Ahmed Lahlimi Alami, la planète compte 8 milliard d’habitants
Lors de l’ouverture du Sommet sur la mise en œuvre des engagements climatiques de la COP 27 à Sharam El Sheikh en Egypte, le 6 novembre 2022, le Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guetterez a annoncé à la communauté internationale que notre planète aura 8 milliards d’habitant en ce 15 novembre 2022 sachant que qu’elle n’en avait que 2 milliards en 1950 et qu’elle en aura 9,7 milliards à l’horizon 2050.
Cette annonce qui devrait réjouir une humanité en expansion sonnait comme une alerte dans un contexte historique marqué par un double phénomène :l’inégalité de répartition de la population et des richesses accumulées entre les continents, les régions et les nations du monde, accompagnée de menaces existentielles que les émissions inconsidérées du CO2 font peser sur la demeure commune de ces dernières.
De par sa situation géographique, située au carrefour des deux espaces européen et africain, le Maroc se trouve au cœur de cette réalité de la frontière entre ces deux mondes à évolutions démographique et économique contrastées et affronte tous les jours les difficultés de sa gestion étant lui-même à la fois source d’émigration, pendant longtemps pays de transit et aujourd’hui pays de séjour d’immigrés. L’Europe, la plus grande puissance économique du monde, constitue naturellement un des pôles d’attraction de l’immigration exacerbée par la proximité des pays du sud et par la multiplication des foyers de crises géostratégiques à travers le monde, alors qu’elle devrait connaître un déclin de sa population, passant de 743 millions d’habitants aujourd’hui à près de 703 millions en 2050.
Par ailleurs, le Maroc, partie intégrante de l’Afrique, de par la géographie, l’histoire et la communauté de destin, toujours très solidaire de ce continent avant et après son indépendance et aujourd’hui dans la lutte pour son développement. C’est ainsi que, malgré ses propres problèmes économiques, le Maroc, le premier investisseur africain en Afrique, prévoit de contribuer au développement des infrastructures africaines où le Gazoduc Nigéria-Maroc est l’un des projets phares de ce continent. Ce dernier constitue« plus qu’un projet bilatéral entre deux pays frères », comme l’a souligné Sa Majesté le Roi Mohammed VI que Dieu L’assiste, ses effets devront profiter à l’ensemble de la région de l’Afrique de l’ouest.
Force est, cependant, de constater que malgré sa richesse en ressources naturelles, l’Afrique reste, en terme de développement, à la traîne par rapport aux autres régions du monde, handicapée notamment par le faible niveau de développement de ses infrastructures et une prépondérance de son secteur informel en raison particulièrement de la faible productivité de son secteur agricole. L’Afrique subsaharienne devrait voir sa population augmenter pour passer de près de 1,17 à 2,11 milliards en 2050. Ce croît démographique qui s’accompagne d’une population en âge de travailler de plus en plus importante et qui voit dans les pays du Nord l’une des solutions pour échapper au chômage et à la pauvreté, exacerberait la pression sur les pays de la rive sud de la Méditerranée comme lieu de passage obligé vers l’Europe.
Les retombées des crises économique et alimentaire conjuguées aux effets des changements climatiques accentuent les difficultés de l’Afrique en matière de croissance économique, du développement social et de valorisation de ses ressources naturelles et exacerbent les flux migratoires et favorisent l’instabilité et les risques de terrorisme. C’est ainsi que sur le plan économique, les changements climatiques induiraient une perte de 2/3 des terres arables d’ici 2030 (FAO) et une perte entre 5 et 15% de croissance de son PIB par habitant (BAD). Sur le plan social, les changements climatiques pourraient faire passer près de 43 millions d’Africains supplémentaires sous le seuil de pauvreté dès 2030.
Dans ce contexte régional, le Maroc, pendant longtemps, pays de transit, devient de plus en plus un pays d’immigration, sous l’effet d’une politique migratoire de plus en plus sélective de la part des pays européens. Il affronte ainsi, la pression de flux migratoires croissants venant du sud du Sahara. Sous les hautes instructions et le leadership de Sa Majesté le Roi Mohammed VI que Dieu L’assiste, le Maroc a adopté plusieurs initiatives dans la gestion de ces flux migratoires. Dans le cadre d’une Stratégie Nationale de l’Immigration et l’Asile, Sa Majesté le Roi a été le leader de l’Afrique dans son adoption de l’Agenda Africain sur la Migration en 2018.À son imminente initiative, le Pacte Mondial pour des Migrations Sûres, Ordonnées et Régulières en 2018 a été adopté par la communauté internationale. Sous ses Hautes Directives, l’observatoire africain pour les migrations a été créé à Rabat en 2020 et le Maroc a continué à la régularisation de la situation des immigrants dont près de 50 000 d’entre eux ont vu leur situation régulée.
Conscient de l’importance des données sur les caractéristiques démographiques et socioéconomiques des migrants pour améliorer la connaissance et la compréhension des phénomènes migratoires, le HCP s’est engagé dans un grand programme d’enquêtes et de travaux sur les migrations internationales au Maroc, notamment :
- L’intégration d’un module sur les migrations dans les Recensements Généraux des Populations et de l’Habitat,
- L’introduction, depuis 2017, d’un module spécifique sur l’immigration dans l´Enquête Nationale sur l’Emploi.
- L’enquête sur la migration internationale de 2018-2019 dans ses différentes dimensions (émigration, immigration, migration de retour et intentions d’émigrer de la population non migrante).
- L’enquête nationale sur la migration forcée de 2021.
- L’enquête sur l’impact de la Covid-19 sur la situation socioéconomique et psychologique des réfugiés au Maroc de 2020, en partenariat avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés.
- L’harmonisation des statistiques administratives de la migration internationale.
Au final, les problèmes et les défis que pose la démographie restent largement tributaires de la capacité des pays en développement, notamment africains, à s’engager dans des modèles de développement appropriés en mesure d’assurer une transformation structurelle permettant de mieux exploiter le croît démographique pour plus de création de richesses et une meilleure répartition des fruits du développement.