Accord d’association Maroc-Royaume Uni : Cinq questions à Daniel Katte
L’accord d’association Maroc – Royaume Uni est entré en vigueur le 1er janvier 2021. Premier pays à avoir ratifié un accord d’association avec le Royaume-Uni sorti de l’UE, le Maroc a signé cet accord à Londres en 2019, en vue d’un renforcement des relations bilatérales post-Brexit. Contacté par MAROC DIPLOMATIQUE, Daniel Katte, Directeur du Bureau du Département britannique du Commerce International (DIT) au Maroc et Consul général britannique à Casablanca, a répondu à nos questions portant sur les relations entre les deux Royaumes et l’accord d’association.
MAROC DIPLOMATIQUE : Parlez-nous rapidement des liens qui unissent le Maroc et le Royaume-Uni.
Daniel Katte : Notre relation diplomatique remonte à huit siècles, depuis le premier accord entre les dirigeants de nos deux Royaumes. Notre relation économique a aussi une très longue histoire derrière elle. Notre premier accord commercial a été signé, il y a 300 ans ce mois-ci, en 1721. Et aujourd’hui, nos deux pays bénéficient d’une forte présence au sein de nos continents respectifs. Nous avons tous les deux des liens très importants avec l’Europe et l’Afrique, et nous partageons également une orientation atlantique très importante.
Le Royaume-Uni et le Maroc ont des économies remarquablement complémentaires, je dirai même que cela dépasse la moyenne de l’UE et du Maroc qui sont liés par un accord de libre-échange, et donc maintenant que nous sommes en mesure de le faire, les gouvernements du Royaume-Uni et du Maroc peuvent travailler ensemble pour identifier les moyens d’élargir notre coopération économique d’une manière encore plus libre que nous avons pu le faire auparavant.
MD : Quel est l’impact du Brexit sur les relations commerciales et diplomatiques entre les deux pays ?
– Le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne a été pour notre gouvernement une occasion, à la fois, de ressaisir notre souveraineté en tant que nation indépendante, mais aussi l’occasion d’établir notre propre politique commerciale indépendante.
– D.K : L’accord de libre-échange, conclu juste avant Noël, avec le Royaume-Uni est le premier accord commercial non contingentaire de l’UE avec un autre pays. Mais pour nous, ici au Maroc, c’est l’occasion d’entrer dans une nouvelle ère pour nos relations commerciales parce que nous sommes maintenant en mesure de négocier nos propres accords commerciaux et de développer nos relations commerciales avec d’autres pays que le Maroc, en dehors de l’Union européenne. Et c’est cet avenir passionnant que nous avons devant nous à partir du début de ce mois.
L’accord d’association entre le Maroc et le Royaume-Uni qui a pris effet le 1er janvier n’est qu’un début.
MD : Que comprend l’accord d’association entre les deux pays ?
– D.K : Cet accord présente des avantages mutuels pour le Maroc et le Royaume-Uni. Il reproduit les effets de l’accord d’association UE-Maroc existant, à la fois les aspects liés au commerce et le large champ d’application des dispositions politiques et de coopération, pour assurer la continuité des relations commerciales et bilatérales plus larges entre le Maroc et le Royaume-Uni.
En signant l’accord d’association, les deux parties ont assuré la sécurité des entreprises, des consommateurs et des investisseurs à la suite du retrait du Royaume-Uni de l’UE. Le commerce bilatéral entre le Royaume-Uni et le Maroc représente déjà 25 Milliards de dirhams. Ce traité bilatéral fournit une plate-forme à partir de laquelle on peut approfondir les relations commerciales et d’investissement entre les économies complémentaires du Royaume-Uni et du Maroc.
MD : Quels secteurs sont visés par cet accord et lesquels méritent une coopération plus importante ?
– D.K : Les relations commerciales entre le Royaume-Uni et le Maroc valent environ 25 milliards de dirhams. On peut y voir des domaines particulièrement importants comme – du côté marocain – l’exportation de produits agricoles frais, des fabricants notamment dans les secteurs automobile et aéronautique, du côté britannique, nous avons aussi beaucoup de produits manufacturés, également dans le secteur automobile et le secteur de l’aviation.
Cela montre la complémentarité qui existe déjà entre nos économies. Mais ce que nous voyons maintenant, c’est un moyen de s’étendre et de se concentrer sur les domaines disposant d’un réel avantage comparatif.
Nous avons identifié également toute une série de domaines dans lesquels nous souhaitons établir des priorités, en particulier, dans les secteurs de l’éducation, des infrastructures et de l’agriculture, surtout dans le domaine de la transformation agricole. Comme réponse à la crise climatique mondiale, cela va être particulièrement important également dans le domaine des énergies renouvelables où le Royaume-Uni a une expertise particulière dans l’éolien offshore, qui est un secteur majeur de l’avenir au Maroc.
Dans le cadre de cet accord d’association, des groupes de travail seront constitués de représentants des gouvernements britannique et marocain dans l’objectif de faciliter notre travail, afin d’identifier les secteurs prioritaires, promouvoir les opportunités d’investissements au Royaume-Uni ainsi qu’au Maroc, et prendre les mesures pratiques en vue de faciliter les relations commerciales et d’investissement pour les entreprises marocaines et britanniques.
MD : Quelles sont les perspectives d’avenir ?
– D.K : La présence marocaine se développe considérablement sur tout le continent africain. Le Royaume-Uni ambitionne d’être le premier investisseur en Afrique et entretient, depuis longtemps, des relations étroites avec de nombreux pays africains. C’est aussi une opportunité de synergie entre nos deux pays. Le Royaume-Uni reconnaît le rôle important que l’Afrique jouera dans l’économie de l’avenir. On estime par exemple que dans les vingt prochaines années, la moitié de la population active mondiale se trouvera en Afrique. C’est un chiffre extraordinaire. Et c’est pourquoi il est si important que le Maroc se considère comme une porte d’entrée vers l’Afrique. Le Royaume-Uni le reconnaît et le considère comme une porte d’entrée très importante.
Les deux pays vont avoir un impact très important dans les années à venir. Maintenant, et surtout que nous cherchons des moyens pour mieux reconstruire après l’impact mondial de la pandémie de la Covid-19, je pense que nous devons voir comment nous pouvons changer et améliorer la façon dont nos économies fonctionnent.