La démocratie, est-elle une fin en soi?
Abraham Lincoln définit la démocratie comme le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. Oscar Wilde lui rétorque : c’est l’oppression du peuple par le peuple, pour le peuple.
Alors, la démocratie, est-elle la forme de gouvernance idéale ? Devons-nous faire nôtre, la définition de Winston Churchill : « Le pire des systèmes politiques à l’exception de tous les autres. »?
Les élections, le sacro-saint vote, est-ce la clef pour installer ce système politique, à nul autre pareil ?
L’abus du mot « démocratique » n’est pas sans danger, surtout en le rendant un qualificatif élogieux. Le monde a-t-il avantage à étendre le domaine de la démocratie? Peut-on avoir une économie performante et un développement exceptionnel sans démocratie ? La Chine nous en donne une insolente démonstration. La paix sociale existe parfois sous un régime dictatorial. Pour l’État de droit, dès lors que les juges sont indépendants du pouvoir politique, le régime importe peu.
Mais on doit se rappeler aussi que la sécurité est la première exigence des peuples. Dans tous les derniers scrutins, que cela soit en Pologne, Hongrie, Italie ou au Brésil, la population a envoyé un message très clair aux élites politiques : on a assez de l’insécurité. Les idéologues de droite, obsédés par leur culte de la liberté, et les idéologues de gauche, obsédés par leur culte de l’égalité, oublient trop souvent ce que les citoyens demandent en premier à l’État, c’est leur assurer la sécurité pour leur personne, leur famille et leurs biens. Si un État n’est plus capable d’assurer la sécurité de ses citoyens, il ne mérite même plus le nom d’État, encore moins de Démocratie. Il y a pire que la dictature politique, c’est l’anarchie. Aujourd’hui, l’Europe occidentale est tentée par différents votes populistes. Ses gouvernants, inspirés par le libéralisme économique ou par le social-démocratie, ont laissé se développer des quartiers où la loi de la jungle est venue supplanter les lois républicaines. À quoi leur sert de voter s’ils doivent rentrer chez eux la peur au ventre? Au lieu de se gargariser des droits de l’homme, commençons par assurer aux administrés leur premier des droits : la sécurité.
La démocratie, comme on le voit, est liée directement à l’exercice du pouvoir. C’est un moyen de gouvernement et non une fin, comme le dit Friedrich Hayek, prix Nobel d’économie (1974).
La question qui se pose : Est-ce un avantage pour le genre humain d’en étendre le domaine?
Aucune théorie démocratique ne fournit de raison convaincante de considérer comme une amélioration, tout élargissement du corps électoral. Certains démocrates rejettent tout simplement la règle d’un homme, une voix. Ma voix ne peut pas peser autant que celle de ma concierge ! Et pourtant c’est la règle fondamentale de la démocratie, d’où ses limites.
Le monde occidental considère le suffrage universel comme le meilleur arrangement, mais cela ne prouve pas qu’il soit requis par un principe fondamental.
La démocratie souffre du fait qu’on l’élabore en vue d’une communauté homogène idéale, mais on l’applique ensuite à des unités imparfaites et souvent artificielles, ce qui est le propre des États d’aujourd’hui.
Le concept crucial pour la démocratie doctrinaire est celui de la souveraineté populaire. Ce concept signifie que la règle majoritaire n’est pas limitée ni limitable.
Si la démocratie est un moyen plutôt qu’une fin, ses limites doivent être recherchées dans l’analyse de trois arguments principaux : le premier, elle est la seule méthode de changement pacifique que l’homme ait jusqu’ici découvert. Le deuxième a été historiquement le plus important, la démocratie est un rempart pour la liberté individuelle. Enfin, le troisième argument se réfère à l’effet positif qu’ont les institutions démocratiques sur le niveau de compréhension des affaires publiques.
Dans son ouvrage « De la démocratie en Amérique » Tocqueville écrivait : « La démocratie est la seule méthode efficace pour éduquer la majorité » Est-ce dire que la démocratie permet la manipulation de l’opinion ? Force est de constater que la démocratie ne met pas toujours le pouvoir dans les mains des plus sages ni des mieux formés ou informés.
« Ils ont voté, puis après ? » chantait Léo Ferré. La pêche aux voix conduit les candidats à multiplier les moyens pour les séduire, ce qui pousse, irrésistiblement, à la démagogie et aboutit souvent au populisme. La cité athénienne, toujours citée en exemple, n’a connu une démocratie digne de ce nom que quelques années, au temps de Périclès. Jean-Jacques Rousseau dans son « Du contrat social » conclut dans le même sens. Alors, la démocratie est-elle en réalité le domaine de l’élite ?
La démocratie nécessite une Éducation nationale digne de ce nom, sinon, elle enfante, comme j’ai dit plus haut, la démagogie, voire le populisme. Avec son corollaire, l’élection devient alors, un simple moyen de conquête du pouvoir.