La protection du droit international humanitaire, un devoir constitutionnel de tous
La protection du système de droit international humanitaire et sa promotion est un devoir constitutionnel auquel tout un chacun doit contribuer, a indiqué, mercredi à Rabat, le procureur général du Roi près la Cour de cassation, président du Ministère public, Mohamed Abdennabaoui.
Intervenant à l’ouverture des travaux de la deuxième Conférence maroco-qatarie sur « le droit international humanitaire et les mécanismes d’application » destinée aux magistrats, Abdennabaoui a affirmé que le Parquet général est soucieux de « l’application stricte et effective » de toutes les conventions internationales ratifiées par le Royaume, en particulier les conventions formant le système du droit international humanitaire. Le Royaume a ouvert des champs de réforme immenses dans les domaines judiciaire et des droits de l’Homme et ce, dès l’adoption de la Constitution de 2011 qui a consacré l’indépendance des pouvoirs législatif et exécutif ainsi que la suprématie des conventions internationales ratifiées par le Maroc sur les législations nationales, a-t-il rappelé.
Abdennabaoui a, en outre, fait savoir que le législateur s’emploie actuellement à renforcer les capacités de l’appareil judiciaire afin d’étendre son champ de compétence aux actes incriminés par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), à travers l’inclusion, dans le projet de Code pénal soumis au Parlement pour examen, de dispositions relatives aux génocides, aux crimes contre l’humanité et aux crimes de guerre.
Le Ministère public reste ouvert à la coopération avec les institutions et les organismes nationaux et internationaux afin de promouvoir la culture d’engagement en faveur du droit international humanitaire, faire connaître ses dispositions et finalités et permettre aux magistrats de se l’approprier. Dans son intervention, la présidente de la Commission nationale du droit international humanitaire, Farida El Khamlichi, a indiqué que cette rencontre de deux jours, qui se tient dans le cadre de la coopération distinguée avec la commission qatarie, vise à accroître l’intérêt des juges et des juristes marocains et qataris pour le droit international humanitaire, et de bénéficier de leur lecture professionnelle des conventions internationales et des lois nationales.
El Khamlichi a souligné qu’au moment où les parties au Statut de Rome ont conféré à la Cour pénale internationale (CPI) la charge de juger les actes incriminés par le droit international humanitaire, « les rédacteurs du projet d’amendement de notre droit pénal ont tenu à y inclure ces crimes, afin de parachever notre système pénal national dans ce domaine ».
Elle a insisté, à cet égard, sur l’importance de l’adéquation avec le Statut de Rome, compte tenu du rôle complémentaire des compétences de la Cour internationale précitée, qui ne peut se tenir qu’en cas d’un manquement de la justice nationale incapable ou ne désirant pas juger les crimes relevant de la compétence de la Cour, ajoutant que l’adéquation contribue à préserver la souveraineté nationale représentée par le pouvoir judiciaire, qui seul a la légitimité de poursuivre les accusés, tant que la loi qu’il applique ne diffère pas de celle de la Cour pénale internationale.
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De son côté, le secrétaire général du ministère de la justice et président de la commission nationale du droit international humanitaire au Qatar, Sultan Bin Abdullah Al-Suwaidi, a souligné l’importance de réfléchir aux mécanismes d’application du droit international humanitaire « compte tenu des flagrantes violations de ce droit dans les conflits que connaît actuellement le monde, notamment le monde arabe ».
Selon Al-Suwaidi, « l’opinion publique est en droit de s’interroger sur l’utilité de ce droit si ses dispositions ne sont pas appliquées » d’autant plus qu’à la lumière des événements actuels, « l’on est porté à croire qu’il n’existe aucun mécanisme juridique à même de sanctionner les auteurs de telles violations et de rendre justice aux victimes », alors que le droit international humanitaire est en réalité l’une des branches de droit les plus réglementées vu le grand nombre des conventions qui le sous-tendent, outre le droit international coutumier.
Le responsable qatari a ensuite relevé que si des cas de violation et de non-application du droit international humanitaire « peuvent survenir pour des raisons politiques, des représailles voire pour tester de nouvelles armes dans un contexte de conflit armé », il existe en contrepartie des facteurs qui favorisent le respect de ce droit au niveau de l’Etat, notamment sa volonté de préserver son image et sa réuptation auprès de la communauté internationale.
Afin de mettre fin aux graves violations du droit international humanitaire, Al-Suwaidi a plaidé pour l’activation des mécanismes d’application de ce droit par les parties engagées dans les conflits armés, à travers la coopération entre les pays ainsi qu’avec les Nations unies, sans omettre le rôle important du Tribunal pénal international en tant que complément à la justice nationale.
Pour sa part, le chef de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Maroc, Pascal Mauchle, a mis en avant l’importance de la coopération entre le CICR et la Commission nationale marocaine du droit international humanitaire en vue de promouvoir ce droit au Maroc, saluant les efforts du Royaume en matière d’intégration des conventions de Genèves et de leurs protocoles additionnels dans la législation nationale.
Les commissions nationales du droit international humanitaire du Maroc et du Qatar avaient organisé, le 15 avril 2016, un colloque d’information et de sensibilisation au droit international humanitaire dans le cadre de la mise en oeuvre d’un mémorandum d’entente signé par les deux pays à Doha.