Diplomatie marocaine : Une stratégie gagnante sur la scène régionale et internationale

L’année 2024 a été particulièrement marquante pour le Maroc sur le plan diplomatique, une dynamique qui a renforcé sa position tant au niveau régional qu’international. À travers des initiatives multilatérales, des rapprochements stratégiques et un engagement actif au sein des instances mondiales, le royaume a su affirmer son leadership, notamment en Afrique, en Europe et au sein des organisations internationales. Zakaria Aboudahab, professeur de relations internationales à l’Université Mohammed-V de Rabat, analyse les multiples facettes de ces performances, soulignant leur impact profond sur le développement du pays et son rayonnement mondial.
L’Afrique, territoire privilégié de la diplomatie marocaine, a vu son engagement renforcé en 2024. Selon Zakaria Aboudahab, le Maroc a consolidé sa position sur le continent, notamment par la reconnaissance croissante de son projet d’autonomie pour le Sahara. Le soutien de pays comme le Tchad, qui a ouvert un consulat à Dakhla, témoigne de la solidité de cette approche. Cet acte symbolique s’inscrit dans un processus plus large de mobilisation des États africains en faveur de la marocanité du Sahara, un sujet clé de la diplomatie marocaine.
Par ailleurs, le projet du gazoduc entre le Maroc et le Nigeria, qui avance à grands pas, constitue un autre jalon majeur. Zakaria Aboudahab note que les négociations officielles ont abouti à des signatures d’adhésion de plusieurs pays partenaires. Ce projet d’envergure, qui vise à renforcer les infrastructures énergétiques et économiques de la région, sera un facteur essentiel de développement pour le Maroc et l’Afrique de l’Ouest. Une rencontre prévue entre Sa Majesté le Roi Mohammed VI et le président nigérian formalise cet engagement stratégique, consolidant ainsi les liens entre les deux pays.
Une diplomatie européenne en évolution
Les relations du Maroc avec l’Union européenne ont également été marquées par une intensification des échanges diplomatiques en 2024. Des visites de hauts responsables européens, dont celle du commissaire à la politique de voisinage à l’Élargissement, ont permis de renforcer les partenariats économiques et politiques. Le Maroc a participé activement à plusieurs sommets conjoints, notamment au sein de la Ligue arabe et de l’Organisation de coopération islamique (OCI), consolidant ainsi son rôle de médiateur et de leader régional. L’expertise marocaine dans des domaines tels que la gestion des migrations, la sécurité et la transition énergétique a été mise en avant lors de ces rencontres, accentuant sa position stratégique dans les négociations avec l’Europe.
Zakaria Aboudahab insiste sur la volonté du Maroc de maintenir une diplomatie pragmatique et diversifiée, entretenant des relations équilibrées et constructives avec ses voisins européens, tout en affirmant son autonomie en matière de politique étrangère. Le renforcement des partenariats, notamment à travers des accords bilatéraux et des projets communs, témoigne de cette volonté de solidifier des liens mutuellement bénéfiques.
Sur la scène internationale, 2024 a été une année décisive pour le Maroc, qui a su tirer parti de son engagement multilatéral. Le pays a présidé le Conseil des droits de l’Homme de l’Assemblée générale des Nations Unies, une première qui a renforcé son rôle de promoteur des droits humains à l’échelle mondiale. Cette présidence a permis au Maroc d’être à l’avant-garde de discussions cruciales sur des enjeux globaux, tout en mettant en avant ses valeurs de tolérance et de coopération internationale. En parallèle, le pays a été élu vice-président d’une organisation internationale traitant des armes chimiques, illustrant son influence croissante dans le domaine de la sécurité mondiale.
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Zakaria Aboudahab relève également l’importance de l’adhésion marocaine aux initiatives de dialogue interconfessionnel et d’alliance des civilisations. Cette orientation diplomatique s’est accompagnée d’un soutien constant à la cause palestinienne, notamment à travers des aides humanitaires envoyées aux populations gazaouies et cisjordaniennes, dans un contexte de crise persistante. Le Maroc a su allier ses ambitions diplomatiques à une action concrète sur le terrain, renforçant ainsi sa crédibilité au niveau international.
Sahara marocain et France
La visite d’État du président français Emmanuel Macron en 2024 a été un moment charnière dans les relations franco-marocaines. Ce voyage, marqué par la célébration des 25 ans du règne de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, a été l’occasion pour la France de réaffirmer son soutien à la marocanité du Sahara. Ce geste symbolique, soutenu par une reconnaissance officielle de la souveraineté du Maroc sur son territoire, a renforcé les liens entre les deux pays. Zakaria Aboudahab souligne que cette visite s’inscrit dans une dynamique plus large de coopération renforcée, notamment dans les secteurs économiques, culturels et sécuritaires.
L’adoption historique de la résolution 2756 par le Conseil de sécurité des Nations Unies, concernant la question du Sahara marocain, représente un tournant diplomatique majeur. Cette résolution appelle toutes les parties prenantes à prendre en compte les évolutions sur le terrain et à favoriser une solution politique durable. Selon Zakaria Aboudahab, ce succès diplomatique témoigne de l’efficacité de la stratégie marocaine, qui combine à la fois la diplomatie multilatérale et la défense ferme de ses intérêts nationaux.
Renforcement des relations avec les États-Unis
La réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis représente un tournant majeur pour la diplomatie marocaine. Selon Aboudahab, «le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche pourrait renforcer considérablement les relations bilatérales entre les deux pays, notamment sur le plan opérationnel et économique». Il souligne que le consulat de Dakhla, un projet stratégique lancé en 2023, constitue un point d’ancrage crucial dans cette dynamique.
Par ailleurs, l’initiative américaine de l’atlantique mise en place par les États-Unis en septembre 2023, un projet en forte corrélation avec les objectifs marocains, pourrait dynamiser cette coopération. «L’initiative marocaine et celle des États-Unis ne se contredisent pas, mais se chevauchent et permettent d’entrevoir une évolution rapide des relations grâce à des actions concrètes», précise Aboudahab. Ce rapprochement entre les deux nations, fondé sur des projets communs, augure d’une ère nouvelle dans la diplomatie marocaine avec les États-Unis.
Partenariat renforcé avec L’Union européenne
Sur le plan européen, le Maroc continue de travailler à la consolidation de ses relations avec l’Union européenne (UE), tout en restant attentif aux évolutions légales et institutionnelles. «La reprise de la coopération sectorielle est essentielle», observe Aboudahab, notamment à travers la réactivation de la coopération parlementaire entre le parlement marocain et européen. Cette reprise représente un signal positif pour 2025, année où les deux entités devraient approfondir leur partenariat dans plusieurs domaines clés.
Cependant, la décision de la Cour de justice de l’Union européenne, rendue le 4 octobre 2024, pourrait marquer une nouvelle étape dans les relations bilatérales. Cette décision, qui pourrait affecter les accords commerciaux entre le Maroc et l’UE, devra être gérée avec prudence. Malgré ces défis juridiques, «les principales institutions européennes soutiennent néanmoins le partenariat avec le Maroc, convaincues de la nécessité de préserver les acquis et de renforcer les relations multisectorielles», affirme le professeur.
Le Maroc en Afrique
En Afrique, le Maroc continue d’affirmer sa position en tant qu’acteur incontournable. Aboudahab insiste sur l’importance de l’Union africaine comme plateforme stratégique, mais aussi sur le développement des relations bilatérales avec des pays clés du continent. Une avancée significative a été l’annulation de la reconnaissance de la prétendue RASD par le Ghana, un geste qui ouvre de nouvelles opportunités pour le Maroc dans sa diplomatie en Afrique.
«Le retrait de la reconnaissance ghanéenne est un signal fort qui témoigne de l’évolution des rapports politiques en Afrique, et cela ouvre des perspectives intéressantes pour le Maroc», explique Aboudahab. La rencontre marquante de 2015 au sein de la Commission de la vie et de la santé, selon lui, a pavé la voie à un renforcement des relations avec plusieurs pays africains, consolidant la place du Maroc sur le continent.
Rôle central au Moyen-Orient
Sur le plan régional, le Maroc est appelé à jouer un rôle majeur dans les négociations de paix au Moyen-Orient. Aboudahab voit dans l’engagement marocain un levier pour instaurer une paix durable. «Le Maroc pourrait soutenir la relance des accords d’Abraham, une initiative à laquelle l’ancien président américain Donald Trump a consacré beaucoup d’énergie», commente-t-il. L’implication marocaine dans ces démarches diplomatiques pourrait permettre de rapprocher les positions des différents acteurs et d’établir un équilibre fragile mais nécessaire dans la région.
Cependant, l’analyste n’ignore pas les défis posés par le conflit Israël-Gaza, qui a profondément affecté la région depuis octobre 2023. «Bien que le Maroc soit profondément touché par ce conflit, nous restons optimistes, notamment après l’instauration récente d’un cessez-le-feu», poursuit-il. Cette situation complexe pourrait toutefois offrir au Maroc l’occasion de jouer un rôle clé dans le rétablissement de la paix et la stabilité au Moyen-Orient.
Infrastructures et ambitions intérieures
L’infrastructure reste au cœur de la diplomatie marocaine, comme le souligne Zakaria Aboudahab. «Une diplomatie efficace repose sur des infrastructures solides», rappelle-t-il, insistant sur l’importance de l’achèvement des grands projets nationaux en parallèle des actions diplomatiques à l’étranger. Avec la Coupe d’Afrique des Nations prévue pour décembre 2025, le Maroc s’engage à accélérer la réalisation de ses projets d’infrastructure, tels que l’extension de la ligne à grande vitesse, l’amélioration des aéroports et le développement des ports et autoroutes. Ces initiatives viseront à consolider le positionnement du Maroc en tant que hub stratégique en Afrique.
L’année 2025, selon Aboudahab, est une année d’accélération et de consolidation pour le Royaume. «De nombreux projets devront être réalisés pour propulser le Maroc parmi les nations développées», conclut-il. Il ne fait aucun doute que ces efforts internes, conjugués à une diplomatie active et à des partenariats stratégiques, seront déterminants pour l’avenir du pays sur la scène internationale.