Boualem Sansal, l’écrivain persécuté entame une grève de la faim en Algérie
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Face à une répression à l’égard des voix dissidentes en Algérie, l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, âgé de 80 ans et atteint d’un cancer, a entamé depuis samedi une grève de la faim. Une ultime forme de protestation contre ce qu’il considère comme une mascarade judiciaire, où ses droits fondamentaux – notamment celui d’une défense légitime et d’un procès équitable – sont bafoués.
Selon des informations rapportées par Marianne, l’intellectuel aurait subi des pressions et des menaces de la part de nervis du régime, entre deux séances de radiothérapie à l’hôpital Mustapha Pacha d’Alger. Ces derniers lui auraient intimé l’ordre de se séparer de son avocat, François Zimeray, et de choisir à la place « un autre avocat français non-juif ». Un chantage qui illustre le climat délétère entourant son procès.
Le 28 janvier dernier, à peine sorti de l’hôpital, Boualem Sansal a été reconduit en détention dans une prison algéroise. Un retour brutal à l’incarcération qui suscite une vive indignation, notamment en France, où le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a déclaré « espérer qu’une décision puisse être rendue le plus rapidement possible par la justice algérienne » en faveur de l’écrivain.
Quelques jours avant son procès, le président algérien Abdelmadjid Tebboune s’est livré à une attaque d’une rare violence contre Boualem Sansal. Le chef de l’État l’a qualifié « d’imposteur sans identité », affirmant qu’il « ignore qui est son père et prétend que la moitié de l’Algérie appartient à un autre pays [le Maroc] ». Une déclaration, révélatrice de la fébrilité du pouvoir face à cet écrivain qui, depuis des années, dénonce les dérives autoritaires du régime.
Cette charge présidentielle révèle une vaste campagne calomnieuse menée par les médias d’État, qui dépeignent Boualem Sansal comme un « bâtard », dont la mère aurait eu une liaison hors mariage avec un Marocain avant d’être abandonnée. Un récit diffamatoire qui s’inscrit dans un schéma bien rodé : la propagande algérienne tend systématiquement à « marocaniser » ses détracteurs, une stratégie visant à discréditer toute voix jugée hostile au régime en la rattachant à son ennemi désigné.
L’acharnement dont est victime Boualem Sansal dépasse son seul cas personnel. Il symbolise l’intransigeance du régime algérien à l’égard des intellectuels critiques et l’usage systématique de la machine judiciaire comme instrument de répression. Dans un pays où la liberté d’expression se heurte à un appareil d’État verrouillé, la situation de l’écrivain cristallise les tensions entre l’Algérie et la communauté internationale, notamment la France, où ses soutiens se mobilisent.
Tandis que son état de santé se fragilise sous l’effet de la maladie et de la grève de la faim, la question demeure : jusqu’où ira le régime algérien dans sa traque des opposants ?