Croissance économique et précarité : Les disparités sociales selon le HCP

Bien que la croissance économique ait principalement favorisé les catégories les plus aisées, les ménages les plus défavorisés ont vu leurs conditions de vie s’améliorer grâce aux nouvelles aides sociales. En revanche, la classe moyenne, de plus en plus exposée à la précarité, n’a bénéficié ni de la croissance ni des mesures de redistribution. C’est ce qu’indique une récente étude du Haut-Commissariat au Plan (HCP) sur le niveau de vie des ménages pour la période 2022-2023, reprise par le magazine Challenge.
Bien que le niveau de vie des ménages ait progressé, les inégalités sociales sont restées élevées. Les mécanismes de protection sociale ont eu un effet positif en réduisant la pauvreté parmi les personnes les plus vulnérables. Cependant, ceux qui ne bénéficient pas directement de ces aides ont vu leur situation se détériorer, ce qui a aggravé leur précarité.
Entre 2014 et 2019, les plus défavorisés ont vu leur niveau de vie augmenter de 1,1 % par an, avant de chuter de 4,6 % entre 2020 et 2022. Les plus riches, quant à eux, ont connu une hausse annuelle de 1,4 % entre 2014 et 2019, suivie d’une baisse de 1,7 % entre 2020 et 2022. La classe moyenne, elle, a connu une augmentation modeste (+0,8 % entre 2014 et 2019) avant d’enregistrer un recul marqué (-4,3 % entre 2020 et 2022). Selon le HCP, cette classe sociale a été la plus affectée, n’ayant tiré aucun bénéfice de la croissance ni des mécanismes de redistribution.
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En parallèle, la réforme fiscale engagée ces dernières années a surtout avantagé les moyennes et grandes entreprises, avec une réduction du taux de l’impôt sur les sociétés (IS) de 31 % à 20 % en trois ans. En revanche, la baisse du taux marginal de l’impôt sur le revenu (IR) n’a été que de 1 %, passant de 38 % à 37 %. La classe moyenne, majoritairement composée de professions libérales et de salariés, notamment dans le secteur public, joue pourtant un rôle clé dans la consommation et la croissance économique.
L’indice de Gini, qui mesure les inégalités économiques, est passé de 39,5 % en 2014 à 40,5 % en 2022, ce qui confirme une aggravation des disparités sociales. Bien que le taux de pauvreté absolue ait diminué, passant de 4,8 % à 3,9 % en 2022, il a augmenté en milieu urbain, passant de 1,6 % à 2,2 %. Au total, 1,42 million de personnes vivaient en situation de pauvreté absolue en 2022, tandis que 4,75 millions étaient économiquement vulnérables, avec un risque plus élevé de basculer dans la pauvreté (augmentation de 7,9 % à 9,5 % de la population).
En 2022, le revenu annuel moyen des ménages était de 89 170 dirhams. Cependant, 70 % des ménages touchaient moins que cette moyenne, avec une grande disparité entre les zones urbaines (65,9 %) et rurales (85,4 %).
Du côté de la consommation, la dépense annuelle moyenne a progressé de 3,1 % par an entre 2014 et 2019, avant de diminuer de 3,1 % entre 2019 et 2022. L’analyse des budgets des ménages montre que les dépenses alimentaires ont augmenté, passant de 37 % en 2014 à 38,2 % en 2022. Les coûts liés au logement et à l’énergie ont également augmenté de 2,4 %, tandis que les dépenses pour les loisirs et la culture ont fortement diminué, passant de 1,9 % à seulement 0,5 %.