La Troïka du Sahel trace sa voie vers une rupture historique avec la CEDEAO
Les contours d’une sortie imminente de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest prennent forme au cœur de l’Alliance des États du Sahel. Réunis dimanche dans la capitale burkinabè, les ministres des Affaires étrangères du Burkina Faso, du Mali et du Niger ont intensifié leurs efforts pour élaborer une stratégie commune de retrait, marquant une étape déterminante dans le repositionnement géopolitique de la région.
Cette rencontre, placée sous le signe de la souveraineté et de l’autodétermination, a réuni Karamoko Jean Marie Traoré, ministre des Affaires étrangères du Burkina Faso, Abdoulaye Diop, ministre malien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, et Bakary Yaou Sangaré, chef de la diplomatie nigérienne.
Dans un communiqué officiel, les trois ministres ont salué le leadership de leurs chefs d’État respectifs, qualifié de « vision éclairée et détermination inébranlable ». Cette initiative marque la transformation de l’Alliance des États du Sahel (AES) en une confédération bâtie sur les principes de souveraineté, de paix et de prospérité partagée.
« Nous construisons un espace où la dignité et l’intégration priment sur les ingérences extérieures, » a déclaré Abdoulaye Diop lors de son allocution d’ouverture, soulignant l’importance d’une rupture décisive avec les schémas de dépendance hérités du passé.
Les ministres ont également rendu hommage au soutien populaire massif à ce projet de confédération, soulignant que celui-ci incarnait « les idéaux panafricains ». Ce ralliement populaire, selon le communiqué, constitue une réponse aux aspirations des populations du Sahel, qui souhaitent voir émerger une gouvernance ancrée dans leurs réalités sociopolitiques.
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Au-delà des déclarations d’intention, la réunion a permis d’esquisser une feuille de route pour les négociations à venir avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Sans en dévoiler les détails, les responsables ont insisté sur la nécessité de préserver le bien-être des populations des trois pays en priorisant les intérêts économiques et sociaux.
Cette démarche intervient dans un contexte de tensions croissantes entre la CEDEAO et les régimes de transition militaire du Sahel, notamment après l’imposition de sanctions économiques jugées dévastatrices pour des économies déjà fragilisées par les crises sécuritaires.
Un projet commun de gouvernance et d’intégration
Symbolisant cette volonté de rupture, le président de la Confédération AES, le général Assimi Goïta, a annoncé le lancement d’un passeport biométrique commun pour le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Prévu pour le 29 janvier 2025, ce document incarne l’ambition d’une intégration régionale renforcée, libérée des contraintes imposées par des institutions considérées comme inefficaces.
Par ailleurs, la date officielle du retrait des trois États de la CEDEAO a été fixée au *29 juillet 2025*, marquant la fin d’une ère d’appartenance à une organisation dont les décisions sont perçues comme dictées par des puissances extérieures.
Au terme des travaux, les ministres ont exprimé leur gratitude envers le président burkinabè, le capitaine *Ibrahim Traoré*, pour son rôle moteur dans ce processus de transformation. Ils ont également réitéré leur engagement à faire de l’AES un modèle de coopération régionale résolument tourné vers les besoins des populations et les défis du XXIe siècle.
« Ce retrait nous offre une opportunité historique de bâtir une véritable fraternité sans ingérence, basée sur des principes d’égalité et de respect mutuel, » a affirmé Abdoulaye Diop, résumant l’esprit de la rencontre.
Alors que l’Alliance des États du Sahel poursuit son chemin vers l’autodétermination, ce processus de retrait pourrait bien redéfinir les équilibres politiques et économiques de l’Afrique de l’Ouest, tout en posant la question de l’avenir des organisations régionales face à la montée des aspirations souverainistes.