Algérie: les tribunaux paralysés au 2e jour d’une grève inédite
L’ensemble des tribunaux d’Algérie étaient toujours à l’arrêt lundi, selon des syndicats, au deuxième jour d’une grève « illimitée » des magistrats qui réclament « l’indépendance de la Justice » et l’annulation d’un changement d’affectation qui vise la moitié d’entre eux.
98% des magistrats étaient en grève lundi, après 96% la veille, selon un communiqué repris par les médias locaux du Syndicat national des magistrats (SNM), à l’origine de l’appel à la grève lancé dimanche.
« Tous les tribunaux du pays sont totalement paralysés », a affirmé à l’AFP Saadedine Merzoug, porte-parole du Club des magistrats, un syndicat non enregistré né dans la foulée du « Hirak », le mouvement de contestation inédit lancé en Algérie le 22 février, qui a poussé l’ex-président Abdelaziz Bouteflika à la démission le 2 avril.
Le principal tribunal d’Alger, celui de Sidi M’hamed, était quasi-désert lundi, a constaté un journaliste de l’AFP. Aucune audience ne s’y tenait et seule une poignée d’avocats discutaient dans un bureau. Il n’a pas été possible d’accéder aux bureaux des magistrats.
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« Tous les procès prévus aujourd’hui (lundi) ont été renvoyés », a expliqué sur place un avocat sous le couvert de l’anonymat.
Le 24 octobre, le ministère de la Justice a annoncé le changement d’affectation de quelque 3.000 magistrats –soit la moitié des effectifs de ce corps, selon M. Merzoug–, précisant que le CSM avait « validé à l’unanimité » cette décision.
Le SNM a dénoncé dans son communiqué la « mainmise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire », reprochant notamment au ministre de la Justice d’avoir « empiété sur les prérogatives du Conseil supérieur de la Magistrature (CSM) » en décidant de ce vaste mouvement de mutations.
La veille, le CSM a annoncé dans un communiqué le « gel » de cette décision, affirmant ne pas avoir été consulté et n’avoir pu « prendre connaissance » que « de la liste finale élaborée par le ministère ».
Le ministère de la Justice a immédiatement qualifié cette décision de « nulle et non avenue », estimant qu’aucune réunion du CSM n’avait été convoquée depuis celle ayant validé le mouvement d’affectations, et que l’institution ne pouvait pas s’autosaisir.
Présidé par le chef de l’Etat, et comprenant notamment le ministre de la Justice, le président, le procureur général de la Cour suprême et dix magistrats élus par leurs pairs, le CSM est chargé de décider « des nominations, mutations et promotions des magistrats » et des poursuites disciplinaires.
Avec AFP