Coup d’Etat au Niger : Bazoum serait-il trahi par sa proximité avec Paris ?
Le Niger a connu mercredi son quatrième coup d’Etat depuis son indépendance en 1960. Le président Mohamed Bazoum, élu en 2021 lors de la première transition démocratique du pays, a été destitué et séquestré par un groupe de soldats qui ont annoncé à la télévision publique la suspension des institutions et la fermeture des frontières. Ce coup de force intervient dans un contexte de forte instabilité sécuritaire et de contestation populaire contre la présence militaire française au Sahel. Ce coup de force contre Bazoum semble être un message fort adressé à la France en Afrique.
Le colonel Amadou Abdramane, entouré de neuf officiers, a lu mercredi soir un communiqué dans lequel il a déclaré que les forces de défense et de sécurité avaient décidé de “mettre fin au régime que vous connaissez en raison de la dégradation de la situation sécuritaire et de la mauvaise gouvernance”. Il a ajouté que les frontières avaient été fermées, qu’un couvre-feu avait été décrété et que les institutions avaient été suspendues. Il a également mis en garde contre toute intervention étrangère.
Le président Bazoum, qui avait prêté serment en avril dernier après avoir remporté l’élection présidentielle face à l’opposant Mahamane Ousmane, était retenu depuis mercredi matin dans son palais présidentiel à Niamey par des membres de la garde présidentielle, selon une source sécuritaire. Son sort reste incertain.
Message à la France ?
Ce coup d’Etat militaire, le septième en Afrique de l’Ouest et Centrale depuis 2020, pourrait encore compliquer les efforts occidentaux visant à combattre l’insurrection islamique qui a débuté au Mali en 2012, avant de se propager aux pays voisins. La France a notamment redéployé l’été dernier au Niger une partie de ses soldats précédemment basés au Mali, afin qu’ils aident à lutter contre les groupes liés à Al Qaïda et à l’Etat islamique.
Le Niger, pays pauvre, mais riche en uranium, est confronté à des attaques récurrentes des djihadistes sur son territoire, particulièrement dans les régions frontalières du Mali, du Burkina Faso et du Nigeria. Il fait partie de la force conjointe du G5 Sahel, qui regroupe également le Tchad, le Mali, le Burkina Faso et la Mauritanie.
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Le coup d’Etat intervient également dans un contexte de forte contestation populaire contre la présence militaire française au Sahel. Des manifestations ont eu lieu ces derniers mois dans plusieurs pays pour réclamer le départ des troupes françaises de l’opération Barkhane, accusées d’être inefficaces, voire complices des terroristes. Le président Bazoum, qui avait accepté d’accueillir les soldats français malgré une forte opposition des Nigériens, est en train de payer lourdement ses choix politiques.
Il a été critiqué par certains de ses opposants pour sa proximité avec la France, qui a déployé environ 4 800 soldats dans la région dans le cadre de l’opération Barkhane, en février 2022. Auparavant, en 2021, certains manifestants ont même brûlé des drapeaux français à Niamey en guise de contestation d’un président qui a fini par être « vassal » de Paris.
Malgré les contestations de plus en plus vives, Mohamed Bazoum a défendu sa coopération avec la France et affirmé que le Niger avait « la télécommande » de ses opérations militaires contre les jihadistes, et que la France n’était qu’un appui. Il a également salué le rôle de la France dans la stabilisation du Sahel et la protection des civils.