La Conférence intergouvernementale : une messe planétaire
Le Maroc, désormais, terre des grands-messes internationales, vient de voir se clôturer, mardi 11 décembre, sous ses cieux la conférence intergouvernementale pour l’adoption du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, après des efforts salutaires consentis afin de garantir la réussite des travaux de ce grand rendez-vous « historique ». Pour cet événement planétaire, la ville ocre s’est vu attribuer l’honneur d’abriter, les 10 et 11 décembre 2018, les travaux qui ont vu l’adoption formelle du Pacte mondial sur les migrations, dans un cadre de coopération multilatérale. Ministres et vice-ministres des Affaires étrangères, de l’Intérieur, de la Migration et de la mobilité humaine, Représentants gouvernementaux et d’organisations internationales, issus de plusieurs pays du monde, en plus de quelque 700 partenaires étaient unanimes que le Pacte de Marrakech, qui s’est étalé sur deux jours de travaux intenses et qui a coïncidé avec le 70e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’Homme, est « un grand pas dans la bonne direction » pour la mise en oeuvre d’une approche commune, globale et inclusive, et une responsabilité partagée entre les différentes parties. Des objectifs visés par cette feuille de route élaborée sont scellés pour une bonne gestion optimale et humaine de la question migratoire. C’est, d’ailleurs, une première dans l’histoire des Nations unies que les pays membres se mettent d’accord sur une question d’une telle complexité grâce au concours de tous.
Par ailleurs, l’organisation de cet événement grandiose en terre marocaine est la preuve que la communauté internationale est consciente des efforts déployés par le Maroc, dans le domaine de la migration et le positionne en leader dans la région, dans sa gouvernance et son engagement permanent, en faveur de la question migratoire.
Un Pacte mondial de portée historique
Applaudi et salué comme un exploit et une réussite importante à portée historique, le pacte a été approuvé le 13 juillet dernier par les Etats membres sous l’égide de l’Assemblée générale des Nations unies, confirmant ainsi les valeurs et les principes de la charte des Nations unies et du droit international. Ambitionnant de mieux gérer les migrations internationales, de défendre et protéger les droits fondamentaux des migrants et de lutter contre les réseaux de traite des êtres humains tout en contribuant au développement durable, le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières se veut être un cadre idoine de coopération multilatérale pour la mise en place de politiques nationales migratoires et de nouveaux outils pour la gestion de la migration tout en préservant la souveraineté des Etats.
Pour rappel – « Le Pacte pour les migrations devrait être centré sur les personnes et sur les droits de l’Homme, et devrait prévoir des mesures à long terme, durables et complètes, dans l’intérêt de toutes les parties concernées, en s’appuyant sur le principe de partenariat et une coopération renforcée entre les pays d’origine, de transit et de destination ». Telle était la résolution adoptée par le Parlement européen en avril dernier. |
De facto, Marrakech était le théâtre de plaidoyers édifiants et incontestables de plus de 150 Etats membres qui ont adopté, lundi 10 décembre, le Pacte mondial sur les migrations, en le défendant face aux critiques des nationalistes et des partisans de la fermeture des frontières.
Rappelons, toutefois, que deux années de discussions et de négociations, au sein de l’Assemblée générale de l’ONU, ont précédé l’adoption du Pacte mondial qui confirme que sans multilatéralisme, aucun Etat ne pourra faire face à la migration et aux autres défis du monde. C’est donc une avancée qualitative d’un multilatéralisme efficace et un accord qui constituera une référence de taille pour tout événement ultérieur relatif à la migration.
En effet, il s’agit d’une occasion historique d’améliorer et de renforcer la coopération et la concertation internationales dans la mesure où le Pacte souligne l’importance du respect des droits des migrants, mais prend aussi en compte les attentes des États, notamment en matière de sécurité et de contrôle des frontières.« Si l’adoption est un premier pas, il y a une autre étape majeure que nous devons franchir, celle de la concrétisation des engagements pris dans le cadre du Pacte, à l’échelle nationale, régionale et internationale », a, par ailleurs, indiqué le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, M. Nasser Bourita, lors de la séance de clôture.
Aussi ces États s’engagent-ils à prévenir la migration irrégulière à travers une coopération renforcée pour lutter contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains et pour démanteler les réseaux de passeurs. D’où l’importance de l’action commune et concertée afin d’assurer des conditions de vie décentes pour les migrants et surtout protéger les femmes et les enfants qui sont assujettis à diverses formes d’abus et d’esclavage. Le respect des droits de l’Homme et de la dignité des migrants n’est-il pas le devoir de tous ?
Pour ce faire et eu égard à la nette croissance des flux migratoires, les Etats se doivent de conjuguer leurs efforts et honorer leurs engagements pris à travers ce Pacte qui se veut « historique ». Ce qui ne peut aboutir sans de véritables actions et mesures, décidées et prises par la communauté internationale qui pourraient faire face au fléau des migrations et à cet enjeu qui va crescendo.
Construire ensemble un avenir inclusif
Force est de constater qu’il s’agit aussi d’un pacte qui établit un cadre de coopération, juridiquement, non contraignant et qui repose sur les engagements convenus par les États membres, dans la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants. Certes, aucun Etat ne peut, à lui seul, relever le défi et faire face aux enjeux complexes et aux problèmes engendrés par les migrations, mais une coopération internationale plus intense et plus étroite entre tous les acteurs est nécessaire pour pouvoir aller de l’avant dans sa gestion, tout en respectant la souveraineté des Etats et apporter l’aide qu’il faut aux pays les plus touchés par ce phénomène et renforcer le cadre de la collaboration multilatérale.
L’Observatoire africain des migrations
• L’Observatoire africain des migrations dont le travail est fondé sur le triptyque « comprendre, anticiper et agir », sera basé à Rabat. Il aura pour mission de collecter les informations et de développer leur échange ainsi que de faciliter la coordination entre les pays africains sur la question migratoire. |
C’est dire que ce Pacte, en dépit des divergences et des intérêts des Etats, se veut un compromis satisfaisant et consciencieux et témoigne de la volonté commune de la communauté internationale et de sa solidarité engagée pour faciliter des migrations sûres, ordonnées et régulière, élément clé de croissance économique pour les pays d’origine et d’accueil tout en réduisant les répercussions négatives de la migration irrégulière. Et c’est d’ailleurs dans ce sens que les conférenciers ont souligné le rapport étroit entre migration et développement durable tout en insistant sur la responsabilité commune dans la construction d’un avenir « inclusif » régie par l’adoption de ce Pacte qui garantira le respect des droits des migrants en vue de donner d’autres tons à ce fléau mondial.
Tous pour une gouvernance mondiale pour un fléau menaçant
Faut-il rappeler qu’aujourd’hui, plus de 258 millions de migrants dans le monde vivent loin de leur pays de naissance ? D’autant plus que la croissance démographique et ce qu’elle engendre comme déséquilibre, les changements climatiques, la connectivité croissante et bien d’autres éléments font que ce chiffre est amené à s’intensifier.
De facto, les participants à la Conférence inter-gouvernementale sur la migration, qui a été marquée par l’adoption formelle et historique du Pacte, ont mis en relief la nécessité d’optimiser les effets positifs de la migration régulière et de lutter contre les causes qui poussent des millions de personnes à quitter leurs pays d’origine pour d’autres constituant pour eux de meilleures perspectives pour un meilleur avenir. Ainsi, ils ont conclu que la fédération des énergies pour garantir de meilleures conditions et du coup une meilleure intégration des migrants dans les pays d’accueil est incontestable pour ce véritable moteur de développement durable.
Dès lors, la réalisation des objectifs du développement durable à l’horizon 2030 exige une gestion collective du phénomène migratoire et une meilleure assistance aux pays d’origine comme ceux d’accueil.
Et comme il y a toujours un « mais » à toute belle réalisation, les intervenants se sont vus navrés de la position de certains pays ayant contesté le Pacte de Marrakech. C’est pourquoi ils les ont invités à revoir leur décision en vue de rejoindre ce consensus international pour le bien de tous.
Par ailleurs, conscients de la portée de cet accord mondial qui favorisera les aspects positifs de la migration mais permettra aussi d’assurer la sécurité des frontières des pays concernés en premier lieu par les flux migratoires, les pays signataires sont unanimes que le Pacte de Marrakech doit être réévalué et amélioré continuellement pour suivre l’évolution des sociétés et des aspects émergents de la gouvernance et de la gestion de la migration qui –ne l’oublions pas- offre d’immenses possibilités et avantages. En effet, elle peut être bénéfique pour les migrants, les communautés d’accueil et celles d’origine. Toutefois, elle présente d’énormes défis à relever quand elle est mal gérée, notamment les périples qui se terminent souvent par des catastrophes.
A NOTER QUE • Le pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulière est le premier accord à couvrir toutes les dimensions de la migration internationale. |