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L’entrepreneuriat marocain sous l’impulsion du Private Equity

Le Maroc connaît une transformation de son paysage économique grâce à l’essor du capital-investissement. Bien que ce secteur soit encore jeune par rapport aux normes internationales, il s’affirme comme un pilier majeur de la politique d’investissement du Royaume. Avec des résultats prometteurs et des acteurs de plus en plus dynamiques, le capital-investissement marocain joue un rôle clé dans le financement des entreprises, la création de valeur et le renforcement de l’économie nationale. Dans un écosystème en pleine évolution, les fonds de capital-investissement régulés prennent la forme d’OPCC, tandis que ces derniers, ainsi que leurs sociétés de gestion, sont encadrés par l’AMMC.

Le Private Equity  consiste à injecter des fonds dans des entreprises non cotées en échange d’une participation au capital. Ces entreprises, souvent en phase de croissance, de restructuration ou d’innovation, bénéficient ainsi des ressources financières et de l’expertise nécessaires pour accélérer leur développement. Au Maroc, ce mécanisme s’est imposé comme une solution adaptée aux besoins des PME et des start-ups, qui constituent l’épine dorsale de l’économie nationale.

Selon les données recueillies, le marché marocain du Private Equity a mobilisé 14 milliards de dirhams au cours des 23 dernières années, avec plus de 280 entreprises financées. Cela représente une moyenne de 12 opérations par an, pour un ticket moyen de 500 millions de dirhams. Bien que ces chiffres soient modestes comparés à ceux de la France (où plus de 2 500 levées de fonds ont été réalisées en 2023), ils témoignent d’un potentiel de croissance considérable, surtout si l’on tient compte de la proportionnalité du PIB marocain.

L’écosystème marocain du Private Equity est animé par une vingtaine de sociétés de gestion de fonds d’investissement, dont certaines figurent parmi les plus anciennes et les plus influentes du continent africain. Parmi elles, on retrouve des noms emblématiques tels que AfricInvest, CDG Capital et Méditerranéa Capital. Ces acteurs ont levé plus de 60 fonds d’investissement depuis les années 2000, pour un total de 22 milliards de dirhams. Ils réalisent en moyenne une vingtaine d’opérations par an, couvrant des secteurs variés tels que l’industrie, les services, les technologies et l’agroalimentaire.

Le rôle de l’AMMC dans la régulation des OPCC

Le secteur du capital investissement au Maroc connaît une transformation majeure, en grande partie grâce à l’intervention de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC), qui joue un rôle central dans la régulation des Organismes de Placement Collectif en Capital (OPCC). Ces véhicules d’investissement, supervisés par l’AMMC, ont permis de structurer et de sécuriser le marché du capital investissement, offrant ainsi aux investisseurs une alternative régulée plus transparente et plus stable. En effet, bien que le capital investissement puisse exister sous une forme non régulée, les investisseurs privilégient aujourd’hui les OPCC en raison de la supervision stricte de l’AMMC, garantissant un environnement juridique sécurisé. Cette tendance se reflète dans les chiffres : en cinq ans, le nombre de sociétés de gestion agréées a augmenté de plus de 45%, tandis que le nombre d’OPCC a progressé de plus de 166%, témoignant d’un intérêt croissant pour ces structures régulées.

Cette dynamique a été renforcée par les actions de l’AMMC visant à améliorer le cadre juridique du capital investissement. L’AMMC a accompagné le législateur dans l’amendement de la loi régissant les OPCC, afin de l’aligner sur les standards internationaux les plus rigoureux. De plus, l’AMMC a facilité le processus d’autorisation des OPCC en mettant à disposition des sociétés de gestion des modèles de règlement de gestion standardisés, ce qui simplifie également la levée de fonds. Un nouveau projet de circulaire, en cours d’élaboration, devrait venir encadrer l’activité des OPCC en précisant les obligations des sociétés de gestion et les modalités de fonctionnement des fonds, afin de garantir un cadre juridique optimal.

Dans ce contexte, le lancement du Fonds Marocain de l’Industrie et de l’Innovation (FM6I) marque une étape clé pour stimuler la croissance économique du pays. Ce fonds vise à soutenir les entreprises marocaines dans des secteurs stratégiques en apportant un financement par le biais d’OPCC, consolidant ainsi l’essor du capital investissement régulé au Maroc. Par ailleurs, Casablanca Finance City (CFC) ambitionne de devenir un hub financier régional et international, offrant aux entreprises un cadre fiscal attractif pour s’implanter au Maroc, et renforcer ainsi le rôle du pays en tant que pôle d’investissements en Afrique du Nord.

L’essor porté par le Capital-investissement

Le dernier rapport de l’Association Marocaine des Investisseurs en Capital (AMIC) dresse un bilan détaillé de la croissance des entreprises financées par le capital-investissement entre 2000 et 2023. Les données dévoilent une tendance résolument positive, illustrant l’impact de ce mode de financement sur le développement des entreprises marocaines.

Selon les chiffres révélés, le taux de croissance annuel moyen (TCAM) du chiffre d’affaires des entreprises investies a atteint 18,8 % à la fin de l’année 2023, contre 18,4 % en 2022 et 18,3 % en 2021. Cette progression constante témoigne de la dynamique enclenchée par le capital-investissement dans le tissu entrepreneurial national.

L’analyse des performances par stade d’investissement révèle des écarts notables. Les entreprises en phase de transmission enregistrent une croissance modérée avec un TCAM de 7 %, tandis que celles en phase de développement affichent une progression plus soutenue de 16 %. Toutefois, la véritable accélération se manifeste dans le segment de l’amorçage et du capital-risque, où la croissance atteint un impressionnant 100 % en moyenne. Cette envolée traduit le potentiel considérable des jeunes entreprises bénéficiant d’un appui financier à un stade précoce.

Le rapport met également en exergue des disparités sectorielles marquées. Certaines industries se démarquent par des performances exceptionnelles, tandis que d’autres affichent une croissance plus mesurée. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) s’imposent en tête, avec un TCAM de 39 %. Elles sont suivies par le secteur de la santé, en plein essor, qui affiche une progression de 32 %, portée par la demande croissante en services médicaux et pharmaceutiques.

Les services connaissent également une dynamique notable, avec une croissance de 24 %. En revanche, les industries diverses, incluant la métallurgie et la pharmacie, ainsi que le secteur du BTP, enregistrent une hausse plus modérée de 14 %. Enfin, les secteurs traditionnels tels que l’industrie automobile et la distribution affichent respectivement des TCAM de 10 %, tandis que l’agroalimentaire enregistre une progression plus contenue de 9 %.

Une accélération marquée par la hausse des exportations

L’impact du capital-investissement ne se limite pas à la seule expansion du chiffre d’affaires des entreprises investies. Le rapport 2023 de l’AMIC met en évidence une croissance nettement plus rapide pour ces entreprises comparées aux sociétés cotées en bourse ou encore à l’économie nationale dans son ensemble.

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En 2023, les entreprises investies par les fonds d’investissement ont enregistré une augmentation moyenne de leur chiffre d’affaires de 22,3 %. À titre de comparaison, les sociétés cotées en bourse ont affiché une progression limitée à 4,4 %, tandis que la croissance du PIB national s’est établie à seulement 3,4 %. Ces écarts considérables démontrent l’apport déterminant du capital-investissement dans l’expansion des entreprises et leur compétitivité sur le marché.

Par ailleurs, le développement des exportations constitue un levier stratégique pour les entreprises bénéficiant de cet accompagnement financier. En 2023, 35 % des entreprises investies ont réalisé des ventes à l’international. Le poids de l’export dans leur chiffre d’affaires a progressé de manière significative, atteignant 44 %, contre 39 % en 2022. Cette évolution atteste du rôle moteur du capital-investissement dans l’internationalisation des entreprises marocaines.

Un impact fiscal considérable

Outre son effet sur la croissance et les exportations, le capital-investissement contribue substantiellement aux finances publiques par le biais de la fiscalité des entreprises. Le rapport de l’AMIC met en lumière une hausse marquée de la contribution fiscale des sociétés accompagnées par les fonds d’investissement.

Entre l’année d’entrée dans le fonds et celle de la sortie, le montant total des impôts et taxes collectés (incluant l’impôt sur les sociétés, l’impôt sur le revenu, la TVA et divers prélèvements) a bondi de 1,935 milliard de dirhams à 4,912 milliards de dirhams, soit une multiplication par 2,5 en moyenne.

L’impôt sur les sociétés (IS) a connu une progression spectaculaire, passant de 936 millions à 2,6 milliards de dirhams, soit une augmentation de 2,8 fois. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) a enregistré une hausse encore plus marquée, multipliée par 3,4, atteignant 1,315 milliard de dirhams. Quant à l’impôt sur le revenu (IR), il a progressé de 1,4 fois, pour s’établir à 457 millions de dirhams. Les autres impôts et taxes ont également connu une augmentation notable, passant de 293 à 540 millions de dirhams.

Ces tendances témoignent de la montée en puissance des entreprises investies et de leur structuration progressive. En moyenne, ces sociétés bénéficient d’un accompagnement sur une période de six ans, au cours de laquelle elles renforcent leur solidité financière, optimisent leur gouvernance et gagnent en compétitivité.

L’année 2023 confirme cette trajectoire, avec une progression supplémentaire de 450 millions de dirhams des impôts et taxes collectés par rapport à 2022. Ces résultats viennent consacrer le rôle fondamental du capital-investissement dans le renforcement du tissu économique marocain et sa contribution au financement des finances publiques.

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