Algérie : Un « Je vous ai compris » à la manière de Tebboune
Par Abdelhamid Dades
Qui ne serait pas étonné par cette dernière décision du Président algérien, Abdelmajid Tebboune ? Malade, et assez longtemps absent d’Algérie, il réapparaît curieusement et fait une grande annonce ! Annonce qui intervient au lendemain du déclenchement d’un Hirak qui s’avère, cette fois-ci, décidé à aller jusqu’au bout.
C’est-à-dire jusqu’à éradication du mal qui gangrène le pays en l’occurrence, le régime corrompu. Cette sangsue qui ravage l’Algérie et prend en otage plus de 40 millions de citoyens, privés de leur droit à une vie décente dans un territoire qui est le leur et pour la liberté duquel leurs ancêtres ont tout sacrifié…
Le Président revient, ou plutôt, a été rappelé par la junte militaire qui est réellement au pouvoir et dont il n’est que le simple porte-parole ou prête-voix, pour apaiser les tensions.
En dépit de sa maladie, la voix de ses maîtres a pris des décisions et pas des moindres. Et dans une sorte de remake, un peu flou, du « je vous ai compris », de Benali, l’ex-Président tunisien qui avait pris la fuite, quelques heures après son fameux discours, Tebboune annonce la dissolution de l’Assemblée Populaire Nationale (APN/chambre basse du parlement) et la tenue d’élections législatives anticipées. Il a fait savoir qu’un remaniement du gouvernement sera aussi opéré et qu’il touchera plusieurs départements ministériels.
Le hic est que ces décisions ont été prises à quelques jours de la célébration, le 22 février prochain, du 2ème anniversaire du Hirak qui a chassé le président Bouteflika du pouvoir après 20 de règne sans partage. Hirak dont la flamme s’est rallumée, mardi 16 février à Kherrata, ville de l’est du pays, où des milliers de citoyens se sont rassemblés pour dénoncer le pouvoir de la junte militaire et réclamer l’instauration d’un régime civil.
Une grande marche de protestation populaire qui, au-delà du fait qu’elle exprimait la déception et la colère d’un peuple qui croule sous le joug d’une crise économique et sociale qui l’étreint, traduisait le vœu, voir la volonté de déboulonner un régime militaire qui perdure. Une marche, aussi qui hisse la revendication populaire jusqu’alors économique et sociale, au champ politique et institutionnel. Les manifestants clamaient en effet, haut et fort : « Nous ne voulons plus d’un régime militaire, mais un pouvoir civil ».
« Un pouvoir civil », monsieur le président est une structure qui n’a rien à voir avec un remaniement gouvernemental ou la dissolution de l’APN ou encore la tenue d’élections anticipées. Ce peuple appelle, aujourd’hui, les militaires qui séquestrent l’esprit de la révolution algérienne, depuis 1965, qui pillent et appauvrissent le pays et les citoyens, à « dégager ». Chose que vous êtes, tout comme les généraux qui commandent, incapables de faire. Preuve que vous n’avez rien « compris » à ce peuple sur le bien-être et la prospérité duquel vous êtes censé veiller. D’où, ce discours et ces décisions « historiques », par lesquels vous vouliez tenter de « calmer le jeu » risquent, au lieu d’être une « poudre aux yeux », d’être vraiment une « poudre » que vous mettez dans un canon déjà trop chargé et prêt à faire feu. Reste à espérer que vous avez fini par comprendre qu’il faut se garder de trop jouer avec le feu et qu’il est grand temps que vous « dégagiez », tout comme les marionnettistes « gradés » qui vous font bouger.