Des élus en difficulté, des sanctions en attente malgré des rapports accablants

La rentrée politique s’annonce particulièrement houleuse, notamment pour certains élus et présidents de communes dont l’avenir devient de plus en plus incertain. Accusés de prévarication et de mauvaise gestion des fonds publics, plusieurs d’entre eux risquent non seulement de perdre leur poste, mais aussi d’être poursuivis en justice. Cependant, bien que des rapports accablants de l’Inspection générale du ministère de l’Intérieur aient été rédigés, l’application des sanctions tarde à se faire. Ce retard suscite des interrogations, alors que des suspensions et révocations sont déjà en cours.

Des plaintes administratives ont été déposées par plusieurs walis et gouverneurs à l’encontre de nombreux présidents de communes et élus locaux. Un comité central, mis en place par le ministère de l’Intérieur, a été chargé d’instruire les dossiers en question. Ces démarches ont d’ores et déjà conduit à une série de suspensions, dans l’attente des décisions de la justice administrative.

Les critiques formulées contre ces élus portent principalement sur la gestion des ressources financières des communes. Des suspicions de conflits d’intérêts ont également été évoquées, dans un contexte où le ministère de l’Intérieur a renforcé le contrôle des budgets communaux. Des notifications ont été adressées à certaines communes, mettant en évidence les problèmes détectés et les mesures correctives nécessaires.

Plusieurs exemples sont donnés, notamment à Tanger, où le président de la commune et trois de ses adjoints ont vu leurs fonctions suspendues pour mauvaise gestion de certains marchés publics. À Taza, le président de la commune, Abdelouahed Massoudi, sera suspendu à compter du 24 octobre. Cette commune avait fait l’objet d’une inspection par l’Inspection générale de l’administration territoriale en février dernier, et Massoudi avait préféré démissionner pour anticiper la mesure de suspension.

En effet, les découvertes faites par la Cour des comptes révèlent d’importantes failles dans la gestion des finances et des ressources humaines de la commune de Rabat.

La Cour des comptes a récemment publié un rapport sur la gestion du conseil communal de Rabat, ce qui a provoqué de vives réactions parmi les conseillers de la ville et continue de susciter des débats animés. Le rapport a mis en évidence des irrégularités majeures, et certains membres de l’opposition ont demandé une discussion approfondie lors de la prochaine session du conseil communal. Ils ont également suggéré de soumettre les dossiers des violations à la justice pour une enquête plus poussée.

Le rapport a révélé plusieurs anomalies préoccupantes dans la gestion des ressources humaines de la commune. Par exemple, des salaires ont été versés jusqu’à fin février 2023 à six fonctionnaires qui étaient soit retraités, soit décédés. De plus, 77 fonctionnaires ont reçu des salaires sans être inscrits sur la liste officielle des employés de la commune. Ces révélations ont mis en lumière des problèmes graves de gestion et de transparence. Ainsi, le rapport a souligné l’incapacité de la commune à fournir un décompte précis. Un écart de 216 employés a été observé, avec 48 fonctionnaires non déclarés. Cette situation a conduit à des interrogations sur la rigueur des processus administratifs et la transparence des opérations de la commune.

A Casablanca, le tribunal administratif a récemment prononcé la révocation de plusieurs élus, qui étaient déjà suspendus de leurs fonctions en attendant la décision finale.

Parmi les élus touchés par cette décision, on trouve les présidents des communes d’Oulad Azzouz, Oulad Zaydane, et Oulad Si Bouyahya. La décision concerne également un élu de la commune de Dar Bouazza, ainsi que plusieurs membres des communes d’Oulad Zaydane, Dar Bouazza, et Settat. Ces révocations s’inscrivent dans un contexte plus large de réformes administratives visant à redresser la gestion des affaires locales.

À Settat, des dysfonctionnements dans la gestion des taxes communales ont conduit à la suspension de Mustapha Tanoui en août dernier, pour mauvaise gestion des finances publiques. Deux autres membres du Conseil communal ont également été suspendus. Ils sont accusés de connivence avec la société de gestion des déchets, qui continue d’opérer malgré l’expiration de son contrat en février, ainsi que d’avoir contribué à la dégradation du service de transport public, en raison de l’utilisation de bus vétustes malgré des engagements d’achat de véhicules neufs.

À Berrechid, Abdellatif El Aroui, président de la commune d’Oulad Zidane, et deux de ses adjoints ont été sanctionnés de la même manière. Enfin, à Kénitra, le président de la commune, Anas Bouanani, ainsi que deux de ses adjoints, ont été révoqués pour des malversations dans le secteur de l’urbanisme.

Cette vague de révocations est la conséquence d’une analyse détaillée des rapports d’inspection menés par le ministère de l’Intérieur. Ces rapports ont mis en lumière de nombreuses irrégularités dans la gestion des finances des communes concernées, ce qui a conduit à des plaintes urgentes déposées par les walis en charge de ces territoires. Ainsi, les plaintes ont demandé l’éviction des personnes impliquées, arguant de la nécessité de maintenir l’intégrité et la transparence dans la gestion des fonds publics.

Le retard des sanctions interroge

En revanche, certains représentants du ministère de l’Intérieur préfèrent attendre avant d’exécuter ces décisions ou de révéler les rapports des commissions d’inspection, bien qu’ils constituent un signal fort dans la lutte contre la corruption et renforcent le rôle des organes de contrôle.

Dans la province de Benslimane, un climat de suspense règne à Mansouria, où l’on attend une décision du ministère de l’Intérieur après la remise d’un rapport par la commission de l’Inspection générale de l’administration territoriale. Selon les médias, le retard dans la publication de cette décision cruciale, qui déterminera l’avenir du président de la commune en poste depuis 27 ans, soulève des interrogations quant au rôle du gouverneur de la province.

La commission de l’Inspection générale du ministère de l’Intérieur a terminé ses recherches sur les dossiers de la commune de Mansouria le 7 juin dernier, après une période d’audit couvrant de 2011 à 2023. Un rapport qualifié de « cinglant » a été rédigé à ce sujet.

De plus, la commission s’était rendue sur place en avril 2023 pour enquêter sur plusieurs dossiers, dont ceux liés à l’urbanisme, aux certificats administratifs de division, aux exonérations fiscales, aux licences, aux contrats de travail temporaires, aux marchés publics, ainsi qu’aux bons de commande attribués à des entreprises spécifiques, dont celles appartenant à des membres du conseil communal ou à leurs proches. Le dossier de la gestion déléguée de la propreté, confiée à la société « Ozone », a également été examiné, ainsi qu’un projet routier régional ayant coûté environ 7 milliards de dirhams, financé par un prêt du Fonds national pour l’équipement communal, et dont la réalisation a duré environ six ans, marquée par de nombreuses irrégularités.

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