La Fondation Attijariwafa bank met en perspective la citoyenneté à l’ère de la mondialisation
La citoyenneté se perdrait-elle dans les dédales de la mondialisation dont on dit qu’elle efface l’identité, au nom de l’uniformisation ? Pour y répondre non sans s’interroger, la Fondation Attijariwafa bank a organisé, en son siège à Casablanca, le Jeudi 17 Mars 2016, la 17ème conférence de son cycle « Echanger pour mieux comprendre » sous le thème : « La citoyenneté à l’épreuve de la mondialisation ». Cette rencontre s’est illustrée par un débat contradictoire riche et a réuni plus de 200 invités, dont la majorité constituée par des étudiants et enseignants universitaires ainsi que des personnalités de la société civile.
Dans le mot de bienvenue, prononcé au nom de Mohamed El Kettani président du groupe Attijariwafa Bank, Mme Saloua Benmehrez, Directeur Exécutif du groupe Attijariwafa bank en charge de la Communication Groupe et de la Fondation Attijariwafa bank, s’est félicitée de la forte présence des jeunes étudiants et de leurs enseignants. Elle a d’emblée déclaré : « Si le sujet de cette conférence nous interpelle tous, il concerne, en premier lieu, notre jeunesse et son avenir. Car à travers les choix qu’elle opère aujourd’hui, se dessine déjà le Maroc de demain », a-t-elle déclaré. « En ce 21ème siècle, le défi qui se pose à nous est grand car la citoyenneté est sans cesse redéfinie, parfois bridée. Il nous appartient de la préserver, de la consolider à travers nos lois mais aussi nos actes et nos engagements au service de la collectivité ». Avant de conclure son allocution par un appel à l’action : « L’on peut dire sans hésiter : « Etre un citoyen du Maroc au 21ème siècle, c’est être un citoyen du Monde. Mais il nous incombe aussi de former notre jeunesse pour qu’elle soit en mesure d’en comprendre les enjeux et d’en saisir les opportunités, au lieu d’en subir uniquement les contraintes ».
Au cours d’un passionnant échange devant une salle comble, M. Driss Jaydane, Ecrivain et Enseignant et M. Mehdi Alioua, sociologue et enseignant à Sciences Po Rabat, sous la modération de M. Redouan Mfaddel, Economiste et chroniqueur, ont commencé par définir la notion de citoyenneté. La citoyenneté est une obligation, un devoir bien plus qu’un droit. Elle est toujours liée à l’individu et au territoire où elle s’exerce. Selon Aristote, « la citoyenneté consiste à sortir de chez soi pour aller s’occuper de la Cité. Cette définition reste universelle et forte », explique M. Jaydane. De son côté, M. Alioua estime que « La Citoyenneté renvoie à l’appartenance à une communauté. La modernité rajoute à cette appartenance commune, la nécessité de libérer les individus de certains jougs en les rendant égaux ».
Les deux intellectuels ont ensuite analysé l’impact de la mondialisation sur la citoyenneté en faisant remarquer que la première ne détériore pas forcément la seconde. Selon eux, la vraie citoyenneté est localisée. On ne peut pas s’occuper concrètement de ce qui est au-delà du regard. Et donc la mondialisation ne peut donc rien nous enseigner ou rien nous retirer sur la Citoyenneté. « En revanche, la globalisation a modifié les pouvoirs fondamentaux de l’Etat sur ses citoyens, du fait de l’affaiblissement de sa maîtrise du territoire. On assiste ainsi à dénationalisation de l’Etat », précise le Sociologue. Pour M.Jaydane, l’histoire de l’humanité connaît une forte rupture avec l’émergence de la société de consommation. « Cette société ne s’appuie pas sur le lien social mais sur le lien marchand qui se substitue donc à la citoyenneté et à ses valeurs. Aujourd’hui, consommer c’est agir. »
Contrairement aux idées reçues, Mehdi. Alioua et Driss Jaydane relativisent l’impact des réseaux sociaux sur l’exercice de la citoyenneté, rappelant que la jeunesse a toujours été politisée. « La mobilisation des jeunes sur les réseaux sociaux est une manifestation symbolique de l’action concrète dans les rues. Cependant, le symbolique ne peut remplacer l’action sur le terrain ».
Evoquant le cas du Maroc, le sociologue comme le philosophe ont affiché une certaine sérénité sur la capacité du Royaume à s’intégrer dans la globalisation sans renier ses fondamentaux. « Les Marocains font partie des peuples les mieux armés au monde pour affronter la globalisation, sans dilution. Nous sommes une très ancienne terre de confluences traversée par plusieurs peuples. Ils ont pu y vivre en bonne intelligence. C’est cette histoire qui permet aux Marocains de s’articuler à la globalisation », précise Mehdi Alioua.
Abondant dans le même sens, M. Jaydane rappelle que le Maroc a une longue tradition d’accueil des Etrangers. « Quand on aime sa citoyenneté, la plus belle manière de le prouver, est de l’offrir aux autres, s’ils le souhaitent ».
Cet échange a tenu en haleine une assistance très attentive et suscité de nombreuses questions émanant des jeunes étudiants.
A travers cette nouvelle édition de ses conférences-débats, la Fondation Attijariwafa bank confirme une nouvelle fois sa volonté d’être un acteur socialement responsable qui contribue à la promotion d’un débat constructif sur des thématiques d’actualité qui concernent le quotidien de nos concitoyens et qui ont un fort impact sur le développement de notre pays.
VERBATIMS
Mehdi Alioua, Sociologue, Enseignant à Sciences Po Rabat, Université Internationale de Rabat
« Les Marocains du Monde se sont totalement adaptés dans leurs pays d’accueil. Dans le monde, ils sont les plus nombreux à obtenir la citoyenneté étrangère. Le seul pays qui fait mieux que le Maroc, est le Mexique mais uniquement avec les Etats-Unis. Or, les Marocains sont les plus nombreux, devant les autres nationalités, à devenir Hollandais, Espagnols, Italiens, et pourquoi pas demain, Chinois ! »
Driss Jaydane, Ecrivain et Enseignant
« Le consommateur et le client sont les nouvelles figures de la citoyenneté. C’est la logique de la privatisation des sociétés. Aujourd’hui, pour être bien traité, il faut être un client. La relation client finira- t- elle par remplacer la relation citoyenne, dans le sens où, pour perpétuer la relation-client, l’entreprise pourrait être tentée d’emprunter les figures de la citoyenneté ? »