Johannesburg : décadence d’une métropole bâtie sur l’or

Comme on pouvait s’y attendre, les deux violentes explosions qui ont secoué la semaine dernière la métropole économique sud-africaine Johannesburg, la première souterraine et la seconde dans une installation de stockage de produits chimiques, ont laissé pantois les Joburgers et conduit à une avalanche d’interrogations sur l’état d’une «cité de classe mondiale» en décadence.

Pour tous ceux qui étaient présents sur les lieux de ces scènes apocalyptiques ou se sont connectés sur les réseaux sociaux ou les chaines de télévisions locales pour regarder ce chaos, Johannesburg ou Joburg, une mégalopole sortie des mines, n’est plus au «bord de l’effondrement», elle s’effondre.

Et pour cause, la mauvaise gouvernance due à l’échec de la politique des alliances entre partis politiques, la corruption endémique, la criminalité rampante, la mauvaise prestation de service, en plus d’autres facteurs.

La semaine dernière, une énorme explosion souterraine causée par une fuite de gaz dans le centre de Johannesburg a fait un mort et une quarantaine de blessées. Des images et des vidéos publiées par les médias locaux montrent des dégâts importants au niveau de la chaussée d’une rue centrale et un gigantesque incendie couvrant toute la zone de nuages de fumée, alors qu’une vingtaine de voitures ont été endommagées par la déflagration.

Ce qui était encore plus inquiétant, c’est que quelques heures après ces fortes explosions, le public continuait de tourner autour de ces scènes, prenant des photos et des vidéos avec les téléphones. Il n’y avait aucun plan et aucune inquiétude pour leur sécurité ou ce qui pourrait arriver à la suite d’une explosion inexpliquée. Pour tous ceux qui ont regardé de visu cette apocalypse, ces images en disent long sur l’état d’une ville bâtie sur l’or et qui, de surcroit, contribue à plus d’un tiers de l’ensemble des recettes fiscales de l’Afrique du Sud.

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Assurément, les Joburgers ne devraient pas avoir à supporter le poids de cette incompétence ou à se demander si la route va exploser sur leur trajet vers le domicile ou le lieu de travail.

Pour les résidents, les dirigeants et les militants communautaires, ce n’est indubitablement pas de la malchance, mais de la mauvaise gouvernance. Une combinaison de négligence du gouvernement, de défaillance de la prestation de services et de dégradation urbaine qui en résulte ont suivi, dans une certaine mesure, les changements démographiques des années 1990 et 2000, mais se sont considérablement accélérées pendant la pandémie de Covid-19.

Et pourtant Joburg était, il y a quelques années à peine, le centre financier de l’Afrique du Sud, voire de toute l’Afrique. La ville a maintenant plus de nids-de-poule que de maisons, a connu 205 jours de délestage électrique cette année seulement et a également été touché par de fréquents coupures d’eau. L’aggravation de la pauvreté et la montée en flèche des niveaux de criminalité étaient là depuis le début.

Les nids-de-poule sont devenus si graves que certaines rues ne sont plus sûres à conduire. Et dans toute la ville, le ramassage des ordures n’est pas fiable et les dépotoirs illégaux se multiplient, ce qui pose des risques pour la santé.

Que l’on conduit dans la banlieue luxuriante de Joburg ou dans le CBD délabré, une chose est commune : presque aucun feu de circulation. Certains ont été renversés par des véhicules lors d’accidents et non réparés, tandis que d’autres ont été détruits par des voleurs de cuivre. L’Agence des routes de Johannesburg a elle-même reconnu l’état lamentable des feux de circulation de la mégalopole.

Les robots endommagés et les délestages électriques ont également entraîné une prolifération de contrôleurs de la circulation informels, principalement des sans-abri ou des mendiants, aux principaux carrefours de la Johannesburg. Cela semble s’être produit parce que le département de la police métropolitaine de la ville semble ne plus envoyer d’agents de la circulation pour aider à maintenir la circulation fluide, en particulier aux heures de pointe.

La mauvaise gestion des finances et l’occupation illégale de terres, qui a récemment vu le meurtre d’un homme de 31 ans dans une affaire impliquant prétendument Al Jama-ah, le parti à la tête du nouveau gouvernement de coalition de Johannesburg, sont quelques-uns des faits saillants de l’instabilité qui secoue la ville ces dernières années.

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La raison de ce scénario chaotique est que les quatre cavaliers de la capture de l’État, à savoir la corruption, la criminalité, l’incompétence et l’apathie, ont ravagé cette ville autrefois magnifique. Et bien que Joburg n’héberge aucune des trois branches de l’Etat, presque tous les Sud-africains admettront que c’est la capitale. Pas officiellement, mais dans la pratique.

Une promenade dans l’ Ecopark de Northcliff Ridge, le point culminant de Johannesburg, nous procure une vue à 360 degrés sur la ville. Devant se trouve le paysage urbain, en dessous la banlieue, engloutie dans ce que l’on dit être « la plus grande forêt urbaine artificielle au monde ». Au nord se trouvent les montagnes Magaliesberg et au sud les décharges minières qui bordent le fameux quartier Soweto.

Johannesburg est ainsi unique en son genre en ce sens qu’un même espace peut contenir des pôles opposés : Des eaux vives jaillissantes qui ont donné leur nom au Witwatersrand coulent désormais dans des rivières parmi les plus polluées au monde. Joburg regorge aussi de monuments et sites patrimoniaux qui témoignent de la réalité qu’il s’agit toujours d’une ville pleine d’histoire, de beauté, d’émerveillement… et de possibilités.

Avec MAP

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