Inflation : Les yeux rivés sur la Banque centrale de Russie
Dans un contexte inflationniste, les yeux sont rivés sur la prochaine réunion du Conseil d’administration de la Banque centrale de Russie (BCR), annoncée pour le 7 juin. Experts et opérateurs russes scrutent les prémices d’une augmentation du taux directeur.
Le taux directeur de la BCR avait été relevé à plusieurs reprises entre l’été et la fin d’année 2023, pour se maintenir à 16% lors de la dernière réunion de la Banque centrale de Russie fin avril. L’objectif affiché était d’enrayer l’inflation, la hausse des prix ayant officiellement atteint 7,8% au 22 avril, bien au-delà de la cible des 4% des autorités.
Si certains opérateurs économiques croient apercevoir une croissance des taux sur le marché interbancaire, signe que les institutions bancaires se préparent déjà pour une augmentation imminente du taux directeur de la BCR, d’autres s’attendent à ce que cet indicateur soit maintenu à son niveau actuel.
De l’avis d’Andreï Kostine, directeur de la banque russe VTB, le deuxième groupe bancaire de Russie, « le régulateur du système bancaire russe pourrait être plus conservateur et refuser de réduire son taux directeur avant la fin de l’année ».
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Bogdan Zvaritch, analyste en chef de Banki.ru, un site spécialisé en nouvelles économiques, juge, lui, que « les inquiétudes concernant une hausse du taux directeur sont alimentées par le fait que cette question s’est déjà posée lors de la précédente réunion de la BCR, qui s’est déroulée dans un contexte d’inflation stable ».
Pour Mikhaïl Vassiliev, analyste en chef de la banque commerciale russe Sovcombank, la probabilité que la Banque de Russie relève son taux directeur de 100 points de pourcentage est de 60%.
« La Banque de Russie dispose déjà de tous les arguments pour augmenter le taux directeur lors de la prochaine réunion du 7 juin. Nous estimons la probabilité d’une hausse des taux en juin à 60%« , a-t-il indiqué dans une analyse relayée par les médias.
« Si la Banque centrale maintient le taux à 16% en juin, alors nous nous attendons à une augmentation lors de la prochaine réunion du 26 juillet à 17%« , a-t-il encore dit.
L’autre signe scruté par les opérateurs économiques est la position des responsables de la BCR, qui parlent d’une surchauffe de l’économie russe, un terme qui précède généralement une nouvelle hausse du taux directeur.
Avant la réunion sur les taux d’avril, les dirigeants de la banque centrale estimaient que les changements dans les prix à la consommation signalaient un affaiblissement de l’inflation. Une bonne nouvelle signifiant une possible baisse du taux directeur.
Or, quelques semaines plus tard, le vice-gouverneur de la Banque centrale de Russie, Alexeï Zabotkine, annonçait que l’augmentation du taux directeur serait discutée en détail lors de la prochaine réunion, en raison de risques “pro-inflationnistes », comme la pénurie de personnel sur le marché du travail, la croissance rapide des salaires, les risques géopolitiques et les risques d’affaiblissement du rouble.
« Nous nous attendons à ce que l’inflation annuelle culmine en juillet à 8,6% et ralentisse à 6,5% d’ici la fin de cette année. Nous prévoyons que l’inflation reviendra à l’objectif de 4% seulement d’ici la fin 2025« , avait-t-indiqué aux journalistes en mai, ouvrant la voie aux spéculations concernant le taux directeur, qui va souvent de pair avec l’inflation.
Lors d’une interview avec l’hebdomadaire russe « Argumenty i Fakty », M. Zabotkine a même défendu le bien-fondé d’une hausse du taux directeur de la Banque de Russie, jugeant qu’une période temporaire de taux élevés était « dans l’intérêt de l’ensemble de la société ».
A la lumière de cette position, l’expert Vassiliev estime que « l’inflation a cessé de ralentir », signe que le régulateur du système bancaire russe « va probablement resserrer sa politique monétaire pour freiner la demande accrue dans l’économie ».
En attendant la décision de la Banque centrale de Russie, d’autres experts n’excluent pas un troisième scénario selon lequel l’inflation ne ralentirait pas dans les prochains mois et le taux directeur pourrait alors augmenter jusqu’à 18-20%, se rapprochant ainsi du record absolu enregistré au début du conflit russo-ukrainien en février 2022.
Avec MAP