Investissements en dessalement : l’agriculture, le moins soutenu
Le Maroc investit massivement dans le dessalement pour faire face à la crise de l’eau, mais l’agriculture continue d’être particulièrement vulnérable. Selon le rapport de « Fitch Solutions », bien que les projets de dessalement promettent des améliorations pour le tourisme et les grandes villes, la sécheresse persistante représente toujours un obstacle significatif pour l’économie.
Les initiatives de dessalement d’eau au royaume présentent un potentiel prometteur, mais l’agriculture demeure particulièrement vulnérable face aux conséquences de la pénurie d’eau. Ce constat est mis en avant dans le dernier rapport analytique de « Fitch Solutions », qui souligne que « les investissements ciblés du gouvernement et la stabilité politique relative du Maroc sont des aspects positifs pour les risques liés à la pénurie de ressources », selon l’indice des risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Toutefois, le rapport prévient que la pénurie d’eau continuera à représenter un obstacle significatif et un fardeau pour l’économie.
Le rapport met en lumière l’annonce faite par le Maroc en août 2024 concernant l’acquisition d’une technologie de dessalement des États-Unis pour un montant de 27,5 millions de dollars américains. Selon l’analyse publiée début septembre, l’institution de recherche associée à une grande agence de notation mondiale indique que « l’achat de la technologie américaine de dessalement par le Maroc devrait favoriser le secteur du tourisme (environ 7 % du PIB) ». Cependant, elle précise également que « les restrictions imposées par le gouvernement sur l’utilisation de l’eau ces dernières années ont freiné le développement de ce secteur ».
La récente analyse des risques révèle que « le changement climatique constitue un facteur aggravant, transformant la pénurie d’eau en un défi majeur pour tous les secteurs de l’économie marocaine, en particulier l’agriculture ». Le rapport note que « les réservoirs et barrages marocains ne sont remplis qu’à 27,4 % de leur capacité totale, malgré les fortes pluies et les inondations dans les régions généralement sèches du sud ». Il est prévu que le Maroc, à l’instar d’autres régions d’Afrique du Nord, sera confronté à une augmentation de la sécheresse et des températures moyennes, bien qu’il puisse également connaître des périodes de pluies plus abondantes en raison du changement climatique.
En ce qui concerne le secteur agricole, « Fitch Solutions » souligne que « le dessalement aura un impact limité sur l’agriculture en raison des infrastructures d’irrigation encore en développement ». Depuis 2022, environ 80 % des terres cultivées au Maroc reposent sur l’agriculture sèche, ce qui implique que des investissements supplémentaires dans les infrastructures hydriques seront nécessaires pour que l’agriculture bénéficie davantage du dessalement. Toutefois, « l’augmentation de la capacité de dessalement pour l’agriculture irriguée, qui contribue à plus de 50 % de la valeur ajoutée agricole, aura un effet bénéfique », en réduisant la nécessité de transférer l’eau de l’irrigation à l’usage humain pendant les périodes de sécheresse.
Les experts de « Fitch » citent des données de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ainsi que de la Banque mondiale, montrant que « le Maroc est actuellement en retard par rapport à d’autres marchés d’Afrique du Nord en termes de production annuelle d’eau dessalée par habitant ». La technologie de récupération d’énergie sera intégrée dans plusieurs projets de dessalement à travers le pays, et ces projets devraient produire plus d’un million de mètres cubes d’eau potable par jour, représentant une augmentation d’environ 189 % par rapport à la capacité actuelle.
Concernant le secteur du tourisme, l’analyse prévoit un « bénéfice du dessalement », après que les restrictions antérieures sur l’utilisation de l’eau ont freiné ce secteur. Le plan national de l’eau 2020-2050 indique que les projets de dessalement « seront utilisés pour garantir l’approvisionnement en eau potable dans les grandes villes, et dans une moindre mesure pour accroître les disponibilités en eau pour l’irrigation agricole », rappelle « Fitch Solutions ». Le rapport note que « le tourisme a subi des restrictions d’utilisation de l’eau pendant les saisons de pointe, notamment dans des régions comme Casablanca-Settat et Rabat-Salé-Kénitra, ce qui a impacté les infrastructures publiques et privées ».
Le rapport conclut que « les investissements régionaux ciblés dans le dessalement ont produit des résultats prometteurs », comme en témoigne la station de dessalement d’Agadir, en service depuis 2021, qui a contribué à éviter des rationnements d’eau dans ce pôle touristique