Kaïs Saïed, de quelle forfaiture est-il le nom ?
Par Hassan Alaoui
Le président dictateur de Tunisie – en vérité plus dictateur que président – Kaïs Saeïd s’est fendu de propos hallucinants sur les peuples africains, en les traitant de tous les noms ou à peine. Entre autres amabilités, cette phrase horripilante : « L’immigration clandestine subsaharienne relève d’un complot pour modifier la démographie de la Tunisie afin qu’elle soit considérée comme un pays africain uniquement et non un pays arabe et musulman ».
Un Goebbels ne dirait pas mieux ou pire ! L’ombrageux petit potentat, tout à sa haine de soi, de lui-même, a fini enfin par dévoiler son vrai visage – et quel visage ! Celui d’un complexé et d’un raciste invétéré qui, depuis son accession au pouvoir par une manière de coup d’Etat sous couvert constitutionnel, a kidnappé la démocratie tunisienne et la vie des Tunisiens. Il fait débarquer à tour de bras les dignitaires du régime, impose sa violence dans la prise de décisions, vassalise son pays par le voisin algérien, et concentre en sa petite personne tous les pouvoirs et privilèges d’un dictateur romain…
Voilà que des minorités subsahariennes subissent son mépris et sa haine au grand jour, officiellement, outrageusement ! Les seules catégories qui, en principe, devraient bénéficier non seulement d’une mansuétude mais d’un soutien du pouvoir, deviennent ainsi les cibles du racisme d’Etat officiel et lamentable. On n’a pas de mot plus fort pour accepter, admettre les injures et les vociférations lancées du haut de sa tour carthaginoise par un président qui n’a de nom que la caricature, qui jette sa bave sur plus de 350 Millions d’Africains , qui trahit les principes humains de son pays, cette Tunisie chère dont la longue histoire témoigne de son ancrage en Méditerranée et en Afrique. Et dont la bataille de Carthage et le succès de Hannibal, quelque 140 ans avant J.C. déjà, illustrait la bravoure du sud vers le nord, la revanche des forces de l’Afrique…
La mémoire de Kaïs Saeïd nous semble d’autant plus courte qu’il oublie ce que la Tunisie, entre autres pays, a accompli sous le président Habib Bourguiba dans les années soixante pour donner corps et âme à l’Organisation de l’Unité africaine, mobiliser son pays pour promouvoir la démocratie, soutenir mordicus les différents mouvements de libération nationale dans le continent, porter la voix des peuples africains, ouvrir grandes les portes des universités aux étudiants africains et enraciner son pays dans la culture ancestrale de l’Afrique. « Comment peut-on être Persan ?… » Cette question, posée au cœur du livre de Claude Lévi-Strauss, « Race et histoire », par Jean Pouillon, son disciple, peut bel et bien coller à l’aventureuse et malencontreuse sortie du président tunisien… L’anthropologue répond ainsi : « L’ironie de la question appelle l’évidence de la réponse : vous en êtes un ! L’homme, c’est celui que je suis, celui qui vit et comme moi, et pourtant c’est également l’autre, aussi différent que moi puisse-t-il être… ».
On imagine très mal le président de Tunisie intégrer un tel apophtegme, si tant est qu’il soit supposé avoir lu ces textes. Le paradoxe affligeant est qu’il dit craindre que son pays subisse une transfiguration démographique, autrement dit un changement « physionomique » caractérisé passant du « blanc » au « noir » d’une conception archaïque de l’histoire et de la diversité culturelle qui est au fondement des peuples d’Afrique ce que leurs cultures sont au socle de la civilisation du monde. La Tunisie n’est pas plus arabe que certains Etats africains à dominante arabe, de même qu’elle n’est pas plus musulmane que d’autres Etats musulmans africains…L’Islam avait été défendu en son temps par des combattants arabes et musulmans. Au Nigéria, dont la population fait 200 fois celle de la Tunisie, près de 55% sont musulmans de couleur noire, et ne revendiquent aucun monopole exclusif.
La perception obscure de Kaïs Saeïd de la différence de races – et de couleurs de peau – est certainement cette ambiguïté fallacieuse qu’il a de voir des groupes d’hommes mélangés refusant ainsi leur fusion, imaginant que la race noire prévale, domine en somme. Or, le recours à ce langage – même métaphorique – der « modification », de transformation démographique relève du racisme primaire et violent. Il fait sien ce paradigme de reniement de la diversité des cultures et des coutumes,
Le chef de l’Etat tunisien est un raciste invétéré, jusque-là camouflé, drapé dans sa tunique de Nessus que le pays revêtit malgré lui, il empoisonne les relations de ce dernier avec l’Afrique tout entière et fait honte à son pays, choque à coup sûr le monde, enfin insulte l’intelligence des peuples. Ce qui lui vaut condamnation et sentence, violeur et dictateur … Son indigne admirateur, du nom d’Eric Zemmour, joue quant à lui la schadenfreude