Faire des nouvelles générations, des acteurs de changement à l’ère du numérique
Propos recueillis par Souad Mekkaoui
Il est incontestable que le numérique reste un vrai vecteur de développement et de croissance économique qui permettra au Maroc de rentrer en compétition avec des grandes puissances historiques. Toutefois, le monde va à la vitesse de la lumière et les transformations numériques sont de plus en plus rapides. Face à ces mutations, le Royaume a d’énormes défis à relever pour ne pas rater le virage. Ali Jiar, membre du comité stratégique numérique du Grand Paris, maire-adjoint en charge du développement économique, commercial et du numérique à la mairie de Sevran, nous explique l’impact des nouvelles technologies sur les nouvelles générations et comment faire de ceux-ci des acteurs de changement surtout dans la transition du Maroc vers une économie développée.
MAROC DIPLOMATIQUE : L’omniprésence des nouvelles technologies dans la vie de la « génération connectée » est un vrai dilemme. Quels sont, d’après vous, les défis que posent les NTIC à la société marocaine ?
Le Maroc est aujourd’hui dans le TOP 5 des pays champions d’Afrique en matière de développement numérique, d’après le classement de l’Union Internationale des télécommunications. Ceci démontre à la fois la position dominante du digital dans la société marocaine, en droite ligne avec le Plan Maroc Numérique 2020, mais également la nécessité d’accompagner cette transformation profonde pour une meilleur utilisation des technologies notamment dans le domaine de l’éducation. En effet, le numérique représente d’ores et déjà une formidable opportunité de développement qui peut répondre au problème à la fois mondial mais également local de la désertification des campagnes au niveau éducatif, médical, économique.
_ Quels sont les dangers engendrés par les nouvelles technologies mais aussi leur apport sur le développement ?
Comme toute innovation révolutionnaire, cette transformation digitale de la société marocaine pose, bien sûr, la question du lien social, de l’isolement des enfants et adolescents accros par la technologie, du cyber harcèlement sur les réseaux sociaux qui fait ravage chez les plus jeunes avec des conséquences parfois désastreuses sur ces enfants. Gustave Flaubert ne disait-il pas de l’innovation qu’elle était« dangereuse » ? Ainsi, face à tous ces dangers, le Maroc doit-il suivre l’exemple français ou d’autres pays européens qui ont choisi d’encadrer l’utilisation des smartphones pour les plus jeunes et notamment de les interdire dans les enceintes scolaires ?
_ Quel est l’impact des nouvelles technologies sur les nouvelles générations ?
Depuis la création d’internet en 1969, aux États-Unis, son arrivée en Europe, en 1985, puis au Maroc, au début du 21ème siècle, les évolutions technologiques n’ont jamais cessé. Les événements historiques, les nouveautés techniques et les changements sociaux ont une forte influence sur les différentes générations concernées par cette période particulièrement active. En, à peine, 15 ans, ces générations ont assisté, pour chacune d’entre-elles, à la mutation de leur propre mode de fonctionnement et de valeurs. La génération des X nés entre 1960 et le début des années 1980, de parents qui étaient de la génération des baby-boomers n’est entrée en contact avec Internet qu’à l’âge adulte, c’est pourquoi on les nomme aussi les «immigrants du numérique». Ils utilisent assidûment les possibilités offertes par le numérique, qui ne représente pas un but en soi mais plutôt un outil pour progresser.
La génération des Y nés entre la fin des années 1980 et la veille du nouveau millénaire est entrée en contact, dès l’enfance ou à l’adolescence avec des smartphones et des tablettes, et a donc développé une utilisation intense d’Internet. Ils forment la première génération des «natifs du numérique». Les Y connaissent bien les potentialités du numérique mais également les dangers qui guettent la génération des Z. Cette génération née au tournant du millénaire est constamment connectée avec le monde d’Internet et n’a jamais connu autre chose. Les réseaux sociaux occupent une grande partie de son existence. C’est sur cette génération que réside de nombreux enjeux liés aux nouvelles technologies, au niveau du lien social fragilisé car elle est toujours connectée, de la communication avec le langage « SMS » qui dégrade l’utilisation de la langue classique et enfin car ces Z pratiqueront des métiers qui n’existent pas encore. Le numérique reste pourtant un formidable vecteur de développement et de croissance économique qui permettra au Maroc de rentrer en compétition avec des grandes puissances historiques.
_ Face aux transformations numériques rapides, que doit faire le Maroc pour favoriser l’adaptation à la révolution technologique et ne pas rater le virage numérique ?
Aujourd’hui, le métier le plus en tension dans le monde est le métier du développement informatique. Chaque année, le marché mondial recherche plus d’un million de développeurs aux Etats-Unis, au Canada, en Europe. Si le Maroc parvient à former une classe de développeurs experts autour des nouvelles technologies et des défis que nous annoncent l’intelligence artificielle et le BIG DATA , les ingénieurs marocains pourront se positionner comme la référence dans ce domaine des NTIC