actuellement.

L’emploi porté par le tourisme et l’hôtellerie

Pour BKGR, le dynamisme attendu dans les infrastructures sportives et de transport va de pair avec une hausse significative du taux d’occupation hôtelier. Ainsi, 40 000 nouvelles chambres devraient voir le jour, portant le total à 330 000 unités. Ce déploiement est susceptible d’engendrer des recettes additionnelles de 20 milliards de dirhams et de créer 250 000 emplois temporaires durant les chantiers et 100 000 emplois permanents dans les activités connexes (hôtellerie, tourisme, transports).

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Afin de soutenir ce secteur en plein essor, le gouvernement entend poursuivre l’extension de ses principaux aéroports, pour un investissement global estimé à 42 milliards de dirhams d’ici 2030. Les travaux concerneront la construction de nouveaux terminaux et la rénovation des infrastructures existantes, notamment à Casablanca, Rabat-Salé, Marrakech, Tanger, Agadir et Tétouan. Parallèlement, l’ONCF prévoit d’étendre son réseau à grande vitesse en construisant 1 300 km de nouvelles lignes TGV et 3 800 km de lignes ferroviaires classiques à l’horizon 2040, afin de desservir 43 villes, 12 ports et 15 aéroports internationaux.

Entre 2025 et 2027, l’ONCF prévoit ainsi de mobiliser 9,8 milliards de dirhams, répartis de la manière suivante : 3 milliards en 2025, 3,6 milliards en 2026 et 3,2 milliards en 2027. Ces sommes serviront notamment à l’acquisition de nouveau matériel roulant, à la construction d’ateliers d’entretien et à la maintenance des infrastructures. En outre, en lien avec la préparation de la Coupe du monde 2030, 87 milliards de dirhams supplémentaires pourraient être investis pour l’extension de la ligne à grande vitesse (LGV) vers Kénitra et Marrakech, ainsi que pour le développement d’un réseau de type RER à Casablanca, Rabat et Marrakech.

Le PNAEPI comme opportunité pour le BTP

En parallèle des grands événements sportifs, le Programme National d’Approvisionnement en Eau Potable et d’Irrigation (PNAEPI) 2020-2027 représente, selon BKGR, une autre opportunité de taille pour le secteur du BTP. Face à une crise hydrique exacerbée par les sécheresses successives, le Maroc a lancé ce vaste chantier pour sécuriser ses ressources en eau. Il comprend la construction de 20 nouveaux barrages, la mise en place d’« autoroutes de l’eau », l’extension des systèmes d’irrigation et le développement de stations de dessalement.
Les acteurs du bâtiment et des travaux publics devraient être fortement sollicités pour la réalisation de ces infrastructures, en particulier les entreprises spécialisées dans la construction de barrages, la pose de canalisations et la production de matériaux (ciment, béton, acier, etc.).

La relance du marché immobilier est également l’un des piliers de la dynamique actuelle, d’après BMCE Capital Global Research (BKGR). L’entrée en vigueur d’un programme d’aides directes au logement en 2024 stimule la demande de biens immobiliers. Cette initiative gouvernementale prévoit l’octroi de subventions de 100 000 dirhams pour les logements économiques (plafonnés à 300 000 dirhams) et de 70 000 dirhams pour les logements intermédiaires (prix limité à 700 000 dirhams). Doté d’une enveloppe annuelle de 9,5 milliards de dirhams sur la période 2024-2028, ce dispositif vise à soutenir 100 000 ménages par an.

En parallèle, la relance du programme « Villes sans bidonvilles » participe à la résorption de l’habitat insalubre. L’objectif est de reloger 120 000 ménages à l’échelle du Royaume, dont 62 000 dans la région de Casablanca-Settat. À titre d’illustration, 1 893 unités ont été attribuées à ADDOHA et 6 801 à RDS pour un projet pilote dans la province de Médiouna.

Sur le plan opérationnel, le nombre de mises en chantier est passé de 201 000 unités en 2022 à 315 000 en 2023, poursuivant sa progression au premier semestre 2024 avec 176 000 unités lancées, contre 133 000 un an auparavant. La production, quant à elle, a crû de +3,6 % en 2023, atteignant 258 000 unités, puis de +10,8 % sur la première moitié de 2024 pour se fixer à 114 000 unités. Par ailleurs, la Loi de Finances 2025 réserve un budget de 5,7 milliards de dirhams au Fonds solidarité dédié au logement et à l’intégration urbaine, dont 2,6 milliards de dirhams affectés au relogement des habitants des bidonvilles de la région Casablanca-Settat.

L’essor du BTP se reflète également dans les chiffres des ventes de ciment, qui ont progressé de +9,5 % en 2024 pour atteindre 13,7 millions de tonnes (MT), selon BKGR. Tous les segments – « Infrastructures », « BPE », « Préfa », « Distribution » et « Mortiers » – ont enregistré des hausses notables, allant de +4,6 % à +123,6 %, à l’exception du secteur « Bâtiment », en léger recul de -1,6 %. En revanche, les exportations de ciment (notamment de clinker) ont chuté de -43,4 %, pour s’établir à 1,2 MT fin 2024.

L’année 2025 commence toutefois sur les chapeaux de roue, avec un bond de +13,8 % des ventes de ciment en janvier (1,3 MT), renforçant les prévisions optimistes pour la période 2025-2030.

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