IRAN-USA : un nouveau monde serait-il né ?
Douze années de négociations en permanence au bord de la rupture, et, au bout du chemin, un accord à l’arraché, après plusieurs « date-butoir » allègrement dépassées. L’Iran et les pays du « P5 + 1 » (Chine, Etats-Unis, France, Grande Bretagne, Russie, les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU, auxquels s’ajoute l’Allemagne) sont parvenus ce 14 juillet à un accord historique sur le nucléaire iranien.
Le mot « historique » n’est sans doute pas usurpé : il met fin à quatre décennies d’ostracisme entre l’Iran, l’un des pays-clé du Moyen Orient, et l’Occident et en particulier le « Grand Satan » américain. C’est l’équivalent de la Chute du mur de Berlin en 1989, l’effondrement d’une barrière politique et psychologique, dans un contexte bien particulier, celui de la lutte contre un ennemi commun, les djihadistes de l’Etat islamique.
Cet accord repose sur trois éléments-clé qui ont été âprement négociés :
En premier lieu une limitation, -et non le démantèlement- du programme nucléaire iranien pendant au moins une décennie.
Ensuite, une levée des sanctions internationales contre l’Iran, et en particulier le déblocage, à terme, de près de 150 milliards de dollars d’avoirs iraniens gelés à l’étranger.
Enfin, un renforcement des contrôles par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui dépend des Nations Unies.
Des réactions diverses
L’accord fait des heureux -les groupes industriels qui vont pouvoir repartir à l’assaut du principal marché du Moyen Orient avec la fin des sanctions économiques-, et des perdants -Israël qui vit ce résultat comme une « trahison » américaine mettant en danger la sécurité de l’Etat hébreu, ou l’Arabie saoudite sunnite qui vit très mal la fin de l’endiguement de son rival chiite, et rêve de son propre programme nucléaire.
Une nouvelle bataille s’engage, celle de l’acceptation de cet accord par les secteurs les plus réticents de part et d’autre : le Congrès américain sous contrôle républicain, sensible aux sirènes négatives israéliennes, et par nature hostile à un accord signé par Barack Obama ; et, de l’autre côté, les durs du régime des mollahs à Téhéran, à commencer par le Guide de la révolution islamique, l’ayatollah Khameini, à qui revient le dernier mot.
Mais en attendant, il faut se souvenir du chemin parcouru ces quatre dernières décennies pour aboutir à la chute du mur de la méfiance entre Téhéran et ses ennemis d’hier, désormais partenaires.
Marginalisé, sanctionné, l’Iran redevient courtisé par un de ces revirements soudains dont seule la diplomatie américaine a le secret, mais c’est oublier qu’entre-temps, Téhéran a avancé partout ses pions. L’Iran a en effet consolidé son pouvoir sur quatre capitales : Damas où les pasdarans soutiennent le régime, à Beyrouth où le Hezbollah continue d’être l’arbitre discret de la scène politique, à Bagdad où les Chiites reprennent peu à peu les leviers du pouvoir et désormais Sanaa conquis par les Houthis, qui joueront le même rôle au Yémen que le Hizbollah au Liban.