La crise du coronavirus a révélé les faiblesses de la mondialisation
La crise du coronavirus a révélé les faiblesses de la mondialisation, devenue source de fragilité, d’imprévisibilité et de sidération et doit être corrigée pour devenir plus équilibrée, plus partagée et être au service des biens communs de lPCNS’humanité, a souligné M. Fathallah Oualalou, Senior Fellow du Policy Center for the New South (PCNS).
Dans une publication intitulée « La mondialisation et la pandémie: Chroniques de confinement », M. Oualalou a estimé que cette approche de partage doit se traduire par un cheminement du monde vers une multipolarité, notant qu’à côté de la Chine (l’Asie) et des États-Unis (l’Amérique), l’Europe doit prendre conscience de la nécessité de se positionner en créant un troisième pôle solidaire avec l’Afrique qui permettrait à la Méditerranée de retrouver sa centralité perdue.
Ayant entraîné des interruptions dans les chaînes de valeurs mondiales, cette crise a ainsi permis aux proximités et aux solidarités régionales de devenir les assises de souverainetés et d’autonomies nouvelles, fait-il observer. M. Oualalou estime que c’est dans ce cadre que l’Union européenne doit concevoir le mouvement de relocalisation dont il est question. Il est nécessaire pour les Européens d’adhérer à une logique de «ré-régionalisation» dans le cadre d’une verticale regroupant l’Afrique et l’Europe, avec la Méditerranée en son cœur pour participer à l’émergence d’une multipolarité partagée.
Le Maroc, relais entre l’Afrique et l’Europe, devra intégrer cette logique et les réponses qui seront apportées aux contraintes nées de la nouvelle crise contribueront à enrichir son nouveau modèle de développement, poursuit-il.
Par ailleurs, 2020 restera dans l’histoire l’année du coronavirus, crise d’origine sanitaire et ainsi dans l’après Covid-19 la priorité sera accordée à la santé, sauver les vies humaines, promouvoir la recherche scientifique, fabriquer les médicaments à utiliser avant de découvrir le vaccin, en vue de maîtriser la préservation dans le futur, a-t-il dit. M. Oualalou a également mis l’accent sur le besoin de santé et de sauvegarde de la vie humaine qui vont devenir des choix stratégiques des politiques publiques. Au même rang que la sécurité et la paix, la santé est en passe de devenir un bien commun de l’humanité. Parallèlement à la préservation de la vie, les États doivent s’attaquer, avec diligence, à cet autre grand chantier qu’est celui de parer l’effondrement de l’économie avant de mettre en place les instruments de relance des systèmes productifs, a-t-il ajouté.
Au sujet des leçons à tirer de cette crise sanitaire, l’économiste a noté que cette pandémie du coronavirus a révélé à notre société mondialisée, sa profonde fragilité et ancré dans les esprits la certitude que c’est seulement par une action concertée que l’on pourra en venir à bout et avancer. Ainsi, au plus profond de la crise sanitaire, est en train d’émerger un besoin d’unité et de solidarité, entre les États et nations et solidarité à l’intérieur de celles-ci entre les classes sociales et les générations. En effet, Covid-19 a mis en lumière les limites de l’ultralibéralisme et de l’individualisme. Les règles du marché ne peuvent plus, seules, diriger le monde, indique M. Oualalou, affirmant que l’État, que l’on veut désormais protecteur, aura la mission stratégique d’en redresser les dérives qui se mesurent en termes de détérioration de l’environnement (dimension écologique), d’accentuation des inégalités (dimension sociale) et, maintenant, d’apparition d’épidémies (dimension sanitaire). « La vulnérabilité que le Covid-19 a révélée nous interpelle nous, Marocains, Maghrébins, Sud-méditerranéens et Africains.
Elle doit nous conduire à prendre conscience de la valeur du voisinage comme un bien commun, à ouvrir nos frontières, créer les bases de réconciliation et de rapprochement, pour renforcer notre position de négociation dans la gestion de la mondialisation post-2020″, souligne-t-il. Dans la région afro-euro-méditerranéenne, relève M. Oualalou, c’est à l’Europe de tirer les leçons de cette crise sanitaire et économique, à travers la réduction de sa dépendance au niveau des chaines de valeur mondiales avec le lointain et créer des interdépendances solides avec sa proximité au Sud, en plus de la promotion la relocalisation des activités industrielles pour les intégrer dans une logique régionale qui intègre l’aire afro-méditerranéenne permettant, ainsi, de redonner à la Méditerranée sa centralité en tant que mer européenne et Africaine.
L’après Covid-19 pose le problème, à court terme, de l’endettement des pays africains qui ne peut être résolu que dans la cadre d’une concertation internationale entre les pourvoyeurs occidentaux et chinois de financements extérieurs.
A moyen terme, l’Afrique doit améliorer ses performances dans le domaine agricole, l’élargissement de ses marchés domestiques, la mise en place de la zone de libre-échange continentale, la promotion de l’électrification et la réalisation de grands progrès en matière de formation. Tout cela ne peut se faire sans progrès réel dans la gouvernance politique des pays, avec un challenge essentiel d’arriver à diversifier les tissus productifs dans toutes les régions du continent pour lui permettre de mieux négocier sa position dans les chaines de valeur mondiales.
Ainsi, pour une refondation réussie de la mondialisation, M. Oualalou estime que l’Afrique doit être au cœur des nouveaux centres d’intérêt des politiques publiques : santé, équité, environnement.
Elle saura alors démontrer sa capacité à maîtriser ses rapports avec toutes les grandes puissances et à construire, dans la cadre de la multipolarité future et dans une approche de régionalisation avec l’Europe voisine, une zone de coproduction et une verticale Afrique-Europe avec un nouveau centre de rayonnement : la Méditerranée. Le Maroc, qui appartient à cette aire afro-euro-méditerranéenne, aura certainement à être actif dans cette approche régionale, a-t-il fait valoir.