Flambée du prix du baril du pétrole : quels sont les risques ?
Ababacar Sadekh Top
Le prix du baril du pétrole est en train de flamber et d’après les experts il peut atteindre la barre des 100 dollars. Les conséquences ne manqueront sûrement pas et pourront asphyxier les secteurs porteurs de croissances. Selon des experts que nous avons rencontrés, en cas de crise pétrolière, les économies des pays en voie de développement et non producteurs de pétrole seront menacées.
La plupart des États essentiellement importateurs de pétrole se demandent quel sera leur sort si le baril de Brent de 72 dollars, actuellement, venait à atteindre le seuil des 100 dollars. En effet, selon Jean Pierre NOEL, Ancien Secrétaire Général du Groupement Professionnel de l’industrie du Pétrole (GPP) au Sénégal, le risque d’atteindre, voire d’excéder les 100 dollars est une éventualité si les tensions géopolitiques actuelles persistaient et si la flambée observée depuis le 07 août 2018 perdurait. Dans un tel contexte, la flambée du baril se présente comme un choc extérieur négatif pour l’économie, entraînant une baisse des importations en volume, une augmentation du prix des consommations intermédiaires et surtout une diminution de la demande extérieure adressée au pays. Pour les pays en voie de développement comme le Maroc, les conséquences directes sont prévisibles à un triple niveau.
en cas de crise pétrolière, les économies des pays en voie de développement et non producteurs de pétrole seront menacées.
Au plan macroéconomique, selon notre expert, les conséquences peuvent avoir un renchérissement des importations en valeur, une détérioration de la balance commerciale et des paiements, une hausse du niveau général des prix (inflation), une réaction des autorités monétaires, (réajustement du taux d’in-térêt), en cas de hausses élevées et fréquentes des prix et une augmentation du déficit public (consécutif au blocage des prix à la consommation des produits pétroliers).
Au plan méso-économique, que constitue les secteurs par branche d’activités, la flambée des prix du pétrole peut avoir des répercussions sur la hausse du baril sur les intrants, les facteurs de production (eau, électricité…). Aussi, faut-il prévoir une hausse des consommations intermédiaires dans les secteurs « énergivores ». Là, il s’agit de l’augmentation des coûts de production, de la baisse de la contribution ou de la valeur ajoutée de la branche d’activité.
Au plan microéconomique qui con-cerne directement les ménages et les entreprises, les conséquences peuvent être désastreuses avec la possible baisse des revenus des ménages, celle-ci étant consécutive à la baisse des revenus des entreprises. D’où, comme on peut l’imaginer, les effets de la hausse du baril ainsi que l’ampleur de leurs répercussions, dépendront de l’état réel de l’économie (en croissance, en récession ou en reprise) et de la situation monétaire et financière du moment. Compte tenu des conséquences négatives sur la compétitivité et sur le taux de croissance, une attention soutenue sera accordée à l’évolution du baril par les États importateurs -tributaires de l’extérieur, pour éviter l’installation d’une situation inflationniste, de nature à fragiliser non seulement la monnaie mais encore à générer une baisse de la croissance économique.
Au plan microéconomique qui oncerne directement les ménages et les entreprises, les conséquences peuvent être désastreuses.
Les conséquences sur la production industrielle
La hausse du baril augmente le prix des consommations intermédiaires et affecte négativement la production. Les consommations intermédiaires représentent les intrants et les produits raffinés issus du pétrole brut comme le gasoil, le diesel oil et les fuels oil, consommés par les entreprises industrielles (ONEE pour la production de l’électricité). L’augmentation du pétrole brut, en entraînant celle du prix des consommations intermédiaires, génère des effets négatifs sur la production industrielle (comme le relèvement du coût de la production).
Pour Jean Pierre NOEL, outre ces effets directs (découlant de l’augmentation du Brent), il y a lieu de noter que ceux-ci peuvent être amplifiés par les facteurs spécifiques au marché des produits raffinés. C’est pourquoi, bien qu’une corrélation existe entre le marché du brut et celui des produits raffinés, il faudrait noter que les conséquences sur les prix sont plus importantes et significatives au stade de la production finale.
L’influence du baril sur les secteurs de la vie économique
L’augmentation du baril influe sur tous les secteurs de la vie économique, dans la mesure où le pétrole est la forme principale d’énergie utilisée. La mesure, par contre, de l’impact d’une augmentation du baril sur la croissance du pays, n’est pas chose aisée. Une étude a non seulement permis d’identifier les secteurs «énergivores» mais encore, d’estimer, pour chacune des branches d’activités, l’impact -prix et l’impact -taux de croissance de la hausse du pétrole. Ainsi, d’après l’étude, une augmentation du prix de 10% du baril engendre une poussée du niveau général des prix au Maroc. La flambée des prix peut être le plus défavorable, en général, aux branches qui sont les plus utilisatrices de ressources énergétiques. (Agro industries, Cimenteries, Bâtiments Travaux publics, Transport, Commerce). Par exemple, au niveau du secteur primaire (agriculture vivrière), une augmentation des prix de 0,05% se traduit par une perte de croissance de 0 ,06% au niveau du secondaire, (transformations et conservations de viandes et poissons, BTP – Constructions) l’augmentation respective des prix sur les branches de 0,050% et de 0,070% a entraîné pour les mêmes branches un repli du taux de croissance de 0,050 % et de 0,070%, et au niveau du tertiaire, les branches « Commerce », Transport et Administrations publiques ont le plus subi le choc.
En permettant d’identifier les secteurs à forte intensité d’énergie et de mesurer l’impact d’une hausse du pétrole à la fois sur le niveau général des prix et sur la croissance économique, de telles études sont à mener régulièrement, afin de mieux se prémunir contre les chocs exogènes