L’autorisation du « mariage des filles » vise à éviter le recours à « la Fatiha » et à protéger leurs droits
Dans le but de combler un vide juridique, certains juges rendent des jugements autorisant le mariage des filles mineures, en vue de les protéger du recours au « mariage par la Fatiha » qui ne leur garantit aucun droit, affirme une étude réalisée par l’association « Voix de la femme amazigh ».
Les jugements refusant le mariage des filles mineures poussent leur familles à les marier par « la Fatiha ». Ce type de mariage, qui ne garantit aucun des droits des mariées et révèle une « lacune dangereuse » dans le Code de la famille, est souvent utilisé pour contourner la loi et violer les dispositions de ce code, souligne cette étude de « Diagnostic du phénomène de mariage des filles mineures entre législation, jurisprudence et pratiques : cas des filles de la province d’Azilal », dont les résultats ont été publiés récemment à Rabat.
Les auteurs de l’étude utilisent l’expression « mariage de filles » qui, selon eux, traduit le mieux le sens exact de ce phénomène, au lieu du terme « mariage des mineurs », consacré dans le Code de la famille.
Élaborée avec l’appui de l’Agence catalane de coopération au développement (ACCD), dans le cadre du projet « phénomène de mariage des filles dans la province d’Azilal », cette étude indique que les chiffres officiels relatifs au mariage des mineurs enregistrés à l’échelle nationale et locale ne reflètent pas vraiment l’ampleur de ce phénomène, car la plupart de ces mariages « non contractés » sont fréquents dans la campagne et les petits patelins, voire dans certaines villes.
L’étude explique également que bien que l’article 16 du Code de la famille permet de légaliser certains cas ultérieurement en cas du consentement du couple, cette possibilité n’est pas toujours valable en cas d’un simple conflit entre la femme et son époux ou sa famille en l’absence d’un document prouvant leur mariage. Aussi, au cas où le couple a eu des enfants que le mari ne reconnait pas, il sera dispensé de toute responsabilité juridique à leur égard, ce qui prouve la vulnérabilité des familles construites sur le mariage non contractés.
L’étude montre en outre que la plupart des décisions autorisant le mariage des mineures s’expliquent par le manque de ressources financières de leur familles, notant qu’il s’agit d’une « exploitation économique de cette catégorie sociale vulnérable ».
Afin de mettre fin à ce fléau, l’étude propose plusieurs solutions, notamment la suppression immédiate des dispositions juridiques autorisant le mariage d’enfants, l’adoption de l’approche genre dans la nomination des juges, l’incrimination des cas de détournement des dispositions relatives au mariage des mineurs, et le renforcement de la réforme législative, en encourageant les efforts déployés pour promouvoir la situation de la famille dans les différents domaines, notamment la scolarisation des enfants issus du milieu rural.
« Le projet du phénomène de mariage de filles dans la province d’Azilal » vise à contribuer à la lutte contre le mariage des mineures, renforcer leurs droits et sensibiliser les familles et la population de cette province à la nécessité de reporter le mariage jusqu’à l’âge de 18 ans.
Il a bénéficié à 200 élèves (âgés entre 10 et 16 ans) dans les deux communes ciblées outre 25 encadrantes formées dans la communication sur le terrain, 10 instituteurs encadrés dans le domaine de la sensibilisation pédagogique, quelque 10 représentants locaux de partis politiques ainsi que la population locale.