L’AFDM dresse un tableau sombre sur la violence à l’égard des femmes

À l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, l’Association Démocratique des Femmes du Maroc a mis en lumière les lacunes persistantes dans la lutte contre les violences faites aux femmes au Maroc. Elle déplore les retards dans la mise en œuvre des réformes promises et appelle à des actions concrètes et urgentes pour garantir la sécurité et les droits des femmes.

L’Association Démocratique des Femmes du Maroc (ADFM) a saisi l’opportunité de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, lundi 25 novembre, pour attirer l’attention sur les carences du Maroc en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, en soulignant non seulement les retards dans l’application de certaines réformes mais aussi l’urgence de « faire davantage » pour garantir la sécurité des femmes et la protection de leurs droits. L’ADFM a profité de cette journée symbolique pour rappeler que les progrès réalisés restent insuffisants face à l’ampleur du phénomène de la violence à l’égard des femmes, malgré les engagements pris par l’État marocain sur la scène internationale.

L’ADFM a exprimé son mécontentement concernant l’absence de mise en œuvre des réformes pourtant annoncées par les autorités marocaines. « Bien que des réformes aient été publiquement annoncées, aucune d’elles n’a été concrétisée depuis plus de dix ans », a déploré l’association, en mettant l’accent sur le fait que la lenteur des réformes freine la lutte contre la violence sexiste et le respect des droits des femmes.

Selon l’AFDM, certains textes législatifs essentiels, comme le Code pénal, continuent d’entretenir un climat de violence et de discrimination à l’égard des femmes, sans réelles avancées pour changer la situation. L’association a également mis en lumière le blocage du projet de révision du Code de la famille, un texte législatif qui régit les droits des femmes dans de nombreuses situations sociales et familiales. Bien que ce projet ait été promis, il reste bloqué dans les méandres de la procédure législative.

La Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes est l’occasion pour de nombreuses associations féministes de revendiquer des actions concrètes pour éradiquer la violence et promouvoir les droits des femmes. Cette année, le slogan choisi pour marquer cet événement est : « Tolérance zéro pour la violence, unissons-nous pour mettre fin à la violence contre les femmes et les filles ». Ce message met en lumière l’ampleur du phénomène de la violence et la nécessité d’agir collectivement pour éliminer les violences sexistes. Selon l’ADFM, ce slogan reflète l’urgence d’une action concrète pour lutter contre les violences faites aux femmes, une action fondée sur les statistiques et les données collectées par les Nations Unies qui font état de l’ampleur du phénomène à l’échelle mondiale.

Cette journée coïncide également avec le 30e anniversaire de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, organisée à Pékin en 1995, où les pays participants avaient adopté la Plateforme d’action de Pékin, un plan stratégique pour l’émancipation des femmes. Cette journée marque aussi le 10e anniversaire des Objectifs de Développement Durable (ODD) définis par les Nations Unies, parmi lesquels figure l’ODD 5, visant à parvenir à l’égalité des sexes et à autonomiser toutes les femmes et les filles. Cette coïncidence de dates est un signal fort, qui interpelle les États et les gouvernements sur leur responsabilité à garantir la sécurité des femmes et à adopter des politiques publiques ambitieuses et efficaces pour éradiquer la violence à l’égard des femmes. En ce sens, l’ADFM souligne que les engagements internationaux doivent se traduire par des actions concrètes sur le terrain.

Des lacunes persistantes dans les politiques publiques pour les droits des femmes

Bien que le Maroc ait fait certains progrès en matière de réformes législatives et de politiques publiques, un bilan critique de la situation s’impose. L’association regrette que, au-delà du cadre juridique, les politiques publiques marocaines ne soient pas orientées vers des résultats tangibles en matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes. En particulier, l’ADFM déplore l’absence d’une approche intégrée, globale et fondée sur des résultats mesurables. Selon l’association, malgré la mise en place de diverses stratégies pour améliorer la situation des femmes, celles-ci n’ont pas démontré l’efficacité escomptée.

Une des principales critiques formulées par l’ADFM concerne le manque d’intégration des droits des femmes et du principe de l’égalité des genres dans les lois financières. Par exemple, la loi de finances 2025, qui annonce une accélération des réformes dans divers domaines, ne mentionne pas l’intégration de l’égalité des genres comme un objectif transversal dans l’ensemble des projets de réforme. Cette omission démontre, pour l’ADFM, le manque de volonté réelle de faire de l’égalité de genre une priorité dans les politiques publiques. L’ADFM considère que le suivi des réformes ne peut être véritablement effectué sans un recueil de données précises et complètes sur l’accès des femmes aux services publics, ainsi que sur la reconnaissance de leur contribution non monétaire à l’économie et à la société.

L’ADFM souligne également l’absence de l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination, une instance constitutionnelle dont la mission est de veiller à la promotion des droits des femmes et à la mise en œuvre des politiques de parité. Selon l’ADFM, cette autorité, pourtant inscrite dans la Constitution marocaine, n’a toujours pas été mise en place, ce qui constitue un frein majeur à la promotion effective des droits des femmes.

Des solutions pour la protection des femmes

Pour répondre à ces défis, l’ADFM propose six leviers essentiels pour garantir la protection des droits des femmes et leur défense contre la violence et la discrimination. Parmi ces leviers, l’ADFM appelle à la révision de la loi 103-13, relative à la lutte contre la violence faite aux femmes, afin qu’elle soit pleinement conforme aux normes internationales en matière de protection des droits des femmes. L’association plaide également pour l’accélération des réformes législatives, notamment la révision du Code de la famille, du Code pénal et du Code de procédure pénale, pour éliminer les discriminations persistantes.

L’ADFM propose également la mise en place de politiques publiques spécifiques à la lutte contre la violence, assorties de ressources humaines et financières suffisantes pour permettre une action efficace. Ces politiques devraient inclure des mesures de prévention, de protection des survivantes, de prise en charge médicale et psychologique, ainsi que des sanctions adaptées contre les agresseurs. L’association réclame également la mise en place de mécanismes de suivi et d’évaluation des résultats des politiques publiques au niveau national et local.

Un autre axe important de l’ADFM concerne la promotion d’une culture de l’égalité, en éliminant les stéréotypes et préjugés de genre à travers l’éducation et les médias. Cette approche est essentielle pour changer les mentalités et renforcer la prise de conscience collective sur la nécessité d’éradiquer les violences sexistes.

L’ADFM insiste enfin sur l’importance de favoriser l’autonomie économique des femmes, en facilitant leur accès à l’emploi et leur participation à la vie économique. Elle plaide également pour la révision de la loi instaurant l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination, afin de lui attribuer des pouvoirs renforcés en matière de prévention, de protection, de promotion et de suivi de la mise en œuvre des politiques et législations en matière de genre.

Ainsi, l’ADFM rappelle que l’élimination de la violence à l’égard des femmes nécessite une volonté politique forte, une action résolue des autorités et un engagement réel pour le respect des droits humains et de l’égalité de genre.

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