Le double langage du pouvoir algérien vis-à-vis du Maroc
Participer à la COP 22 et envoyer en même temps une task force pour la saboter, faire une déclaration en grande pompe se disant prêt à régler tous les différents avec « le pays frère », le Maroc, tout en s’activant à saper ses efforts de réintégration de l’Union africaine, tels sont les traits qui marquent l’attitude pour le moins schizophrénique qu’entretient le pouvoir algérien à l’égard du Maroc.
Un tel comportement jette, de par sa duplicité, le doute sur la sincérité de ces déclarations et dénote un manque de volonté réelle de se départir du complexe de l’hégémonie régionale imaginaire héritée de l’ère Boumediene, reliquat de la guerre froide.
Les manoeuvres du pouvoir algérien autour de la COP 22 ont commencé par une vaste campagne sur «l’exploitation» des richesses du Sahara, avec à la clé, la publication d’un rapport d’une ONG travaillant pour son compte à Bruxelles accusant le Maroc de « piller » le vent et le soleil du sud, ce qui a fait ricaner plus d’un.
En outre, l’Algérie a dépêché à la veille de la conférence, une soi-disant « députée sahraouie » pour chahuter l’événement mais la vigilance des autorités marocaines était là pour déjouer la manœuvre.
Ne perdant pas espoir, les services de renseignement algériens ont toutefois réussi à faire accréditer à la conférence un de leurs miliciens sous la bannière d’une soi-disant ONG britannique, qui n’est autre qu’une antenne d’Alger sous un acronyme anglais, qui voulait se rendre à Laayoune afin d’y semer la zizanie, mais là aussi le stratagème a été contré et la pseudo ONG empêchée d’agir.
Dans le même registre des agaceries algériennes, la presse a simulé un scenario de crise diplomatique entre les deux pays en raison de l’accueil de « la très haute délégation » de l’Algérie à l’événement par, dit-elle, «un ministre de second rang», sans compter la production éditoriale hallucinante que cette presse aux ordres a orchestrée contre le Maroc et ses intérêts avant, pendant et après l’événement.
La stratégie ingénieuse du Maroc en Afrique et ses succès indéniables sur la scène internationale constitue l’autre sujet qui fait jaser Alger.
S’appuyant sur la plume haineuse des spécialistes du Maroc, le pouvoir algérien montre qu’il ne voit pas d’un bon œil la politique du Royaume envers l’Afrique.
Dépité en mesurant ses échecs à l’aune des performances économiques réalisées par le Maroc et de ses victoires diplomatiques, notamment sur le plan africain, il a même été jusqu’à tenter de saboter la réintégration du Royaume de sa famille institutionnelle. Il aura fallu l’intervention de SM le Roi Mohammed VI auprès du président en exercice de l’UA pour que la demande du Maroc sorte du tiroir de la présidente de la commission africaine et soit transmise aux pays-membres de l’organisation.
Si le processus d’adhésion d’un État à l’UA ne dépasse pas trois semaines entre le dépôt de la demande et la notification finale d’admission, pour le cas du Maroc, ce délai a été largement dépassé, ce qui signifie que des manipulations ont été orchestrées à l’intérieur de l’organisation pour perturber le retour du Maroc.
Mais qu’est ce qui explique l’acharnement du pouvoir algérien contre le Royaume ?
Dans un article publié récemment, le Matin d’Algérie affirme que les pouvoirs publics algériens veulent concurrencer le Maroc en Afrique sans en avoir les moyens.
« Comment séduire les Africains, à la recherche de modernité, quand on ne possède même pas l’e-payement, que les trains comme les avions n’arrivent jamais à l’heure et qu’un président malade pense déjà à un cinquième mandat ? », s’est interrogé à juste titre le journal, notant que le pays n’a pas avec quoi honorer une quelconque relation avec l’Afrique.
Le journal algérien estime qu’il « serait miraculeux qu’un régime qui a réussi la gageure d’appauvrir sa population après 15 ans de rentrées financières exceptionnelles, qui n’a pas fait progresser d’un iota l’économie hors-hydrocarbures durant tout ce temps-là, un pouvoir qui a dilapidé 800 milliards de dollars sans édifier une seule usine, soit un modèle pour les nations africaines ».
Ironisant sur les propos du chef de la diplomatie algérienne qui a affirmé que l’Algérie est le plus grand pays africain et arabe, « Le Matin d’Algérie » se demande dans quel domaine, notant que pour aller vers l’Afrique, l’Algérie doit avoir des choses à lui proposer comme par exemple « un projet à partager, des banques et des entreprises modernes, une diplomatie novatrice, une vision, un plan d’action, une patiente stratégie de rapprochement. Tout ce que l’Algérie de Bouteflika n’a pas ».
Et d’ajouter que « l’Algérie, aujourd’hui, après quatre mandats du clan Bouteflika, est un pays sans influence, sans ambition, sans envergure ».
Cette analyse rejoint celle de nombreux groupes de réflexion et de prescripteurs d’opinion à travers le monde qui tirent la sonnette d’alarme quant à la situation économique et sociale explosive de l’Algérie.
Le think tank espagnol Real Instituto Elcano a récemment mis en garde contre la reproduction du scénario des « événements catastrophiques » des années 1980 qui plane sur « une Algérie gravement affectée » par le net recul des prix du brut et les répercussions néfastes sur la sécurité régionale, particulièrement au Sahel et dans la Méditerranée occidentale.
Le même constat est partagé par le groupe de réflexion européen « International Crisis group », dans un rapport publié, lundi à Bruxelles, qui exprime de sérieuses inquiétudes quant à la situation dans le pays.
Dans un rapport intitulé «Sud de l’Algérie : turbulences à l’horizon », le rapport de ce think tank européen souligne que l’Algérie, confrontée aux défis économiques les plus importants des dernières décennies en raison du recul de la production pétrolière et de la baisse des prix internationaux, « est de moins en moins en mesure de substituer la dépense publique à une politique inclusive et à la bonne gouvernance».
Et d’ajouter que « les autorités centrales d’Alger, qui ont tendance à regarder le mécontentement local avec méfiance, sous-estiment son ampleur. Elles continuent de raisonner en termes de subventions, de répression et de maintien de l’ordre ».