Fête du Trône à Paris : Chakib Benmoussa exalte la proximité maroco-française et la volonté commune de relever les multiples défis
La Fête du Trône, célébrée au Maroc et dans les autres pays étrangers, a constitué l’occasion pour les représentants diplomatiques du Royaume du Maroc de prononcer des discours. L’ambassadeur du Maroc à Paris, Chakib Benmoussa, qui a accueilli un nombre impressionnant d’invités français à cette célébration, dont notamment le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a prononcé une importante allocution, sorte de bilan et mise en perspective des relations privilégiées qui existent entre la France et le Maroc .
Voici le texte intégral de cette intervention
Mesdames et messieurs les Ministres et Secrétaires d’Etat, Mesdames et Messieurs les ambassadeurs, Mesdames et Messieurs les Députés, Sénateurs et Maires, Mesdames et Messieurs les représentants des corps d’Etat, Excellences, Chers amis
Il m’est agréable de vous accueillir, si nombreux ce soir, à l’occasion de la célébration du dix-huitième anniversaire de l’intronisation de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Merci à vous tous, qui par votre présence, témoignez de la considération et de l’importance que vous portez à l’amitié marocco-française. Merci Monsieur le Ministre, pour votre participation à cette réception ; je sais votre emploi du temps très chargé et mesure l’amitié et la sympathie associées à votre présence à la fête nationale du Royaume du Maroc.
La célébration de la Fête du trône renvoie au renouvellement du pacte d’allégeance et au raffermissement des liens profonds et multiséculaires entre le peuple marocain et ses souverains. Elle représente un moment fort de communion et incarne l’esprit fondateur de la Nation marocaine. Elle symbolise son unité, sa stabilité, sa diversité et ses valeurs profondes de paix, de respect et de tolérance.
Elle constitue également, comme l’a souligné Sa Majesté le Roi dans le discours du Trône de samedi dernier, l’occasion de s’arrêter sur l’état de la Nation, de faire le point sur les réformes politiques et institutionnelles telles que projetées par la constitution de 2011 ainsi que les projets de développement au service du citoyen.
Le Maroc et la France sont des amis fidèles et complémentaires. L’histoire commune et apaisée ainsi que la densité de nos relations humaines, constituent les principaux piliers d’une relation intelligente, constante et résolument tournée vers l’avenir.
Le dialogue politique régulier et de haut niveau qu’entretiennent les deux pays, transcende les périodes de transition politique et garantie la continuité stratégique du partenariat ainsi que son approfondissement. C’est le sens de la récente visite d’amitié et de travail effectuée par le Président de la République française au Maroc, qui fut parmi ses premiers déplacements à l’étranger et qui constitue l’illustration de cette proximité singulière ainsi qu’un geste d’amitié grandement apprécié par le peuple marocain.
C’est le sens également de la coopération soutenue entre nos services de sécurité, de renseignement et de justice pour lutter contre le terrorisme et qui va de pair avec nos efforts pour prévenir la radicalisation et promouvoir la véritable image de l’islam.
Le partenariat Maroc-France, c’est aussi un partenariat économique fort. On ne peut que se réjouir que dans un contexte d’ouverture croissante de l’économie marocaine sur le reste du monde, la France demeure le premier partenaire du Maroc. Les projets en co-localisation, développés ces dernières années, s’inscrivent dans des logiques de partage de chaines de valeur et de compétitivité partagée permettant de conforter et d’élargir les parts de marché.
Les actions dans les domaines de l’Education et de la formation professionnelle ou l’installation des grandes filières universitaires françaises d’excellence au Maroc constituent un axe de coopération qu’il convient de consolider et d’approfondir de par son impact sur la jeunesse et son intégration et de par sa contribution aux objectifs de la francophonie.
Je voudrais aussi saluer la coopération parlementaire et la coopération décentralisée entre nos régions et nos villes et souligner le rôle essentiel qu’elles jouent notamment pour promouvoir les liens entre élus de la nation et entre élus territoriaux des deux pays.
Comme vous le savez Monsieur le Ministre, le Maroc et la France, c’est aussi une communauté de destin et de bon voisinage, permettant aux deux pays de se retrouver sur les grandes questions et de coordonner leurs actions pour relever, de manière lucide, les nombreux défis auxquels fait face notre région euro-méditerranéenne et africaine.
Les deux pays ont multiplié les efforts pour inscrire l’Accord de Paris sur le climat dans une dynamique vertueuse et irréversible, malgré le scepticisme de certains. Dans le prolongement de la COP21, l’organisation de la COP22, le mois de novembre 2016 à Marrakech, a abouti à la mise en place d’un agenda de l’action, qui montre combien à coté des Etats, les territoires, les opérateurs économiques ou les acteurs de la société civile sont engagés dans la lutte contre les changements climatiques. L’Afrique, continent faiblement émetteur de GES, n’est pas en reste et s’engage dans cette lutte planétaire à travers de multiples initiatives comme celle sur l’énergie renouvelable ou l’Initiative pour l’Adaptation de l’Agriculture Africaine.
L’avenir des relations France-Maroc, c’est également l’Afrique, continent pour lequel le Maroc s’est fortement engagé et mène des actions convergentes, pour la stabilité, la sécurité et le développement. Les multiples visites royales sur le continent, le retour du Maroc à l’Union Africaine et sa demande d’adhésion à la CEDEAO ont dynamisé l’action institutionnelle du Maroc sur le continent et permettent de développer une coopération multidimensionnelle sud-sud mais aussi une coopération tripartite gagnant-gagnant au service de la jeunesse africaine et de son émancipation.
Un autre défi qui nous interpelle est celui des drames humains que connait régulièrement la Méditerranée. A cet égard, le Maroc a été parmi les premiers pays ayant exprimé son adhésion au concept de co-responsabilité, avec des résultats probants, et mène une politique migratoire inédite où la dimension humaine et l’intégration sont fortement présentes, ce qui explique qu’il ait été chargé par l’Union africaine de piloter une réflexion sur le sujet.
Le socle de la Nation marocaine s’appuie sur des institutions à forte légitimité et sur une continuité historique indéniable, permettant d’impulser les changements et de les inscrire dans le temps long qui est nécessaire à leur réussite. Construisant sur les acquis, étape après étape, dans le respect de son histoire et de sa réalité sociale, le Maroc poursuit des politiques publiques volontaristes pour répondre aux aspirations de sa population à une vie libre et digne.
Le processus de renforcement de l’indépendance de la justice, de la protection des droits et libertés individuelles se poursuit aux côtés de la régionalisation avancée qui ouvre la voie à une gouvernance territoriale rénovée.
Le pari est de réussir ces réformes en veillant à ce que chaque institution joue le rôle qui est le sien dans une démarche d’engagement civique, de responsabilité et de reddition des comptes comme cela a été rappelé par Sa Majesté Le Roi lors du discours de la fête du Trône.
Avant de conclure, j’aimerai rendre hommage à la communauté marocaine installée en France qui est entourée par la Haute sollicitude de SM le Roi Mohammed VI. Elle reste attachée à son pays d’origine et à son pays d’accueil et participe pleinement au rayonnement du Maroc et de la France. Permettez-moi également de remercier nos amis français, hommes et femmes politiques, représentants du monde économique, des collectivités territoriales, de la société civile qui par leur dynamisme et leurs initiatives confortent et renouvellent la relation France-Maroc. Une relation à la hauteur de nos ambitions, ouverte sur son environnement et confiante en son avenir.
Jean-Yves Le Drian : La relation privilégiée entre la France et le Maroc est solidement ancrée dans l’Histoire
« Je suis heureux et honoré d’être parmi vous. Comme chaque année, la Fête du Trône a réuni hier tous les Marocains autour de leur Roi, de leur drapeau, de leurs institutions et de leurs traditions. Je suis ravi d’être avec vous pour partager ce moment ce soir, en amitié, puisque vous nous honorez de la légendaire hospitalité du Royaume chérifien.
Depuis dix-huit ans, le Maroc est engagé dans un processus de réformes ambitieux. Il vise la modernisation des institutions, avec la mise en œuvre de la réforme constitutionnelle de 2011, l’émergence économique, avec l’insertion du Maroc dans les réseaux d’échange de la mondialisation et, enfin, le développement social et territorial, avec les programmes de lutte contre les inégalités et l’initiative de régionalisation avancée.
Au nom du Président de la République, Emmanuel Macron, et de l’ensemble du Gouvernement français, je souhaite, Monsieur l’Ambassadeur, que vous exprimiez nos plus vives félicitations à Sa Majesté le Roi MOHAMMED VI, et que vous lui transmettiez nos vœux sincères de réussite et d’accomplissement.
Chers amis,
La relation privilégiée entre la France et le Maroc est solidement ancrée dans l’Histoire ; elle est faite des liens étroits que nos deux peuples ont su nouer au fil des générations ; aujourd’hui, elle est, je le crois, placée sous les meilleurs auspices. Ce moment d’amitié que nous partageons en témoigne avec éclat.
En se rendant à Rabat les 14 et 15 juin, un mois seulement après son investiture, le Président de la République a tenu à réaffirmer toute l’importance politique et stratégique de notre partenariat. Aujourd’hui, le Maroc et la France font face ensemble aux défis du monde présent et à venir.
Dans les enceintes régionales et multilatérales, la France et le Maroc travaillent main dans la main pour protéger leurs intérêts respectifs et défendre des positions communes. Nous avons le même souci de promouvoir l’ouverture et le dialogue là où la stabilité et la paix sont menacées. C’est le cas s’agissant de la Libye, où nos deux pays ont activement contribué au dialogue entre les parties et à la recherche d’une solution inclusive et durable. Bien souvent, nos efforts ont permis d’enregistrer des avancées décisives, comme en 2015, à Skhirat, et comme il y a quelques jours, à La Celle Saint Cloud.
Oui, nous partageons le même attachement à la paix et à la sécurité. Je veux saluer la contribution essentielle du Maroc aux opérations de maintien de la paix en Afrique, avec plus de 1.600 soldats engagés. Ces derniers jours, trois soldats marocains de la MINUSCA ont perdu la vie dans deux attaques successives à Bangassou, en République centrafricaine. Je veux leur rendre un hommage solennel, au nom du Gouvernement de la République française, en même temps qu’à tous leurs frères d’armes qui agissent aujourd’hui pour la paix. La France condamne cette attaque avec la plus grande fermeté. Ses auteurs devront être traduits en justice.
La responsabilité de protéger nos populations nous appelle à combattre le terrorisme et la radicalisation avec autant de détermination que de fermeté. Je souhaite que nous renforcions davantage encore notre coopération anti-terroriste, notamment entre services de renseignement. Nous devons aussi développer l’interopérabilité de nos forces armées pour continuer la lutte contre Daech et Al Qaïda. C’est aussi de cette manière que nous pourrons empêcher que ces organisations terroristes n’étendent leur emprise sur d’autres zones, au Moyen-Orient, en Libye, et au Sahel. Une exigence doit nous animer : adapter nos instruments et nos formations, pour être à la hauteur de la menace dans tous les domaines, et notamment en matière de cyber-sécurité.
Le combat contre le Jihadisme, nous devons le mener également sur le plan culturel, sur le plan du savoir et de l’accès à la connaissance pour empêcher la radicalisation de ceux, je pense tout particulièrement à la jeunesse de nos pays, qui pourraient basculer dans cette idéologie mortifère et destructrice. Autant il peut être simple d’anéantir une force matérielle, autant il est difficile de venir à bout d’une idéologie, et le Jihadisme qui tire aussi sa force de son système de pensée dogmatique et totalitaire. Il y a donc un combat idéologique à mener.
Sa Majesté le Roi a vigoureusement condamné ceux qui détournent la foi pour tuer des innocents. Dans cette bataille, les hommes de religion ont un rôle important à jouer. C’est pourquoi nous devons accroître notre coopération et un dialogue approfondi sur le thème de la prévention de la radicalisation.
L’autre grand enjeu de notre temps, nos deux pays l’ont compris, c’est la sauvegarde de la planète et la transition vers un modèle de développement durable et respectueux de l’environnement. A l’heure du retrait américain de l’accord de Paris, nous sommes déterminés, la France et le Maroc, à assurer la mise en œuvre irréversible et universelle de cet accord décisif pour notre avenir commun. C’est le sens du sommet que le Président de la République a annoncé pour le 12 décembre prochain. Je sais que nous pourrons compter sur le soutien et l’engagement du Maroc à nos côtés.
La prise en compte du climat représente aussi un formidable enjeu d’attractivité. Les projets que nous menons ensemble dans le domaine des énergies renouvelables et de la mobilité douce réunissent nos investisseurs, nos ingénieurs, nos chercheurs, nos entreprises. L’Agence française de développement consacre la moitié de son activité à la priorité Climat, avec des co-financements au profit de la grande centrale solaire de Ouarzazate, des Instituts de formation aux métiers des énergies renouvelables, et des modes de transport à faible taux d’émission, comme les tramways de Rabat et de Casablanca, et la ligne à grande vitesse entre Tanger et Kénitra. Un nouveau modèle de développement est en train d’émerger et les nouvelles générations y prendront toute leur part.
C’est pourquoi la jeunesse devra rester au cœur de nos projets. Je pense au développement de sections internationales dans près de 700 lycées marocains, avec l’appui d’Expertise France. Je pense aux fleurons de l’enseignement supérieur qui ont fait le choix du Maroc, comme l’Ecole centrale de Casablanca ou le nouveau campus Afrique-Atlantique de l’ESSEC à Rabat, inauguré en avril dernier. Je souhaite que nous puissions améliorer encore cette coopération afin de donner à la jeunesse les clés qui lui permettront d’évoluer et d’entreprendre dans un environnement plus connecté, plus mobile et de plus forte concurrence.
Avant de conclure, je tiens enfin à vous mettre l’accent sur la culture, cet élément fondamental du dialogue et de l’amitié entre nos peuples. Elle devra continuer d’animer et de rassembler nos sociétés. Les relations culturelles et artistiques entre la France et le Maroc sont d’une densité et d’une richesse exceptionnelles, à la mesure de nos histoires et de nos patrimoines respectifs. Nous l’avons encore constaté en 2017, avec le Maroc invité d’honneur du Salon du Livre de Paris, la grande exposition Picasso au Musée MOHAMMED VI de Rabat et la saison culturelle de l’Institut français du Maroc, marquée cette année par plus de 800 manifestations culturelles et artistiques.
Chers amis,
La France et le Maroc ont un défi enthousiasmant à relever : maintenir une coopération de la plus haute intensité, tout en la faisant évoluer, pour la faire grandir ; à cet effet, je souhaite que nous consolidions ensemble les principes fondamentaux de notre partenariat, tout en traçant de nouvelles perspectives.
Je pense notamment aux projets de coopération que nos deux pays peuvent mener en direction de l’Afrique. C’est un travail que je souhaite mener, avec mon homologue, M. Nasser BOURITA, dès mon prochain déplacement au Maroc à la rentrée.
Nous aurons besoin de l’énergie de tous, et je saisis cette occasion pour saluer les 50.000 Français établis au Maroc ainsi que les Marocains – un million et demi – qui ont fait le choix de la France et qui apportent leur énergie et leurs talents à notre pays. Car ce sont les liens humains qui font la force et la pérennité de notre relation. Je vous souhaite à tous une excellente soirée.
Vive le Maroc, vive la France, vive l’amitié franco-marocaine! »