Incivisme croissant dans nos rues
Où est passé notre savoir-vivre? Les scènes quotidiennes d’incivisme, de non-respect, d’impatience et d’intolérance envers les personnes avec qui nous partageons l’espace public sont tellement monnaies courantes qu’elles deviennent normales au point où les témoins de ces débordements n’y prêtent presque plus attention. Un constat qui s’aggrave pendant le ramadan.
Une simple marche sur un trottoir de Casablanca pendant les heures de pointe peut devenir aussi infernale que de subir les bouchons de circulation. Tout un chacun s’approprie ce bout de pavé surélevé, marchant droit devant, ignorant les passants qui croisent leur chemin pour ne pas se déplacer d’un pouce, préférant ainsi heurter un piéton, puis continuer sa route sans s’excuser, plutôt que de céder un centimètre de largeur à celui qui traverse l’allée empruntée au même moment.
Au volant, les conducteurs ne conçoivent pas non plus la route comme un espace à partager. Autres automobilistes, motocyclistes, cyclistes et piétons sont perçus comme des obstacles ne devant pas entraver leur course folle contre la distance à parcourir. Un passant voulant traverser une rue doit donc s’armer de patience avant qu’un chauffeur s’arrête pour lui faire signe de passer devant. Et si un piéton décide de traverser pendant que les voitures sont au loin, celles-ci appuieront sur l’accélérateur au lieu de lever le pied.
Les petits taxis rouges de Casa sont probablement les pires conducteurs en ville. Leur non-respect du Code de la route nous donne l’impression d’être dans la voiture d’un jeu vidéo. Une voiture qui contourne chaque élément rencontré sur sa voie en zigzaguant pour se rendre à destination le plus rapidement possible. Adrénaline, stress, peur. Peur de perdre la vie, que nous avons confiée au taxieur le temps du trajet. Et même si tous les petits taxis sont munis d’un compteur, un bon nombre de chauffeurs omettent volontairement de l’activer lorsqu’un nouveau client prend place. S’en suit une série de négociations pour le prix à payer. Dans ces cas-là, le conducteur demande, la plupart du temps, un montant supérieur au tarif réel de la course, car il considère le passager comme un guichet automatique sans limites de fonds et non pas comme un être humain ayant une panoplie de factures à régler.
Lorsque vous faites vos courses dans un supermarché tel qu’Acima ou bien dans un souk, vous êtes certain d’assister à une engueulade ou d’en faire partie, et ce, particulièrement pendant le ramadan. Une période où tout le monde a faim, où les nerfs sont à vif, avec en prime, la chaleur et l’absence de climatisation. Dans la file menant à la caisse, les personnes se poussent et s’accrochent sans demander pardon. Avec les marchands, un simple malentendu peut mener à des bousculades et aux insultes. Chez l’épicier du coin, l’individu derrière vous essaie d’être servi avant vous et si vous avez le malheur de lui demander d’attendre son tour, il vous dévisagera, puis fera la sourde oreille. Ainsi, personne ne garde son calme sous prétexte qu’un estomac vide empêche de conserver son sang-froid.
Il ne s’agit là que de quelques exemples de comportements traduisant l’absence de civisme, non pas de la totalité d’entre nous, mais d’une bonne majorité. Des exemples simples, mais révélateurs d’une société qui aime se présenter comme étant tolérante et respectueuse. Or, elle ne l’est pas nécessairement dans les faits, et ce, spécialement lors du mois sacré. La cause est bien plus profonde qu’un estomac creux. Manque d’éducation, indifférence, individualisme… À quoi la faute?