Parc de jeu de Gauthier et procès en sorcellerie islamiste
Par Houcine Aït Marghad
L’affaire du parc d’enfants, connu sous le nom Chaouiya, rue Moussa Ibnou Noussair à Casablanca, n’a pas fini de faire couler de l’encre et d’aiguiser la polémique. Elle prend une dimension plus que symbolique, dès lors que, en arrière plan, viennent s’y greffer des éléments idéologiques voire religieux.
Un site arabisant largement suivi par l’opinion publique et les internautes, n’a pas hésité à intituler son dernier article ainsi : « Le lobbie des alcools gagne le jardin et bloque la construction d’une mosquée à Casablanca » !
Puisqu’il s’agit du site populaire Hespress, on peut en effet regretter la publication pour illustrer l’article en question d’une photo qui n’a rien à voir avec le site de Gauthier , qui au mieux sème la confusion, au pire nous interpelle pour sa finalité ! Il s’agit d’une photo d’un grand parc choisie au hasard ou délibérément pour tromper le public.
Voilà qui nous instruit sur la manière de présenter les choses chez les « lobbyistes » du projet d’une mosquée au cœur de la rue Ibnou Noussair. C’est un argument spécieux que celui de traiter les défenseurs du parc, de l’environnement, de l’espace vert et surtout du bien-être des enfants, de « lobby de l’alcool » ! Comme s’il n’y avait pas de familles, qu’il n’existait pas d’enfants dépourvus de verdure et une population écrasée depuis toujours par une pollution chaque jour plus étouffante avec ses bruits de voitures, ses tuyaux d’échappement fumants, une circulation stridente digne d’un Far-West, leurs conséquences ensuite sur la santé des habitants, et que le seul espace vert, un petit poumon encore préservé, est justement ce jardin minuscule de quelques centaines de mètres carrés.
Comme si dans ce quartier encadré par les quatre plus grands boulevards de Casablanca – Zerktouni, Roudani, Anfa et Moulay Youssef -, il n’existait pas d’autre espace pour bâtir une mosquée , que ce petit carré avec sa petite dizaine d’arbres, alors qu’à une centaine de mètres dans le parc de Casablanca, il existe un vaste espace libre capable d’abriter et la mosquée pour accueillir des centaines de fidèles et un projet commercial qui l’accompagne habituellement voire d’autres infrastructures.
Les yeux rivés sur le petit espace Chaouiya, les lobbyistes de la mosquée ont tout simplement oublié qu’une autorisation dûment arrachée, a été accordée en 2016 par le président de la Commune aux promoteurs du parc de jeu pour enfants. Lesquels appartiennent dans leur grande majorité à l’Association Gauthier Mémoire et Perspectives , constituée en 2014 et regroupant les habitants du quartier Gauthier. Autrement dit bien avant que les lobbyistes de la mosquée ne créent la leur du nom Gauthier Jiwar ! Une appellation dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle emprunte à la rédhibitoire confusion et, en tout état de cause, ne reflète aucune réalité sémantique. Leur démarche interpelle les habitants du quartier, parce que ceux qui s’opposent à la réhabilitation du petit jardin au profit des enfants, expriment envers ces derniers un mépris plus que grave. Ensuite, ils ont beau jeu d’instrumentaliser la religion et l’Islam pour jeter le trouble et la confusion chez la communauté d’habitants du quartier, désignant presque du doigt les « autres », quasiment traités d’infidèles et de mécréants, comme le laisse suggérer explicitement le titre de l’article publié par Hespress…
Il y a dans ce comportement exclusionniste comme la volonté de culpabiliser les défenseurs du parc pour les enfants. Une tentation affichée de les présenter comme les agresseurs de l’Islam, ceux qui s’opposent à la construction de la mosquée et lui préfèrent un parc de jeu ! C’est d’autant plus faux que les partisans du maintien du parc de jeu sont aussi musulmans que les autres, sinon plus, quand bien même leurs apparences – la barbe, l’accoutrement à l’Afghane et autres signes distinctifs – ne le laisseraient pas voir.
En fait, aucun ne peut prétendre avoir le monopole de l’Islam, la foi étant une relation intime entre Dieu et chaque croyant et individu. Entre un parc pour enfants et une mosquée, les Musulmans authentiques opteraient à coup sûr pour le jardin et pour la survie des enfants…
Il convient de signaler que le procédé consistant à traiter les habitants du quartier Gauthier et principalement les militants du maintien du parc de « lobbyistes des alcools », et donc de débauchés est somme toute une condamnation fallacieuse et grave ! Elle relève du procès d’intention. Elle procède de cette manie, répandue désormais, que tout ce qui ne passe pas ou qui dérange chez les islamistes relève du parjure. Cela nous rappelle ces procédures de takfir, ni plus ni moins…propre au salafistes. Ils sont légion, tentés de dire le bien et le mal, de décider du sort des uns et des autres, nous rappelant en fin de compte que l’idéologie wahhabite qui a ruiné le monde et continue de créer des ravages est donc logée au sein de nos quartiers…
Le débat, le vrai débat est là ! A présent, rien n’est plus aisé que d’attaquer son adversaire sur le flanc de la religion.